1. De la haine…

Étant donné que l’Autre inclut à la fois l’idéal du moi et le surmoi, il est fondamentalement ambivalent. Michel Poizat met l’accent sur cette ambivalence lorsqu’il écrit :

‘Mais le paradoxe, c’est que l’Autre est aussi, comme on l’a vu, le lieu-source du langage qui en tant que tel non seulement est soumis à la castration symbolique, mais va introniser le sujet dans l’ordre symbolique, va l’élever au statut d’animal parlant, de “parlêtre” pour reprendre le néologisme lacanien. Il nous faut donc postuler deux figures de l’Autre, l’une, du premier type, lieu de jouissance mortifère, lieu de la voix comme telle, la seconde du deuxième type, lieu de la parole, instance structurante et civilisatrice, pour le sujet comme pour le social. La tension entre verbe et voix, que nous n’avons cessé de relever, recouvre la tension entre ces deux figures de l’Autre. (Poizat, 2001 : 140)’

Il apparaît clairement que la figure de l’Autre qui fascine ressortit, non pas à l’ordre symbolique qui fonde la parole, mais au registre du réel duquel relève la voix, au sens lacanien du terme. Ainsi, la voix qui fascine vient de l’Autre pour autant que ce dernier se donne pour absolu ou, en d’autres termes, dans la mesure où il nie l’existence de son autre face, à savoir celle qui a trait au symbolique et qui rappelle au sujet qu’il est « coupé irrémédiablement d’une jouissance première mythique et absolue du seul fait qu’il est pris par l’Autre dans une relation de langage » (Poizat, 2001 : 133). Or, cet Autre absolu reste, à l’instar du père originel dont parle Michel Poizat et qui constitue l’un de ses avatars, « une instance de jouissance et de toute-puissance absolue, primitivement haïe » (Poizat, 2001 : 121). C’est précisément cette haine primordiale qui caractérise la fascination qu’exerce la voix de saint Jean-Baptiste sur Hérodias.

Ce qui est frappant à propos de la relation entre ces deux personnages, c’est, d’une part, le fait que le mot « fascination » est utilisé par Flaubert pour décrire l’attraction de saint Jean-Baptiste sur Hérodias et, d’autre part, le fait que l’écrivain normand insiste sur le pouvoir de fascination qu’exerce, non pas le personnage de saint Jean Baptiste, mais seulement sa voix :

‘Ce fut d’abord un grand soupir, poussé d’une voix caverneuse. ’ ‘Hérodias l’entendit à l’autre bout du palais. Vaincue par une fascination, elle traversa la foule ; et elle écoutait, une main sur l’épaule de Mannaëi, le corps incliné.’ ‘La voix s’éleva :’ ‘— « Malheur à vous, Pharisiens et Sadduccéens, race de vipères, outres gonflées, cymbales retentissantes ! » (171)’

Pour mieux comprendre cette fascination, il est important de noter que, à l’image d’Hérodias, le peuple est fasciné par la voix de saint Jean-Baptiste :

‘Le peuple revoyait les jours de son exil, toutes les catastrophes de son histoire. C’étaient les paroles des anciens prophètes. Iaokanann [le même que les Latins appellent saint Jean-Baptiste] les envoyait comme de grands coups, l’une après l’autre. (173)’

Le fait que « les paroles » de saint Jean-Baptiste suscitent une vision collective (« le peuple revoyait ») pourrait orienter notre attention vers une figure de rhétorique, à savoir l’hypotypose, qui consiste précisément à « décrire un spectacle ou un évènement de façon si vivante que l’auditoire croit l’avoir sous les yeux » (Reboul, 1991 : 239).

Pourtant, les paroles de saint Jean-Baptiste, qui sont essentiellement composées de malédictions, ne s’apparentent pas aux « notations particulièrement sensibles et fortes »340 qui constituent l’hypotypose.

La fascination ne résulte donc pas des paroles proférées par saint Jean-Baptiste, mais de l’effet que produit sa voix sur ses auditeurs. C’est pour cette raison que la fascination qu’exerce saint Jean-Baptiste sur Hérodias commence, non pas lorsqu’il articule un mot, mais quand il pousse « un grand soupir » (171).

