Chapitre 3
Problématique et questions de recherche

3.1. Problématique générale

La production langagière implique quatre niveaux : le niveau cognitif, lexico-grammatical, lexico-phonologique et le niveau articulatoire ou grapho-moteur (Coirier et al., 1996). Cette étude souhaite contribuer à la compréhension du niveau cognitif ainsi que celui lexico-grammatical de la production textuelle. Les langues offrent une multitude de combinaisons possibles pour encoder un même message ; ce qui est intéressant est de savoir quels sont les critères poussant les locuteurs à choisir une forme plutôt qu’une autre. Le modèle de Levelt (1989) ou encore la conception de la litéracie linguistique de Ravid et Tolchinsky (2000, 2002) suggèrent l’importance de la prise en considération du contexte de production et de la pragmatique. L’individu, selon le contexte et son intention communicative, mobilise des connaissances spécifiques. Ainsi, par exemple en production narrative, il sollicite des connaissances relatives à ce type de texte. Puis, tout en prenant en considération la situation discursive, il introduit et maintient des référents. Pour organiser les contenus activés, le locuteur fait appel à deux types de planification : la planification par connaissances rapportées et la planification par connaissances transformées (entre autres, Bereiter et Scardamalia, 1987, 1998 ; Bereiter, Burtis et Scardamalia, 1988).

Problématique Ainsi, comment les enfants deviennent-ils des locuteurs/scripteurs performants ? Comment ce développement se traduit-il linguistiquement ? Le contexte de production a-t’il un impact sur les choix linguistiques de nos participants, tout comme les adultes (Levelt, 1989) ? Est-ce que les enfants et adolescents de notre étude, selon le type de texte à produire (narratif oral, narratif écrit, expositif écrit, expositif oral), adaptent leurs choix linguistiques et mobilisent une planification plutôt qu’une autre, comme cela l’est suggéré par le modèle de Levelt (1989), par Bereiter et Scardamalia (1987) ou encore par Ravid et Tolchinsky (2000, 2002) ?

Aux questions soulevées par notre problématique, nous avons les attentes suivantes. Nous supposons que les enfants, avec l’âge et l’expérience de l’école, passent du statut de locuteur natif (native speaker, Berman, 2004:9, 2008:2) à celui de locuteur expert (proficient speaker, Berman, 2004:9, 2008:2). L’individu acquiert à gérer une situation langagière complexe qui l’oblige à jongler efficacement entre ses connaissances linguistiques, cognitives, discursives et culturelles (Berman, 2004, 2008).

Nous suggérons que les enfants font des choix linguistiques de plus en plus adaptés aux contextes communicationnels ; ceci est davantage développé dans les deux parties qui suivent. La première partie présente les questions de recherche en se concentrant sur les variables indépendantes de l’étude, à savoir le niveau scolaire, le type de texte, la modalité et l’ordre de production. La seconde partie aborde les questions de recherche différemment en se focalisant sur les variables dépendantes de l’étude, à savoir : la proportion des SNL et des pronoms (Section 3.2.2.1, p. 99), le degré de lexicalité des SNL (nombre de nœud lexical) (Section 3.2.2.2, p. 100), la proportion de SN selon leur statut informationnel (Section 3.2.2.3, p. 102), l’utilisation non conventionnelle des pronoms (Section 3.2.2.4, p. 103), la forme utilisée pour maintenir une information (Section 3.2.2.5, p. 105), et la PAS (Section 3.2.2.6, p. 106).