2.3.2.2. Encodage grammatical

La parole fluide repose sur l’interaction d’une multitude de composants dont la connaissance, pour le moment, est limitée (Levelt, 1995). Bock et Levelt (1994) proposent une étude plus approfondie de l’encodage grammatical du formulateur (Figure 8). Ce composant est davantage décrit dans la mesure où notre étude se concentre, entre autres, sur les choix syntaxiques en lien direct avec l’encodage grammatical.

Figure 8 : L’encodage grammatical de la production langagière (Bock et Levelt, 1994:946)

Le module de l’encodage grammatical est constitué de quatre niveaux principaux : le niveau du message, le niveau fonctionnel, le niveau positionnel et le niveau phonologique. Le niveau du message concerne l’élaboration conceptuelle du message.

Le niveau fonctionnel, pris en charge par le processeur sémantique (Leuwers, 2002),permet l’attribution d’une fonction syntaxique telle que sujet ou objet direct aux items lexicaux récupérés dans le lexique mental. Cette tâche implique l’identification des concepts lexicaux en adéquation avec le message que le locuteur souhaite transmettre. L’attribution des rôles syntaxiques se ferait selon le caractère plus ou moins accessible d’un élément : plus un référent est accessible, plus cet élément se verra attribuer une fonction syntaxique dite de haut niveau ; le sujet est hiérarchiquement plus haut que l’objet direct, qui est plus haut que l’objet indirect, etc. (Bock et Warren, 1985 ; Bock et Levelt, 1994 ; Keenan et Comrie, 1977 ; Leuwers, 2002 ; Levelt, 1999). Les entités les plus accessibles seraient des référents animés plutôt que non animés, concrets plutôt qu’abstraits et enfin représentant une ancienne information plutôt qu’une nouvelle. L’ancienne information serait alors plus en position sujet qu’en position non sujet (Bock et Warren, 1985). Enfin, le lien entre l’accessibilité conceptuelle et l’attribution fonctionnelle se ferait également « par l’intermédiaire des rôles évènementiels » (Leuwers, 2002:114). Ainsi, les agents seraient plus en position sujet que les patients.

Ces informations sont, au niveau positionnel qui est pris en charge par le processeur syntaxique (Leuwers, 2002), soumises à un assemblage puis à un marquage flexionnel. Les éléments se voient fixer un ordre spécifique dans la clause et la morphologie appropriée leur est assignée. Si la position syntaxique est en lien étroit avec l’accessibilité des mots, il n’en est rien pour l’ordre des mots, qui ne dépend pas du caractère plus ou moins activé d’un élément (Bock et Warren, 1985). Un élément activé (soit une ancienne information) est un référent accessible qui se trouve préférentiellement en position sujet, soit en début de phrase. En français comme en anglais, ceci est lié au fait que le sujet est placé au début d’une phrase.

Enfin, le dernier niveau de l’encodage grammatical est le niveau phonologique qui permet la concrétisation sonore du message.

Les éléments pragmatiques et sémantiques influencent les positions syntaxiques des unités langagières. Cette hypothèse est en lien direct avec notre orientation et une partie de nos résultats tente d’observer le rapport position syntaxique/aspects pragmatiques et formes linguistiques. Nous voulons vérifier que le statut informationnel d’un référent influence la position syntaxique et le choix de l’unité linguistique utilisée.