1.4.1.2. En France

En 1879 sont apparues en France des tentatives de réglementation avec comme objectif de proposer une meilleure organisation du processus de formation des enseignants. Dans l’histoire de la formation des enseignants en France nous pouvons citer des périodes importants comme les années 1833, 1848 et 1950. Selon Nicolas (2004), l’expérience d’une époque explique la démarcation d’une génération, de celle qui la précède et de celle qui la suit, différentiation des formations reçus avant et après 1833 et avant et après 1851, qui conditionnent la vision d’une bonne, d’une mauvaise ou de l’absence de qualification. Selon cet auteur nous pouvons répartir trois générations d’instituteurs en France : celle de la restauration, celle de la monarchie, celle de l’après 1850.

Les instituteurs de la génération Guizot, principalement les laïques reviennent fréquemment sur la date de 1850, considérés comme un recul de l’État face à l’Église. Dans le texte de la loi du 28 juin de 1833 (la loi Guizot), l’Etat intervient dans la définition du Brevet de Capacité pour l’Enseignement Primaire. La génération qui se définit comme pionnière, souffle de l’empreinte du passé ( les séquelles de 1848-1852), mais également du poids de l’âge. Selon le mémoire de Benjamin Rémy, Lorient cité par Nicolas (2004) : « la jeunesse n’aime pas les vieillards : là où il existe deux écoles en concurrence, dont l’une est dirigée par un jeune homme et l’outre par un vieillard, ce dernier voit le vide se faire autour de lui sans autre motif que les suites inévitables de l’âge». (Benjamin Rémy, Lorient cité par Nicolas 2004, p.68). Dans l’autre coté les jeunes maîtres se perçoivent sans expérience et s’ajoute la conscience d’avoir acquis une formation insuffisante. La nouvelle génération formée à partir de 1850-1851 au moment de la réforme, des conditions d’exercice de la profession et du nouveau règlement sur les écoles normales, se définit, selon Nicolas (2004) par son infériorité vis -à-vis de la génération précédente (avant 1850). Les maîtres formés sous la monarchie de juillet savent rappeler les lacunes de la formation et la faible valeur des diplômes de la nouvelle génération. Les instituteurs laïque, anciens élèves des écoles normales, recrutés, depuis le texte de 1851 sur les critères de moralité et non d’instruction. La loi du 9 août 1879 dite Loi Paul Bert institue l’obligation pour chaque département de créer un établissement pour la formation de instituteurs, école normale primaire d’instituteurs ou école normale primaire de garçons, et un pour la formation des institutrices, école normale primaire d’institutrices ou école normale primaire de filles, parce que dans le texte de la loi Guizot, l’enseignement des filles, selon Loison (2007), pour des raisons budgétaires, n’est pas évoqué, malgré cette absence qui restreint la notion d’instruction universelle, la loi Guizot n’en constitue pas moins une première charte complète et détaillé de l’enseignement primaire en France.

La loi du 28 mars 1882 établit l’obligation scolaire pour les enfants de 6 à 13 ans et supprime l’instruction religieuse. Nous avons déjà abordé cette question dans la Partie 1 de cette thèse au chapitre (2.3.1.) Les écoles normales primaires étaient des établissements publics auxquels il incombait de former des jeunes qui voulaient exercer le métier d’enseignant à l’école élémentaire. La fonction de ces établissements recouvrait deux domaines : celui de l’instruction générale et celui de l’instruction professionnelle. La première école normale est créée en 1810 à Strasbourg. Selon Loison (2007) malgré cette innovation et le succès qu’elle rencontre ( l’école normale de Strasbourg était reconnue), la question de la formation des maîtres et de la création d’autres écoles normales reste en suspens sous la restauration. La commission de l’instruction publique, même si elle reconnaît l’utilité d’un tel établissement, ne semble pas favorable à la génération des écoles normales. La commission de l’instructions publiques préfère alors la solution d’écoles-modèles dont les maîtres expérimentés initient leurs futur collègues. C’est ainsi que s’ouvrent, en dehors du « cours normal ».En 1831, le député Gillon, conscient du fait que la création des écoles normales dépend étroitement du bon vouloir des départements ou des villes, engage le gouvernement à mettre en place une véritable politique en faveur de la formation des instituteurs. En 1832 Guizot crée la revue «  le manuel général de l’instruction primaire, bulletin quasi officiel qui fait connaître à la France entière les décisions et les orientations ministérielles » (Loison, 2007, p.162).Les objectifs de cette revue sont de publier tous les documents officiels concernant l’instruction populaire, de présenter des expériences intéressantes dans ce domaine, d’analyser les ouvrages disponibles et des donner des conseils aux instituteurs. En 26 février 1835 le corps des inspecteurs est crée pour stimuler le zèle des instituteurs. Selon Loisin (2007) l’ordonnance de 26 février 1835 décida que le service de inspection des écoles serait assuré dans chaque département par un fonctionnaire spécial. L’ordonnance du 18 novembre 1845 organise leur carrière. (L’inspection primaire et l’inspection académique).En ce qui concerne la formations des enseignants la loi Falloux apporte une modification historique importante par apport aux autres, pour établir l’enseignement des filles. Dans l’histoire de la formation des enseignants en France nous pouvons identifier des essayes de structuration de la formation des instituteurs à exemple des lois Guizot et Falloux, mais ces initiatives ont eu des haut et des bas. Selon Delarge (1980), la guerre de 1870-1871, sont pour l’école primaire française, les effets de destructions, la mort des enseignants-soldat, l’occupation militaire de la moitié de la France, c’est aussi Adolphe Thiers, l’ennemi « viscéral » qui monte au pouvoir. La République apporte des nouvelles espoir au enseignement en France. En 1878 ce sont les textes législatifs sur la construction des maisons d’ école et la résurrection de l’enseignement primaire supérieur. Selon Delarge (1980),c’est la grande commission animée par Paul Bert à partir de 1879 qui prépare la législation désirable. Mais c’est déjà l’heure de Jules Ferry, ce qui explique la fécondité des années 1878 et 1880 :loi sur les écoles normales (9 août 1879) ; création des conférences pédagogiques (5 juin 1880) ; fondation de l’École Normale Supérieure de jeunes filles(13 juillet 1880).

