1.3.1. La culture de la performance à l’école.

A l’heure actuelle, une culture du marché est en train de tenter de s’installer dans les institutions éducatives, laquelle s’inspire des théories économiques récentes et des pratiques industrielles. Il s’agit d’une nouvelle culture de performance compétitive qu’est en train de produire des effets sur les nouveaux profils institutionnels.

Ball (2001) vient nous avertir sur le nouveau cadre des politiques générales qui sont en train de s’établir et sur la forme comment celles-ci produisent des impacts sur la société et les institutions d’enseignement, écoles et universités. Un des impacts, selon lui, renvoie à la « culture de l’auto-intérêt » : les motivations personnelles surpassent les valeurs impersonnelles.

L’acte d’enseigner et la subjectivité des enseignants se modifient profondément face aux nouvelles formes de contrôle du marché impulsées par le marketing et par la compétition, aspects qui apportent quelques implications : augmentation de la pression et du stress en relation avec le travail ; augmentation du rythme et intensification du travail ; modifications des relations sociales produisant un déclin de la socialisation et de la vie scolaire. Des concepts comme « société d’apprentissage », « économie fondée sur la connaissance », etc., sont de puissantes constructions du marketing de la connaissance moderne qui retentissent dans l’action du sujet dans son quotidien. Chaque jour davantage, le monde du commerce et des affaires se focalise sur l’éducation comme une stratégie en expansion dans laquelle des bénéfices considérables peuvent être obtenus. Nous pouvons mettre en évidence la croissance des institutions privées d’enseignement et la multiplication d’espace de formation avec l’appui des politiques mondiales. Dans ce contexte, souvent, l’éducation passe pour être considérée comme une occasion pour le commerce. Des valeurs sont effacées ou déconsidérées au profit de l’usage de méthodes normalisées de mesure et de contrôle. Quand nous confrontons la réalité concrète de l’école avec les discours sur la responsabilité, l’amélioration la qualité de l’enseignement, l’efficience et autre, inspirés par les théories économiques, nous avons l’impression d’une « institution en faillite ». Les processus d’enseignement qui ne s’encastrent pas dans les critères de la performance, nous paraissent déconsidérés et dévalorisés. L’enseignement et l’apprentissage sont réduits à des processus de production qui doivent accomplir les objectifs du marché.

Pour Lissovoy et Mc Laren (cités par Ball 2004), penser les services sociaux comme une production constitue une violence. Cette perspective trouve son adéquation dans l’application au champ de l’éducation, en ce qu’elle est simplificatrice des processus humains et sociaux. Quand on considère les institutions sociales comme un système de production basée sur la culture du marché, les spécificités des interactions humaines impliquées dans les processus sont éliminées. En considérant une discipline d’enseignement, la pratique du professeur reste réduite à se soumettre à des règles et à atteindre des objectifs de performance fixés qui pourront être évalués par un système de gestion globale.

Dans la vision de Ball (2004), le système éducatif commercialisé et guidé par la performance est transformé en une entreprise privée que dont les parents sont des consommateurs. Sans aucun doute, celui-ci sera lucratif. En effet, la plupart du temps, dans une culture globalisée selon cette perspective, l’éducation est alors considérée en tant que capital humain (Berker cité par Leclercq 2005) et capital culturel (Bourdieu cité par Leclercq 2005). Le capital humain caractérise la valeur de l’individu sur le marché du travail comme un stock productif. Il est vu comme un facteur global de production à l’intérieur de l’échelle sociale. Le capital culturel est, selon Bourdieu, un attribut distinctif de l’individu. Il peut être acquis, transmis. Il peut fructifier ou se déprécier en demeurant soumis aux fluctuations sociales.