1.3.1.1. Les dysharmonies psychotiques.

Tant du point de vue clinique que psychopathologique, le diagnostic de dysharmonie psychotique consiste à associer la notion de dysharmonie développementale et celle des traits et mécanismes psychotiques. On évoque la dysharmoniecar les résultats obtenus à partir des outils classiques d’évaluation du rythme de développement psychologique, mesurés à partir du Quotient Intellectuel (QI), sont le plus souvent bas, dispersés et hétérogènes. Mais ces résultats s’inscrivent dans un tableau plus général de psychose marqué par une rupture de contacts avec la réalité, bien que l’on observe souvent chez l’enfant des capacités préservées pour trouver les voies d’une adaptation, certes précaire, aux contraintes imposées par la vie collective.

Ces capacités préservées résultent d’une distinction entre le moi et le non moi rendu possible par des mécanismes impliquant le clivage, le déni, l’identification projective et l’omnipotence. De fait, l’enfant échoue la plupart du temps à élaborer une bonne distance relationnelle avec l’adulte et l'on retrouve souvent un collage excessif, plus rarement des refus intentionnels de communication, mais jamais des retraits de type enfermement tels que l’on peut les rencontrer dans l’autisme. Les troubles cognitifs sont toujours importants et entravent fortement les capacités d’apprentissages parce que l'enfant échoue également la plupart du temps à élaborer une bonne distance à l'égard de ses apprentissages scolaires. C’est ainsi que l’on note des risques majeurs d’évolution vers des organisations de type déficitaires si les enfants ne sont pas pris en charge dans le cadre d’un dispositif susceptible de prendre en compte le caractère multipolaire de leur pathologie et de proposer des contextes pédagogiques adaptés.

Dans ce contexte psychopathologique, c’est évidemment la dimension objectale qui est prioritairement impliquée. Cette dimension suit la ligne de différenciation/individuation, de séparation moi/non moi, et met en jeu la constitution même de l’objet interne séparé de l’objet objectivement perçu. Ce registre de la psychose confronte l’enfant à la rencontre avec un objet énigmatique, qui n’est pas malléable, qui ne se laisse pas affecter et qui n’accepte pas l’inscription. Cette question concerne les fondements même de l’activité de représentation et, en conséquence, l’intégrité structurelle des processus de pensée qui en découlent.

L’enfant psychotique éprouve donc les plus grandes difficultés à s’affranchir du travail de transformation inhérent à toute forme de symbolisation. Ce que Aulagnier51 P. (1984) évoque sous la forme de la rencontre du je avec le temps où il s’agit pour l’enfant de substituer à un temps définitivement perdu un discours qui le parle et le garde en mémoire.

Notes
51.

Aulagnier P. (1984), L'apprenti historien et le Maître sorcier. Du discours identifiant au discours délirant. Paris, PUF.