3.2.2.1. La lexicalité des textes : La proportion des SNL et de pronoms

Dans le Chapitre 8, la lexicalité des textes est observée. Nous nous attendons à ce que la proportion des SNL et des pronoms varie selon les facteurs niveau scolaire, type de texte, modalité et ordre.

Nous nous attendons à un effet du niveau scolaire. Les jeunes scripteurs allouent leurs ressources cognitives majoritairement aux processus de traduction et de transcription au détriment des tâches de haut niveau telles que l’accès lexical (Bereiter et Scardamalia, 1987 ; Berninger et Swanson, 1994). L’accès lexical des plus jeunes peut en être entravé, ce qui se traduirait par une proportion moins importante de SNL dans leur production.

Nous prédisons également une influence du contexte de production (type de texte et modalité) sur l’emploi des SNL et des pronoms. Le type de texte expositif exige un registre assez académique et impose une pression informative que le type de texte narratif n’impose pas. Ainsi, le texte expositif se caractériserait par une proportion plus importante de SNL. En revanche, dans le texte narratif, les locuteurs/scripteurs se concentrent sur un protagoniste principal, qui, une fois introduit, est souvent maintenu. Le maintien se faisant préférentiellement sous forme pronominale,53 ce type de texte se caractérise sans doute par une proportion plus importante de pronoms.54

Concernant les deux modalités de production, de par leurs caractéristiques,55 nous supposons que la proportion des SNL est plus importante dans les textes écrits que dans les oraux, en revanche, la proportion des pronoms est sans doute plus élevée dans les textes oraux que dans les textes écrits. En effet, la modalité écrite se caractérise, entre autres, par un rythme de production lent qui engendre un temps de planification plus modulable et plus long que la modalité orale. Les enfants peuvent éventuellement se servir de ce temps supplémentaire pour mobiliser et produire des SNL.

Nous supposons également un effet de l’ordre. Ainsi, les individus ayant produit un texte écrit puis un texte oral réaliseraient sans doute davantage de SNL (puisqu’ils sont déjà activés et déployés à l’écrit) que de pronoms.

Enfin, les proportions de SNL et de pronoms selon les positions syntaxiques devraient également varier selon les facteurs de cette étude. En effet, les SNL se trouveraient davantage en position non sujet qu’en position sujet (Blanche-Benveniste, 1995, 1990 ; François, 1974 ; Jeanjean, 1980 ; Lambrecht, 1987). Nous attendons des résultats différents selon la position des SN.

Nos prochaines prédictions sont faites dans l’optique que les hypothèses, émises précédemment, se confirment (principalement l’hypothèse selon laquelle la proportion des SNL augmente avec l’âge). Le SNL apparaît comme un indice de maturité linguistique, d’autant plus que cette unité, rappelons-le, semble jouer un rôle essentiel dans l’acquisition du langage et la construction de la structure du discours (Dockrell et Messer, 2004 ; Francis, 1986 ; Ravid 2005, 2006 ; Ravid et Berman, sous presse). De plus, la manipulation de cette unité est un des aspects reflétant le passage de l’individu de native speaker à proficient speaker (Berman, 2008 ; Ravid et Tolchinsky, 2000, 2002). C’est en partant de ce postulat que nous nous concentrons sur le degré de lexicalité des SNL.

Notes
53.

En effet, nous avons vu que un des principes de la transmission de l’information, et notamment de l’oral, est l’encodage d’une ancienne information par le biais d’un pronom.

54.

Les spécificités de chacun des types de textes sont développées à la Section 2.4 (p. 70).

55.

Ces caractéristiques sont présentées à la Section 2.2 (p. 54).