2.4.1.3. Les contenants de pensée symboliques complexes.

Avec l’apparition du langage et les accès aux combinaisons symboliques complexes, la pensée archaïque, régie selon les modes des représentations de choses, de transformations, d’affects, est progressivement métamorphosée sous l’égide des représentations de mots ou d’autres signes. Si le langage est au premier plan de ces contenants de pensée, ils ne se résument pas pour autant à cette seule forme d’organisation ; l’activité artistique, la logique, les mathématiques, constituent d’autres modalités de ces contenants symboliques même si leur mise en forme, leur intégration, passe très souvent par des modes liés à l’organisation verbale. Les contenants de pensée symboliques complexes :

‘"subsument les différents aspects de la pensée archaïque émanent des contenants fantasmatiques, narcissiques et cognitifs, et participent à la levée des clivages entre ces trois courants, en leur fournissant des représentations qui se substituent presque entièrement aux représentations analogiques initiales177." ’

Les anciens liens associatifs établis entre les représentations archaïques s’enrichissent des multiples possibilités de liaisons symboliques nouvelles, et l’enfant à partir de trois ans se voit doté d’un appareil à penser et à symboliser qui lui permettra de donner du sens à ses expériences, de communiquer avec lui même et avec les autres, d’étendre et de structurer ses apprentissages. En effet, si le système archaïque limite l’apprentissage à ce qui est directement vécu par l’enfant, les échanges verbaux permettront des échanges d’expérience à partir de la communication de l’expérience d’autrui. A partir de 3 ou 4 ans notre pensée ne nous apparaît plus guère que transformée à partir de ces contenants complexes, son expression archaïque reste pour une grande partie inconsciente.

Pour autant, si les contenants symboliques complexes se manifestent secondairement aux trois autres systèmes de représentation propres à la pensée archaïque, il paraît évident qu'ils commencent leur développement avant l'apparition du langage proprement dit. Les cris émis par le nourrisson constituent, par exemple, un des précurseurs essentiels puisqu'ils vont rapidement se construire comme un véritable système de communication entre le bébé et son entourage immédiat. Un peu plus tard, l'accès à la fonction symbolique, l'apparition de l'imitation différée, puis l'émergence des jeux symboliques, du dessin et surtout le développement du langage, constituent le fond sur lequel se développent les contenants symboliques complexes. A partir de six ou sept ans, la métamorphose que fait subir le langage à la pensée apporte des potentiels extraordinaires. A l'âge adulte, la pensée verbale tient une place dominante à côté d'autres formes d'expression comme la musique, le dessin, la peinture, les mathématiques, la pensée scientifique…etc.

A côté des contenants de pensée archaïque et des contenants symboliques complexes, Gibello B. (1995) complète la présentation de son modèle théorique en faisant appel à un troisième type de contenants qui met en forme les précédents : les contenants culturels et groupaux.

Notes
177.

Gibello B. (1995), La pensée décontenancée. Essai sur la pensée et ses perturbations, Paris, Bayard Editions, p.159