A- Reproblématisationdu champ

Cette clinique prend pour objet d’étude des objets frontières, un peu comme le moi peau est cette interface entre l’intérieur et l’extérieur, entre le dedans et le dehors.

Nous entendons par objets frontières, des objets concrets à fonctions sociales, qui ont une construction psychique pour le sujet dans un double mouvement, un mouvement individuel : l’intrapsychique du sujet, et un mouvement collectif c'est-à-dire l’inconscient collectif.

En d’autres termes, les objets frontières sont des indices d’un dedans-dehors où ne prévaut pas l’objet au sens psychique, mais la manière dont le sujet a investi un objet social dans une construction psychique de tentative de figuration de l’objet psychique.

Il y a un défaut d’investissement de l’objet psychique, défaut que l’objet social tend à surmonter mais qui ne peut jouer ce rôle, car il fait partie d’une réalité sociale.

L’objet frontière est un objet figuré concrètement, figuration qui représente l’impossible figuration de l’objet psychique, objet frontière en lien avec l’institution sociale.

La modélisation de cette clinique présuppose en dehors du référentiel psychanalytique d’aller chercher, d’utiliser, d’autres référentiels issus d’autres disciplines.

Il y a ici une difficulté majeure, qui est l’écartèlement entre l’objet clinique étudié, et l’interprétation avec d’autres champs, qui risqueraient de créer une tension où l’objet d’étude clinique serait perdu de vu.

Nous pensons pourtant que c’est cette tension même qui caractérise cette clinique, qui est d’une certaine manière, une clinique de l’interface. Nous nous risquerions même à dire que si la clinique étudiée n’est pas porteuse de cette tension, alors nous assisterions à une dérive où prévaudrait une analyse comportementale des phénomènes sociaux ambiants.

Il nous parait judicieux de nous arrêter sur la notion même de tension inhérente à la clinique du social.

Par tension, nous considérons la difficulté qu’il y a à articuler le champ de cette clinique avec d’autres champs d’analyse.

Cette articulation renvoie au processus de liaison, caractéristique de la perception de chose à la perception de mots, du processus originaire au processus primaire au processus secondaire.

D’une certaine manière, c’est le processus de liaison qui est en jeu dans l’articulation des différentes grilles d’analyses de par l’objet d’étude même.

Nous entendons par-là la difficulté de pouvoir lier les recherches provenant d’autres disciplines dans le corpus psychanalytique.

Il s’agit de mettre différents domaines de connaissance en conflictualité, pour conserver la rigueur épistémologique, conflictualité dont la finalité est l’articulation des différents champs à travers le processus de liaison.

Si tel n’était pas le cas, l’objet étudié peut alors nous entraîner vers des voies d’objectivation dont les conséquences sur les sujets seraient synonymes d’exclusion.

Le champ de la clinique du social est donc caractérisé par le processus de liaison entre les différents référentiels théoriques en jeu, ce qui permet ainsi d’écarter la confusion pluridisciplinaire. C’est un champ qui est difficile à contenir, et à tenir, de par sa définition même, et parce ce qu’il peut nous entraîner dans la conflictualité qui lui est inhérente.

Pour éclairer ce qui vient d’être, dit nous aimerions faire un survol rapide de l’évolution du mode de paiement.

Depuis plusieurs années, le chèque et la carte bancaire sont utilisés comme modes de paiement ainsi que le porte monnaie électronique qui vient de faire son apparition. Nous assistons ainsi à une dématérialisation de la monnaie.  En effet, de l’objet monnaie correspondant à l’échange marchand à travers différents objets établis : billet, pièces, nous sommes passés à un objet représentant des objets, à une représentation d’objet lié à la valeur.

Nous voyons combien cet objet étudié qu’est l’argent, est lui-même porteur de ce processus de liaison, de transformabilité liée à l’identité de pensée.