1.3.5. Le syntagme nominal : rétrospection en développement

La manipulation des SNL semble être une des compétences requises permettant aux locuteurs/scripteurs d’être « linguistically literate » (Ravid et Tolchinsky, 2000:1 ; Ravid et Tolchinsky, 2002:420) ou « proficient speakers » (Berman, 2008:2). Un répertoire conséquent de ces formes lexicales ainsi que son utilisation pertinente – à savoir, (a) la variation des lexèmes, (b) leur adaptation aux contextes de production, (c) leur emploi dans un syntagme plus ou moins complexe syntaxiquement, et (c) leur présence en position sujet – permettent aux individus d’atteindre une certaine maturité langagière. Ainsi, ils accèdent à la langue de scolarisation, but visé par l’enseignement.

Dans des travaux antérieurs, il est montré que la proportion des SN varie selon l’âge et le contexte de production. Ainsi, la production de SN augmente avec l’âge mais la proportion des SN, d’une façon générale, est plus importante dans les textes narratifs que dans les textes expositifs (Ravid, 2000).

Lorsque la nature des SN est observée plus attentivement, les analyses révèlent des résultats différents selon le type de SN. Les textes, avec l’âge, contiennent de plus en plus de lexique et de moins en moins de pronoms (Jisa et Mazur, 2005 ; Mazur, 2005 ; Ravid, 2000, 2004, 2006 ; Ravid et al., 2002 ; Strömqvist et al., 2002 ). Les enfants font de plus en plus preuve de flexibilité linguistique : leur panel de formes lexicales se développe considérablement et ils adaptent ces formes à la situation de production. De plus, les SN pronominaux ont une proportion plus importante dans les textes narratifs que dans les textes expositifs ; la situation s’inverse pour la proportion des SNL (Jisa et Mazur, 2005 ; Mazur, 2005 ; Ravid, 2000 ; Ravid et al., 2002 ; Strömqvist et al., 2002 ).

D’autres travaux nuancent ces résultats en intégrant la position syntaxique des SN (Jisa et Mazur, 2005 ; Mazur, 2005 ; Ravid, 2000 ; Ravid et al., 2002 ; Strömqvist et al., 2002 ). Ainsi, la production d’items lexicaux en position sujet fait partie des éléments qui se développent et qui s’acquièrent tardivement. En effet, les adultes utilisent plus de formes lexicales en position sujet que les enfants (entre autres, Argerich et Tolchinsky, 2000 ; Berman et Verhoeven, 2002 ; Jisa et Mazur, 2005 ; Mazur, 2005 ; Ravid, 2000, 2002, 2005 ; Ravid et al., 2002 ; Strömqvist et al., 2002 ). Les enfants forment de plus en plus de SNL, notamment en position sujet, et diversifient leur répertoire avec l’âge (Berman et Verhoeven, 2002 ; Jisa et Mazur, 2005 ; Mazur, 2005 ; Ravid, 2000 ; Ravid et al., 2002 ; Strömqvist et al., 2002 ). De plus, les SNL en position sujet sont plus importants dans les productions expositives que les productions narratives et sont plus fréquents dans les textes écrits que dans les textes oraux (Jisa et Mazur, 2005 ; Mazur, 2005 ; Ravid, 2000 ; Ravid et al., 2002 ).

Enfin, avec l’âge, les individus produisent des SNL de plus en plus complexes (Jisa et Mazur, 2005 ; Mazur, 2005 ; Ravid, 2000 ; Ravid et Berman, sous presse ; Ravid et al., 2002 ). En effet, les SNL des populations les plus âgées contiennent plus de items lexicaux et plus de modifieurs que ceux des populations les plus jeunes. Ce type de SNL caractérise également davantage les textes expositif et écrits (Jisa et Mazur, 2005 ; Mazur, 2005 ; Ravid, 2000 ; Ravid et Berman, sous presse ; Ravid et al., 2002).