1.2.3. Les débuts de l’entre-deux.

De 1950 à 1970, dans un contexte économique et social favorable, les structures médico-éducatives se multiplient. Ce mouvement aboutit à une prise en charge objectivement ségrégative car, conçues pour être des détours momentanés, les institutions médico-éducatives deviennent les éléments d'une filière qui va du berceau à la tombe.

L'école, de son côté, prévoit dans son 5ème plan une vaste campagne d'ouverture de classes de perfectionnement, qui deviendront progressivement des voies de relégation accueillant une population hétérogène composée majoritairement d'élèves en échec scolaire. Au nombre de 1145 en 1951, on en compte 3603 en 1963 puis 15 250 en 1970 !

Paradoxalement, c'est dans ce contexte ségrégatif que vont apparaître des idées qui étayeront l'intégration scolaire. En effet, parallèlement à cette organisation du champ institutionnel, la période de l’après guerre voit se développer un autre mouvement, minoritaire jusqu’à la fin des années 50, mais qui n’aura de cesse de grandir pour exercer encore de nos jours une influence importante. Il s'agit d'évoquer ici la psychanalyse de l'enfant.

Avec la psychanalyse, se développe l’idée selon laquelle le cognitif et l’affectif sont indissociables, et que la déficience mentale chez l'enfant est curable lorsqu'elle est essentiellement liée à des facteurs d'environnement. Porté par ce courant, un nouveau corps potentiel de médecins se fait jour. Ces médecins se distinguent des neuropsychiatres en cela qu'ils revendiquent le lien entre les troubles de l’apprentissage et les problèmes relationnels. Ils tendront alors à réinterpréter progressivement les décisions d’orientation pratiquées par les commissions médico-pédagogiques.

Dans un contre-pied historique, l'Etat autorise officiellement la création des Centres Médico-Psycho-Pédagogique (CMPP). Ces centres ont pour vocation de pratiquer "le diagnostic et le traitement des enfants inadaptés mentaux dont l'inadaptation est liée à des troubles neuro-psychiques ou à des troubles du comportement susceptibles d'une thérapie médicale,d'une rééducation médico-psychologique ou d'une rééducation psychothérapeutique ou psychopédagogique sous autorité médicale 41 ". Le concept de cure ambulatoire fait son apparition.

Les CMPP, qui resteront marginaux jusqu'à la fin des années soixante mais qui connaîtront ensuite un grand développement, auront pour projet d’établir le lien entre l’appareil scolaire, les médecins et les psychologues de l'enfance. Le CMPP sera le lieu où l’école, à tous ses niveaux, donnera à voir aux spécialistes, des problèmes d’apprentissage inévitablement analysés par chaque corps professionnel selon les notions clés de son discours propre. Le résultat essentiel sera que le champ de l’enfance inadaptée, plutôt que redistribué, s’en trouvera élargi par le rassemblement d’une série de troubles psychopathologiques susceptibles d’évolution en lien avec l’institution scolaire qui, par ailleurs continuera d’adresser ses éléments les plus incurables aux internats spécialisés.

Notes
41.

Décret du 18 février 1963 autorisant la création des CMPP.