L’effet que produit la voix de saint Jean-Baptiste sur Hérodias peut donc être qualifié de performatif, comme le souligne Philippe Dufour lorsqu’il écrit : « Voix qui ne supporte aucun message articulé, et pourtant fonctionne comme un signal, convoque Hérodias. Le soupir prend une valeur performative : il ouvre le discours tout comme lorsqu’un président dit : "La séance est ouverte”341. » Or, la performativité de la voix de saint Jean-Baptiste est liée à la place qu’occupe ce dernier pour son auditoire et Juliette Frølich a raison de mettre l’accent sur le fait que cette voix prend une valeur performative pour autant que « ceux à qui il s’adresse y reconnaissaient une parole censée faire surgir à l’existence ce qu’elle énonce »342, c’est-à-dire dans la mesure où il joue le rôle de l’Autre pour ses auditeurs.

En fait, ce qui sous-tend la performativité de la voix de saint Jean-Baptiste, c’est la logique de l’inversion fétichiste (« the logic of “fetishistic inversion” »343) dont parle Slavoj Žižek dans Looking Awry :

‘The subjects think they treat a certain person as a king because he is already in himself a king, while in reality this person is king only insofar as the subjects treat him as one. The basic reversal of Pascal and Marx lies, of course, in their defining the king’s charisma not as an immediate property of the person-king but as a “reflexive determination” of the comportment of his subjects, or — to use the terms of speech act theory — a performative effect of their symbolic ritual. But the crucial point is that it is a positive, necessary condition for this performative effect to take place that the king’s charisma be experienced precisely as an immediate property of the person-king. The moment the subject takes cognizance of the fact that the king’s charisma is a performative effect, the effect itself is aborted. In other words, if we attempt to “substract” the fetishistic inversion and witness the performative effect directly, the performative power will be dissipated. (Žižek, 1992: 33)’

Même si cette inversion fétichiste semble dissimuler, à première vue, le lien entre la valeur performative de la voix du prophète et le fait que ce dernier occupe la place de l’Autre pour son auditoire, il suffit de s’intéresser à certains détails pour se rendre compte que ce lien est patent.

Portons notre attention sur la phrase suivante : « Mais la voix se fit douce, harmonieuse, chantante. Il annonçait un affranchissement, des splendeurs au ciel » (173). Philippe Dufour met au jour l’existence d’une séparation (qui évoque les schizes, chères à Lacan) entre le corps du prophète et sa voix lorsqu’il écrit, à propos de la phrase précédente tirée d’« Hérodias » : « la narration distinguant dans sa propre rhétorique l’élocution du corps et les énoncés de Iaokanann [le même que les Latins appellent saint Jean-Baptiste], oppose la synecdoque la voix au il de la phrase suivante : le trope constitue Iaokanann en prophète, à travers qui Dieu parle ; il magnifie une énonciation toute puissante : “la voix se fit”, sorte de discours autonome, dicté à Iaokanann344. » Cette passivité du corps du prophète, qui se fait caisse de résonance pour la voix de l’Autre, n’est pas sans rappeler la passivité du sujet dans la relation de langage qui l’unit à l’Autre : « the big Other pulls the strings, the subjet doesn’t speak, he “is spoken” by the symbolic structure »345.

Il est vrai néanmoins qu’il existe une différence notable entre l’Autre symbolique et l’Autre imaginaire. L’Autre dont parle Žižek dans la citation précédente « est soumis à la castration symbolique » (Poizat, 2001 : 140) tandis que l’Autre imaginaire ne l’est pas, comme le souligne Žižek lorsque, dans The Fright of Real Tears, ce dernier parle du « non-castrated Other, of the Other not bound by the symbolic law »346.

Le sacrifice pourvoit à l’existence de cet Autre absolu. « Sacrifice is a guarantee that “the Other exists” » (Žižek, 2001a : 56) écrit Žižek dans Enjoy Your Symptom. Faire un sacrifice, c’est attribuer un désir et, partant, une existence à l’Autre imaginaire. Or, le pouvoir de fascination de l’Autre absolu résulte précisément du fait que, en le faisant exister, on remet en question la castration symbolique. Ainsi, la voix de la Diva est fascinante pour autant que, en se faisant objet-voix, c’est-à-dire objet sacrifié, elle postule que l’Autre imaginaire a un désir et donc une existence dans le champ de la pulsion invocante. Dans Vox populi, vox Dei, Michel Poizat met l’accent sur ce point :

‘Le phénomène de la Diva, de “l’idole”, s’inscrit totalement dans ce schéma : un être se met en scène, tendant à présentifier au plus près la voix, tendant à, pour ainsi dire, se faire voix, objet offert, voire sacrifié à la jouissance de l’auditeur, objet dès lors idéalisé, magnifié, divinisé. Il tend ainsi à présentifier l’Autre absolu, tout de complétude, identifié à la voix, cette voix que l’auditeur sait qu’il l’a à jamais perdue, mais qu’il va tenter malgré tout de se réapproprier en l’incorporant dans l’écoute. (Poizat, 2001 : 133)’