À la fin de ce XXème siècle, le modèle de formation des enseignants en France se trouve de nouveau en crise. Trois perspectives demeurent en concurrence, au moins dans les représentations et dans la sub-culture du monde de l’éducation, à savoir : le modèle de formation des écoles normales primaires, le modèle de l’« homme cultivé », le modèle d’enseignement engagé dans le processus de professionnalisation. C’est dans la logique de ce troisième modèle que furent créés les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres – IUFM qui ont remplacé les écoles normales primaires et la formation des CPR (Centre Pédagogiques Régionaux) Cette création fut établie au travers de la Loi d’Orientation du 10 juillet 1989, année du Bicentenaire de la Révolution Française. Elle stipulait en particulier qu’il incombait aux IUFM la formation des enseignants de l’enseignement primaire et secondaire, tous portant alors le titre de professeur : professeur des écoles, professeur de collège, professeur de lycée. Dans son chapitre 17, il est établi que chaque académie aurait un IUFM à partir du 1er septembre 1990 et que celui-ci aurait un lien avec une ou plusieurs universités. La rupture importante tient en ce que la formation des enseignants jusqu’alors conduite sous la responsabilité directe de l’employeur : le Ministère de l’Éducation Nationale et de ses Directions : Direction des Écoles, Direction des Collèges, Direction des Lycées, passe sous la responsabilité de l’enseignement supérieur. C’est qu’introduit, sans que cela soit perçu immédiatement par tous les acteurs, le U du sigle IUFM, U initiale de Universitaire. Au sein des universités, les IUFM jouissent d’une grande autonomie de gestion et d’organisation, ceci de par leurs statuts que nous ne développerons pas ici.

Près de 16 ans plus tard, la loi d’orientation pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005 fixe, de nouveau, les grands objectifs de l’école et en partie modifie, pour l’adapter à cette orientation, la loi de 1989. Les statuts des IUFM se trouvent eux-mêmes modifiés. Les IUFM sont placés sous la tutelle du Ministère de l’Éducation Nationale Les IUFM deviendront des Écoles intégrées aux Universités. Progressivement dans chaque académie, les IUFM sont intégrés à une université selon des procédures souvent complexes.

Jusqu’en 2008, le recrutement des enseignants de l’enseignement comme de l’enseignement secondaire ainsi que des professeurs-documentalistes, des conseillers d’éducations des établissements publics et des établissements privés sous contrat est réalisé par des concours publics. Au sein des IUFM, la première année de formation de ceux qui y ont été présélectionnés au niveau de la licence consiste essentiellement en la préparation du concours de recrutement avec une première sensibilisation sur le terrain par un stage d’observation. La seconde année est réellement l’année de professionnalisation sous la forme d’un dispositif en alternance entre la salle de classe et les cours universitaires. Cette formation professionnelle initiale des professeurs des écoles est faite d’activités de formation, d’enseignement et de stage en responsabilité dans les cycles de l’école primaire. La formation en alternance permet de construire un ensemble de compétences nécessaires à l’exercice de la profession défini dans le référentiel national de compétences. Il s’agit là de mises en situation qui donnent un espace à la confrontation des pratiques réelles analysées dans les cadres théoriques introduits par la formation universitaire.