Les effets sur les membres de l’institution

Avant d’entrer dans le cœur de notre analyse, il nous est apparu signifiant de situer «  l’état psychique » des membres de l’institution sociale.

Jacobi B., l’évoque avec pertinence :

‘« L’angoisse qui étreint les sujets précarisés finit par saisir des institutions et leur personnel….l’intensité du désarroi de ces êtres en colère se marque dans une sorte d’infirmité à vivre la rencontre. Et ma remarque s’applique à la fois aux sujets précarisés et aux divers intervenants qui tentent de les accueillir. »213

J.P Pommier lui emboîte le pas, quand il considère que les travailleurs sociaux :

‘"Désormais contraints à travailler l'attente, la désillusion, la perte...davantage peut-être que l'accès à une citoyenneté pleine et entière."214

A travers ces constats repris dans de nombreux travaux sociologiques comme psychanalytiques, il y a un constat de la difficulté, pour ce qu’il est convenu d'appeler les acteurs du social, à trouver leur place au sens de se situer dans la relation avec les sujets "exclus". C'était comme si d'une certaine manière la relation d'aide, d'accompagnement, les dispositifs de travail inhérents à la pratique des travailleurs sociaux avaient perdu de son sens.

Nous entendons par-là, qu'ils ne sont plus aidant pour certains sujets qui sont dans le dispositif du Rmi depuis de nombreuses années, et pour qui l'allocation est l'unique ressource pour vivre. La notion d'insertion, notion qui a fait l'objet de groupe de réflexion entre partenaires sociaux, qui a fait l'objet d'analyse plus théorique reste toujours énigmatique dans sa définition ainsi que dans sa finalité, et n'a pas étayé les pratiques.

C'est pourquoi, en lien avec ce qui vient d'être dit, nous allons mettre à l'épreuve l'atopisation de l'échange, et en analyser les conséquences sur les membres de l'institution. Notre angle d'analyse se démarque du constat sur les pratiques sociales, ainsi que sur l'état psychique dans lequel se trouvent ces mêmes référents sociaux, même si nous en partageons l'analyse, dans le but de porter le débat sur l'échange et sur l'objet social échangé.

Nous posons comme hypothèse de travail que les membres de l'institution sont dans une économie de la perte car ils ne peuvent se saisir psychiquement de l'objet échangé qu’ils ont perdu de vue.

Notes
213.

Jacobi B, Précarité et souffrance psychique, lien social in Cliniques méditerranéennes, p. 95

214.

Pommier J.P., Travail social et souffrance psychique, p. 162