La diva est, au sens étymologique, une « déesse » (Rey, 1998, I : 1108), à savoir une figure du parangon de l’Autre : l’être divin. Or, de même que la diva fait entendre la voix d’une divinité féminine, de même saint Jean-Baptiste est un prophète, c’est-à-dire « un homme inspiré par Dieu » (Rey, 1998, III : 2973), il fait donc entendre la voix d’une divinité masculine. Ces divinités respectives ont néanmoins un point commun dans la mesure où, à l’instar du père primitif et de la mère archaïque, elles occupent toutes les deux la place de l’Autre absolu.

Pour mieux comprendre, d’une part, la fascination qu’exerce la voix de saint Jean-Baptiste sur Hérodias et, d’autre part, la haine que cette dernière éprouve pour le prophète, il est nécessaire de faire un détour par Freud. Dans un article qui s’intitule « La tête de Méduse », ce dernier écrit :

‘La vue de la tête de Méduse rend rigide d’effroi, change le spectateur en pierre. Même origine tirée du complexe de castration et même changement d’affect. Car devenir rigide signifie érection, donc, dans la situation originelle, consolation apportée au spectateur. Il a encore un pénis, il s’en assure en devenant lui-même rigide347.’

Ces observations de Freud sont d’autant plus judicieuses qu’elles contiennent en germe la théorisation de Lacan sur les objets partiels. Or, la voix est précisément un de ces objets. À l’instar du regard dont parle Freud dans son article, la voix n’est pas sans lien avec la dimension sexuelle que l’inventeur de la psychanalyse met au jour.

Dans On est prié de fermer les yeux, Max Milner souligne le lien entre la pulsion scopique et le sexuel :

‘La vision de la tête de Méduse nous paraît être l’exemple par excellence de ce « voir sexuel », constitué, comme le montre l’analyse des voyeurs, de deux courants, l’un libidinal et ayant pour fin la jouissance, l’autre agressif ou destructeur, qui peut se retourner sur le sujet et lui renvoyer son intentionnalité mortifère348.’

N’existe-t-il pas un équivalent de ce « voir sexuel » dans le champ de la pulsion invocante ? En d’autres termes, l’audition de la voix de saint Jean-Baptiste par Hérodias ne peut-elle être assimilée à ce que l’on pourrait appeler un « entendre sexuel » ? La fascination s’expliquerait donc par la mise en œuvre de ce phénomène. D’ailleurs, le lien entre la fascination et le sexuel, qui sous-tend cet « entendre sexuel », n’est pas sans évoquer une remarque de Pascal Quignard sur l’étymologie du mot fascination : « Le mot phallus n’existe pas. Les Romains appelaient fascinus ce que les Grecs appelaient phallos 349 »

Ce phénomène permet, certes, de rendre raison de la fascination qu’exerce la voix de saint Jean-Baptiste sur Hérodias, mais il permet également de rendre compte de la réaction de cette dernière lorsque Mannaëi, le bourreau, revient une première fois sans avoir exécuté saint Jean-Baptiste : « La fureur d’Hérodias dégorgea en un torrent d’injures populacières et sanglantes. Elle se cassa les ongles au grillage de la tribune, et les deux lions sculptés semblaient mordre ses épaules et rugir comme elle. » (204) Cette fureur d’Hérodias s’explique donc par le fait que, parmi les deux courants qui constituent l’ « entendre sexuel », c’est le courant « agressif » (M. Milner, 1991 : 27) qui a prévalu.

Au vrai, la clé de la fureur d’Hérodias réside également dans le fait que, à l’instar des éléments (le vocable fureur peut s’utiliser « en parlant des éléments », mais « seule l’idée de violence est retenue (la fureur de la tempête “l’extrême violence”) », Rey, 1998, II : 1532), la voix de saint Jean-Baptiste devient furieuse : « La voix grossissait, se développait, roulait avec des déchirements de tonnerre, et, l’écho dans la montagne la répétant, elle foudroyait Machærous d’éclats multipliés. » (176) Ce qui frappe le plus à la lecture de ces lignes, c’est le fait que la foudre soit associée à la voix. En effet, étant donné que le mot foudre est issu du vocable latin « fulgur “éclair”, de fulgere “briller” » (Rey, 1998, II : 1468), il est, à l’image du mot fascination, habituellement associé au regard. D’ailleurs, il suffit de s’intéresser aux emplois des adjectifs foudroyant et fulgurant, qui sont dérivés de la même racine latine, pour se rendre compte qu’ils qualifient des regards et non pas des voix.

