3.2.2. Le matériel

3.2.2.1. Le WISC III

L’évaluation du niveau de développement de l’intelligence est réalisée à partir du WISC III conçu pour les enfants âgés de 6 ans à 16 ans 11 mois. Nous allons développer ici la description de cet outil bien connu du psychologue clinicien puisque ces échelles reçoivent une validation quotidienne par l’utilisation clinique qui en est largement faite.

Ce test s’inscrit dans une conception classique des mesures des compétences intellectuelles de l’enfant. Il faut noter qu'il vient de bénéficier d'une quatrième édition (2006) qui introduit des changements profonds. Les QIv et QIp sont maintenant supprimés et remplacés par les seuls indices factoriels de telle manière que le test composite propose maintenant quatre indices qui sont respectivement : la compréhension verbale, le raisonnement perceptif, la mémoire de travail et la vitesse de traitement.

Cette restructuration globale du test n'est pas sans conséquence pour le clinicien. Si nous ne notons pas de changement radical en ce qui concerne la compréhension verbale, qui correspond au traditionnel QIv (à un subtest près), par contre des changements importants ont été apportés à l'échelle d'organisation perceptive par le remplacement de plusieurs épreuves et la moindre influence accordée à la vitesse de réalisation. Ces changements justifient que l'on ne parle plus maintenant d'un indice d'organisation perceptive mais bien d'un indice de raisonnement perceptif. Nous notons d'ailleurs ici que les échelles de Wechsler ont subi, dans leur évolution, l'influence des modèles de Carroll et de Cattell-Horn qui ont été évoqués dans la deuxième partie à propos de l'évaluation diagnostique des troubles cognitifs. En effet, les quatre indices proposés dans le WISC IV correspondent maintenant aux quatre principaux facteurs de groupe que l'on retrouve régulièrement dans le cadre des modèles hiérarchiques de l'intelligence. Notons pour finir, que malgré ces changements, le WISC IV conserve la possibilité de calculer un indice d'intelligence globale qui continue de s'appeler QI.

Le travail que nous présentons ici a été réalisé à partir du WISC III puisqu'au moment de la mise en oeuvre du protocole de recherche le WISC IV n'était pas encore commercialisé. Le WISC III a bénéficié dans sa forme française d'un étalonnage en 1996, ainsi que de nombreux changements de matériel et de procédures d’administration par rapport à la version précédente (WISC R). A la différence du WISC IV, il s'inscrit toujours dans une conception classique en distinguant une échelle de performances verbales et une échelle de performances visuo-spatiales. Nous souhaitions d'ailleurs garder cette dichotomie qui reste cliniquement riche puisqu'elle permet une analyse qualitative des différents QI obtenus pour cerner les aptitudes et les déficits de l'enfant.

En fait, le WISC III nous apparaît, après coup, particulièrement adapté aux objectifs descriptifs et à l’analyse comparative portée par cette recherche. L'utilisation du WISC IV n'aurait ici, semble-t-il, apporté aucun bénéfice supplémentaire aux résultats que nous avons obtenus. Des articles de publications récentes en France, dans le domaine de la psychologie clinique, convergent majoritairement vers le constat que les sacrifices accordés dans la nouvelle version de la batterie au bénéfice de l'analyse factorielle, contribuent lourdement à un appauvrissement des qualités cliniques du test. Certains auteurs n'hésitent d'ailleurs pas à en déconseiller l'utilisation dans le cadre d'enfants présentant des troubles de la personnalité et du comportement, où les choix méthodologiques des concepteurs, en mettant en avant les épreuves inspirées des sciences du traitement de l'information et en retirant de la batterie les épreuves les plus "clinique", semblent pénaliser considérablement les performances de ces enfants.

L'argument concernant la proposition de nouveaux subtests dans le cadre de la dernière édition de la batterie (donc susceptibles de faire apparaître de nouvelles données cliniques) mérite donc d'être discuté. Il est important de rappeler ici une observation déterminante pour l’esprit de cette recherche : avec le WISC, son auteur a réintroduit la notion d’intelligence aptitude, gardant pour la définir une démarche empirique, pragmatique, ayant certes une valeur clinique mais ne reposant sur aucun arrière plan théorique. De fait, il ne fait pas intervenir de données psychométriques pour justifier le choix des épreuves qui composent son échelle, il demande essentiellement à son test de mesurer des "domaines suffisants de l’intelligence pour permettre d’utiliser ses résultats comme indication à peu prés fidèle de la capacité globale d’un individu 228 ." (Wechsler D., 1956). Rappelons ici les trois arguments qu’il utilise comme critère de choix d'une épreuve : l’expérience clinique doit avoir prouvé que c’était une bonne épreuve ; historiquement elle a déjà été utilisée ; enfin, elle est censée comporter un facteur de groupe ou le facteur général. Il est clair que l’argument clinique apparaît comme le plus fort au détriment d’un ancrage dans une véritable théorie du développement de l’enfant qui justifierait l'utilisation de subtests spécifiques au détriment d'autres, considérés comme moins pertinents. A ce stade, ajouter à l'infini des subtests n'apporte rien de plus quant à l'appréhension de la capacité globale d'un individu.

Dans le même registre, le fait que le WISC IV propose un étalonnage plus récent ne représente pas non plus un intérêt particulier lorsqu'il s'agit de comparer les performances des enfants recueillies à partir d'un même outil, à l'intérieur d'un même groupe clinique.

Nous allons maintenant présenter rapidement et successivement chacun des subtests du WISC III qui composent le protocole de recherche.

Notes
228.

Wechsler D. (1956), La mesure de l'intelligence, Paris, PUF, p. 61