1.1.5. Cohérence/cohésion : conclusion

Cette partie a deux buts principaux. Premièrement, clarifier les définitions des notions de cohésion et cohérence. Une question émane des études concernant ces notions : quel lien entretiennent la cohésion et la cohérence ? Plusieurs réponses ont été données. Une première perspective considère que la cohérence et la cohésion fonctionneraient en interdépendance de manière parallèle. Une seconde envisage que la cohérence déterminerait la cohésion. Une troisième option peut être proposée selon laquelle ces deux concepts seraient sans cesse en interaction (Berman et Slobin, 1994 ; Hickmann, 2003, 2004). La cohérence influence la cohésion comme cette dernière influence la cohérence. Des textes sans outils cohésifs peuvent être compréhensibles comme des textes en contenant à outrance peuvent être incompréhensibles (Charolles et Ehrlich, 1991 ; Salles, 2006). L’utilisation d’outils cohésifs est nécessaire à l’interprétabilité des textes et à la construction de la cohérence. Néanmoins, la cohésion ne constitue pas le seul facteur de textualité (Halliday et Hasan, 1976/1989 ; Salles, 2006). L’exemple qui suit (Charolles, 1978 et repris par Salles, 2006) est un texte très cohésif mais incohérent de par le non respect d’une des règles de cohérence, celle de progression.

(13) Le forgeron est vêtu d’un pantalon noir et d’un chapeau clair et d’une veste grise et marron foncé. Il tient à la main le piquet de la pioche et il tape dessus avec un marteau sur le piquet de la pioche . Les gestes qu’il a faits : il a le piquet de la pioche et avec son marteau il tape sur le piquet de la pioche . Le bout de cet outil qui s’appelle le piquet de la pioche est pointu et l’autre bout est carré. Pour le faire devenir rouge avec le piquet de la pioche , il l’a mis dans le feu et les mains sont rouges.

En effet, dans cet exemple, notons « la flagrante circularité du propos » (Charolles, 1978:21). Ce texte est cohérent, si nous nous en tenons à la méta-règle de répétition mais la progression sémantique est limitée.

Faire un bon usage de ces outils cohésifs tout en respectant les règles de cohérence est un bon compromis ; ceci souligne « l’étroite solidarité entre la cohésion et la cohérence et c’est sûrement, aussi, laisser entrevoir le rôle primordial de la cohérence – et, plus précisément, des relations de cohérence – pour la cohésion, pour le choix des expressions référentielles et pour leur interprétation » (Salles, 2006:communication en ligne).

Deuxièmement, il est utile de souligner l’importance de la gestion des statuts informationnels dans la capacité de produire un texte cohérent. Introduire, maintenir et distinguer les différents statuts référentiels des éléments d’un énoncé est primordial (Clark et Haviland, 1974, 1977 ; Favart, 2005 ; Hickmann, 2000, 2004 ; Khorounjaia et Tolchinsky, 2004 ; Schneuwly, 1988). Les locuteurs/scripteurs doivent également réaliser que le destinataire de la production a certainement des représentations mentales différentes de celles de l’auteur. La prise en considération de ce paramètre lors de l’émission du message se voit à travers la gestion du statut informationnel des référents (Section 1.2, p. 32) et la manipulation du syntagme nominal (SN) comme marque de cohésion (Section 1.3, p. 40), aspects centraux de ce travail de thèse. La Section 1.2 qui suit se penche alors sur le statut informationnel.