En fait, même si la foudre est, comme le rappelle Pierre Vidal-Naquet, l’ « arme de Zeus »350, elle est également l’arme du Dieu de l’Ancien testament : « Des cieux tonne Iavhé et le Très-Haut fait entendre sa voix, il lance des flèches et disperse les ennemis, un éclair, et il les met en déroute351. » Ainsi, pour mieux comprendre le lien entre la voix de saint Jean-Baptiste et la foudre, il est nécessaire de porter notre attention sur le Dieu de vengeance de l’Ancien Testament qui s’oppose, à maints égards, au Dieu d’amour dont parle Jésus Christ dans le Nouveau. En effet, le Dieu de l’Ancien Testament n’est pas sans rappeler celui auquel Theodor Reik fait référence dans son livre sur les rites religieux. Dans le Séminaire X, Lacan reprend les analyses de Reik et ajoute :

‘À suivre ce que l’on ose espérer n’être que métaphore dans la bouche de Reik, c’est son beuglement de taureau assommé qui se fait entendre encore dans le son du schofar. Disons plus simplement que c’est le fait originel inscrit dans le mythe du meurtre du père qui donne le départ de ce dont nous avons dès lors à saisir la fonction dans l’économie du désir, à savoir que l’on interdit, comme impossible à transgresser, ce que constitue, dans sa forme la plus fondamentale, le désir originel. Il est pourtant secondaire par rapport à une dimension que nous avons à aborder ici, le rapport à cet objet essentiel qui fait fonction de a, la voix, et ce que sa fonction apporte de dimensions nouvelles dans le rapport du désir à l’angoisse. (Lacan, 2004 : 295)’

À propos d’une phrase d’ « Hérodias » (dans la première partie du récit, Hérodias dépeint le prophète en ces termes : «  “Il avait une peau de chameau autour des reins, et sa tête ressemblait à celle d’un lion” », 150), Jean Bellemin-Noël écrit : « Crinière léonine et peau de bête sur les reins reconnaissons que l’homme [saint Jean-Baptiste] a bien des points communs avec le fauve qui incarne le Père Imaginaire » (Bellemin-Noël, 1993 : 113). Ainsi, il ne semble pas étonnant que, dans le champ de la pulsion invocante, le beuglement du taureau dont parle Lacan dans le Séminaire X soit remplacé dans le récit flaubertien par un rugissement (Hérodias poursuit sa description et met l’accent sur le fait que « sa voix rugissait », 150).

Certes, dans Le quatrième conte de Gustave Flaubert, Jean Bellemin-Noël ne tient pas compte de l’apport théorique lacanien dans le domaine des objets partiels que sont le regard et la voix, néanmoins il est patent que, si le père imaginaire est, comme le souligne Bellemin-Noël, fréquemment représenté sous les traits d’un animal, sa voix s’apparente souvent aux sons vocaux que les animaux émettent, que ce soient le beuglement du taureau, le rugissement du lion ou encore l’aboiement du chien (dans Vox populi, vox Dei, Michel Poizat parle de la raucité des “aboiements” d’Hitler », Poizat, 2001 : 167). Or, il peut sembler paradoxal que ces sons soient fascinants, c’est-à-dire qu’ils aient, sur les spectateurs, un effet identique à ceux émis par une Diva. D’où il suit que la question suivante posée par ¨Michel Poizat est tout à fait pertinente : « Alors, Hitler, une Diva ? La question peut sembler incongrue, voire insultante pour celles dont l’art est si élevé qu’on les déclare “divines”. » (Poizat, 2001 : 167)

En fait, le père imaginaire et la Diva ont un point commun : ils sont des figures de l’Autre absolu. Ainsi, leurs voix fascinent parce qu’elles postulent la vérité d’un mythe (celui de la « jouissance première » dont parle Michel Poizat, Poizat, 2001 : 133), à savoir la vérité de ce qui relève, par définition, du « récit fabuleux », de l’ « histoire inventée » (Rey, 1998, II : 2333).

