A- Genèse de la pensée politique

La genèse de l’histoire des idées politiques prend sa source dans la civilisation grecque classique.

L’organisation de la Polis, la Cité, vers le Vé Siècle avant J.C. définit des énoncés fondamentaux qui ont pour objectif de définir la participation de chacun aux affaires communes de la Cité. Nous assistons au passage de règles coutumières dont les grandes familles tiraient bénéfice à des textes : les lois écrites.

La loi, comme organisatrice politique et sociale conçue comme un texte public, va donner sens à la Cité, que celle ci soit de type oligarchique, démocratique ou royale.

Aristote oppose la Cité à deux autres formes de communauté : la famille et le village, qui ont chacun à leur manière des liens qui les réunissent.

C’est pourquoi son expression : « l’homme est un animal politique » met en exergue la force de la Cité, c’est-à-dire la société civile, non fondée sur « des intérêts passagers, non sur les prescriptions des dieux que l’homme peut réaliser la vertu (= la capacité) inscrite dans son essence (dans sa nature). » 195

Les Grecs vont, durant la moitié du Vé Siècle avant J.C, accomplir une série de réformes :

‘« Le pouvoir central est assuré par l’assemblée populaire qui réunit tous les citoyens une dizaine de fois par an et dans les circonstances graves ; c’est elle qui prend souverainement les décisions, adopte les décrets, élit les magistrats chargés de l’exécutif, désigne en son sein les membres des chambres de justice, cela à la majorité, tout citoyen ayant droit à la parole. Les magistratures exécutives - des stratèges aux inspecteurs des marchés - sont collégiales, limitées et il faut de sérieuses raisons pour qu’un magistrat soit renouvelé dans ses fonctions. Sans doute les inégalités ne sont-elles pas complètement effacées : mais cette organisation civique – qui met le pouvoir au « milieu » et refuse qu’il soit l’apanage de quiconque – vise à conjurer non seulement l’apparition d’un tyran, mais encore l’installation d’une caste ou d’une classe séparée de la société accaparant la domination politique. »196

Nous avons tenu à mentionner, le fonctionnement de la Cité grecque pour signifier l’avènement de la démocratie et surtout de la loi écrite qui est au-dessus des membres de la Cité, permettant de réaliser la justice et d’assurer la liberté de tous.

Par ailleurs :

‘« Le mérite des institutions romaines est cependant d’avoir défini la communauté qu’elles régissent sur un lien de droit et sur un ordre politique strictement déterminé. La respublica (la « chose publique », la Cité) prend une autre consistance : formée par expérience et par réflexion, elle est aussi, autant qu’il est possible dans la contingence historique, l’expression de la loi naturelle. »197

La loi et le lien de droit sont les deux piliers qui vont être à l’origine de la gestion de la communauté grecque, et de la communauté romaine.

Dans son ouvrage sur : « La genèse du droit », A.Lecas, précise que :

‘ « Dans les systèmes juridiques occidentaux, qui sont développés et complexes, mais également plus ou moins marqués par l’héritage du droit romain, l’idée de droit est indissociable de celle de règle (regula), de norme (norma) qui désignent une prescription générale, impersonnelle et obligatoire, qui s’insère dans un ensemble plus vaste. »198

Plus loin, il cite le doyen Carbonnier à propos de la règle de droit qui est :

‘ « Une règle de conduite humaine, à l’observation de laquelle la société peut nous contraindre par une pression extérieure plus ou moins intense. »199

et considère que la notion de force contraignante est ce qui distingue les règles juridiques des règles morales, notion qui apparaît déjà dans la doctrine romaine.

Le droit est, toujours selon cet auteur, ce qui permet de régler les rapports sociaux entre les hommes, même s’il est difficile de délimiter ceux ci d’une manière objective, car la limite entre ce qui sépare l’individuel et le social est délicate. L’objet du droit étant :

‘ « De permettre la vie en société, c’est-à-dire éviter l’anarchie et l’insécurité. En effet, sans la règle de droit :’ ‘d’une part l’état d’anarchie est évident en ce sens que l’on est placé sous le bon plaisir de chacun,’ ‘d’autre part, l’insécurité est inévitable en ce sens que seul un ordre dans la vie sociale permet à l’individu tout d’abord de savoir ce qu’il peut faire et ce qu’il doit supporter de la part des autres, ensuite de connaître les conséquences des actes de chacun et le caractère légitime ou non de ces derniers. »200

Nous devons aussi mentionner ce qui caractérise le système juridique actuel : son émancipation de la religion, ce qui a pour conséquence que les objectifs religieux ne forment pas règles juridiques.

Ce rapide survol nous permet d’affirmer que, l’énoncé juridique ainsi que l’énoncé législatif sont les organes fondateurs des liens des membres de la communauté. Cette énonciation met en exergue, qu’au-dessus des intérêts particuliers (même si les inégalités dues aux conditions sociales sont loin d’être effacées), il existe un principe d’organisation sociale et politique qui a pour fonction d’instituer.

Instituer suppose l’instauration d’institutions, l'analyse du comment celles-ci fonctionnent, et surtout qu’est que cela implique sur le plan psychique.

Notes
195.

Pisier E, Histoire des idées politiques, p. 5

196.

Pisier E., Histoire des idées politiques, p. 7

197.

Pisier E., ibidem, p.17

198.

Lucas A., La génèse du droit, p.24

199.

Lucas A., ibidem, p. 25

200.

Lucas A, ibidem, p. 37