D5- Les positions psychiques de chacun

Nous pouvons à travers, l’analyse qui vient d’être faite sur le jugement d’existence et le jugement d’attribution, dire que l’échange entre le sujet et l’institution est un échange où prévaut la violence. Violence qui est due à des niveaux de processus différents qui impliquent une temporalité autre entre le donataire et le donateur.

Autrement dit, l’échange est violent car ceux qui échangent ne peuvent se rencontrer dans cet échange.

La conception Maussienne de l’échange par le don est battue en brèche, en dehors de l’analyse que nous avons précédemment faite sur l’échange de dû, parce que ceux qui échangent ne savent pas ce qu’ils échangent sur le plan psychique.

La réalité sociale autant pour l’institution que pour les sujets au Rmi vient masquer tous les enjeux psychiques inconscients qui s’y jouent et vient confuser la pensée.

En d’autres termes la violence de l’échange provient de cette rencontre entre deux réalités qui traversent les sujets et les acteurs de l’institution sociale. Cela a pour conséquence que le type de lien reliant le sujet et l’institution est un lien que nous qualifierons d’organique.

Le social avec sa demande et son cadre législatif échange sur le plan manifeste avec le sujet au Rmi en pensant que l’échange contractualisé va permettre au sujet de se relier au groupe social, alors que sur le plan latent l’échange vient certifier l’inconnu de l’échange pour l’institution comme pour le sujet au Rmi.

Entre le donateur et le donataire, l’échange n’a pas la même valeur, ce qui ne permet pas
la rencontre intersubjective.

Qu’est-ce que la demande si ce n’est une adresse à un autre pour susciter attention et amour.

L’objet de la demande est à entendre, « au pied de la lettre », non pour s’y précipiter, mais pour permettre au sujet de tourner autour, de se l’approprier dans une parole, de l’incarner dans un mouvement psychique où s’amorce peu à peu un travail de subjectivation. Le but de cette écoute est d’accompagner le sujet pour qu’il trouve en lui le sens de sa demande, c’est-à-dire ce qui la fonde.

Notre analyse nous amène à nous interroger sur le mode transférentiel des sujets, c’est à dire quel type de transfert est en jeu pour en comprendre les processus de figuration ?

Nous avons précédemment analysé le dépôt du cadre subjectif du sujet dans le cadre institutionnel, l’investissement dont était pourvu l’objet social argent : investissement dans le lien du couple dans la scène primitive, l’externalisation des groupes internes sur la scène sociale.  Ces modes  de figuration du lien du sujet nous conduisent à penser que le transfert topique décrit par B. Duez est le mode de transfert mis en place dans notre clinique.

Le transfert topique est :

‘ « L’actualisation immédiate d’une motion de désir ou d’une motion pulsionnelle sur un ou des objets, sur un ou des représentants autres. La relation est donc une relation actuelle. Le transfert topique opère par diffraction, l’importance de la diffraction est fonction du nombre effectif d’objets ou de représentants actuellement disponibles. Il induit ou produit chez les dépositaires, chez d’(a)utre(s), un retournement de la motion pulsionnelle vers le sujet sous une forme plus ou moins transformée. Le lien figural est un lien de contiguïté. Il se rattache à la catégorie de l’originaire qui a pour fonction de gérer actuellement, dans un lien pictogrammatique, la liaison de l’éprouvé à l ‘image, à d’(a)autre(s). Cette forme de transfert a pour fonction de traiter l’actualité de la relation du sujet à la scène dans laquelle il se trouve ….Le transfert topique tente d’établir avec ceux-ci un lien par lequel le sujet peut s’assurer de l’autre. »159

Dans l’analyse du discours des sujets ainsi que dans l’analyse thématique, nous avons mis en exergue des points nodaux constitués par des groupes internes, groupes internes qui ont montré qu’ils n’ont pu assurer un lien suffisant au sujet pour lui permettre d’être assuré de la constance du lien ;  d’où une pathologie de l’obscénalité qui permet au sujet de constituer un groupe interne dérivé dans la scène sociale : institution, argent, sujet.

Le transfert topique montre comment, dans notre clinique, le sujet reproduit sur la scène sociale, une scène : la scène originaire avec pour corrélat la pathologie du dû, scène qui le protège de la rencontre avec l’intrus et qui ne fait que certifier l’assignement à la négativité.

Notes
159.

Duez B., Les processus psychiques de la médiation, p. 130