De même que la Diva se fait objet-voix, de même, dans « Hérodias », saint Jean-Baptiste se fait, dans le champ de la pulsion invocante, objet sacrifié, dans la mesure où le sacrifice accorde un désir et, partant, une existence à l’Autre absolu. La voix du prophète n’induit donc son pouvoir de fascination que « d’être le support de quelque chose d’autre » (Poizat, 1998 : 34), c’est-à-dire le « reste d’une jouissance absolue »(Poizat, 2001 : 148). Or, ce reste constitue un « rappel inconscient d’un meurtre fondateur, le meurtre d’un père primitif, interdicteur, féroce, figure d’une jouissance absolue mais pacifié et idéalisé dans l’après-coup » (Poizat, 2001 : 119). Cette antinomie entre le père primitif et le père idéalisé équivaut, dans le domaine de la pulsion invocante, à l’opposition entre « “la voix de l’idéal”, support de la loi du verbe pacifiante et structurante, et “la voix de jouissance” actionnant les ressorts pulsionnels mis en place lors de la relation archaïque de l’infans à l’Autre » (Poizat, 2001 : 144).

Même si la voix au sens lacanien du terme est composée de ces deux versants, il appert que, si l’on porte notre attention sur celle de saint Jean-Baptiste dans « Hérodias », on se rend compte que c’est le versant archaïque qui prévaut. Le prophète est une figure du père primitif (Freud) ou du père imaginaire (Lacan) aux yeux d’Hérodias. En effet, la haine qu’éprouve cette dernière à son égard met au jour le fait que saint Jean-Baptiste n’est pas idéalisé par cette dernière et, partant, confirme notre assertion. Ainsi, la voix du prophète fascine Hérodias parce qu’elle a trait, non pas à l’idéal, mais à la jouissance première.

En fait, l’opposition entre la voix de l’idéal et la voix de jouissance est dialectique puisque, lorsque la Diva se fait objet-voix, la voix de la cantatrice n’est pas sans lien avec la jouissance. Toutefois, la figure de la Diva étant idéalisée, il y a une tension perpétuelle entre les deux versants de la voix lorsqu’elle chante, le versant primitif qui relève de la haine et le versant idéalisé qui ressortit… à l’amour.

Notes
340.

Georges Molinié, Dictionnaire de rhétorique, (Paris, Librairie Générale française, 1992), p. 167.

341.

Philippe Dufour, « Entendre des voix », Gustave Flaubert 3, (Paris, Minard, 1988), p. 107.

342.

Juliette Frølich, « La Voix de saint Jean. Magie d’un discours », Gustave Flaubert 3, (Paris, Minard, 1988), p. 88.

343.

Slavoj Žižek, Looking Awry, (Cambridge, Mass., The MIT press, 1992), p. 33.Les références à cet ouvrage seront désormais indiquées sous la forme suivante : (Žižek, 1992: 216).

344.

Philippe Dufour, « Entendre des voix » in Gustave Flaubert 3, Paris, Minard, 1988, p. 107. Les italiques sont de l’auteur.

345.

Slavoj Žižek, Enjoy Your Symptom!, (Londres, Routledge, 2001), p. 216. Les références à cet ouvrage seront désormais indiquées sous la forme suivante : (Žižek, 2001a : 216).

346.

Id.,The Fright of Real Tears, (Londres, British Film Institute Publishing, 2001), p. 91.

347.

Sigmund Freud, « La tête de Méduse » (1922), De l’art et de la psychanalyse, (Paris, Éditions de l’École nationale supérieure des beaux-arts, 1999), p. 176.

348.

Max Milner, On est prié de fermer les yeux, (Paris, Gallimard, 1991), p. 27. Les références à cet ouvrage seront désormais indiquées sous la forme suivante : (M. Milner, 1991 : 27).

349.

Pascal Quignard, Le sexe et l’effroi, (Paris, Gallimard, 1996), quatrième de couverture.

350.

Pierre Vidal-Naquet, « Les boucliers des héros », Mythe et tragédie en Grèce ancienne, (Paris, La Découverte, 2001), II, p. 136.

351.

On peut lire ce passage dans le Deuxième livre de Samuel, (2Sa 22 : 14-15), « Ancien testament », La Bible, (Paris, Gallimard, 1956), I, p. 1009. Une variante de ce passage se trouve dans Les Psaumes, livre premier : « Dans les cieux tonna Iahvé et le Très-Haut fit entendre sa voix, il lança ses flèches et dispersa les ennemis, il jeta des éclairs et les mit en déroute » (Ps 18 : 14-15), « Ancien testament », La Bible, (Paris, Gallimard, 1959), II, p. 922.