1.4.2.2. Le langage : instrument et produit du développement.

Le langage dépend lui-même de cette loi du passage de l’inter-psychique à l’intra-psychique. En effet, c’est bien parce que l’enfant est pris dès le début de sa vie dans un travail dialogique au cours des interactions avec son environnement humain, qu’il va pouvoir construire progressivement les significations verbales au sein d’un contexte d’abord intersubjectif où les significations données par l’enfant s’enroulent autour des significations apportées par l’adulte, constituant ainsi un univers intermédiaire à partir duquel s’effectue progressivement le processus d’appropriation de la langue maternelle.

La thèse que développe Vygotski L. est que la structure du psychisme est en son essence sociale. Que le développement cognitif est placé sous la double dépendance de l’expérience sociale de l’enfant et de ses relations avec des partenaires plus compétents. Il propose de définir la pensée non pas comme la résultante du développement de chaque fonction ; mémoire explicite, raisonnement, formation des concepts…, mais comme le lieu de l’actualisation des relations entre les fonctions lors des appropriations par l’enfant des outils de sa culture et de son groupe social. Dans cette perspective, Vygotski L. attribue au langage une place prépondérante parmi l’ensemble des instruments psychologique. Il lui assigne un rôle de structuration et de régulation de la pensée. Il s’intéresse à l’unité dialectique entre le mot et la pensée, il en explore les liens interne et dynamique au cours du développement ; de la pensée préverbale du bébé, en passant par la découverte par l’enfant de la fonction symbolique du langage, puis de son utilisation égocentrique comme un moyen d’accompagner l’activité, jusqu’au langage intérieur ou silencieux qui joue un rôle d’organisateur de base de la pensée humaine. Le langage est à la fois le médiateur et le régulateur de l’activité psychique, le vecteur par lequel l’enfant s’approprie les outils de sa culture et de son groupe social.

Les activités cognitives sont considérées comme des processus psychologiques élaborés au cours du développement grâce au langage qui structure les pensées et les actions par la formation des concepts. Dans cette perspective le processus développemental ne suit pas une ligne qui va de l'intérieur du sujet vers l'extérieur, mais au contraire de l'extérieur vers l'intérieur d'où l'importance fondamentale de l'environnement social. Au fond, l'enfant est surtout préparé à apprendre plus qu'à se développer ; le développement apparaît ici comme une résultante plutôt que comme un préalable. D'où l'intérêt d'évaluer nos dispositifs institutionnels à la lumière des contextes d'apprentissage qu'ils mettent à la disposition des enfants et des perspectives développementales qu'ils laissent entrevoir. Cet écart entre le niveau de développement actuel de l'enfant et le niveau de développement potentiel, rendu possible par le support institutionnel, introduit ici la notion de zone proximale de développement, chère à Vygotski L..