A.1.2- Réalité subjective

Le problème de la détermination de la réalité est beaucoup plus pointu dans les sciences sociales. En effet, si pour les sciences dites exactes, les objets d’étude ont une existence ontologique, dans les sciences sociales, les faits sont indissociables des objets étudiés (et même de l’observateur). Il apparaît, à la suite de ce qui précède que la réalité ne peut être perçue en dehors des sujets acteurs ou observateurs. Ce qui, au-dessus des perceptions subjectives, apparaît homogène et acceptable de tous, l’est de manière consensuelle, les uns acceptant les perceptions des autres. Quand nous admettons que les maladies sont dues à l’action des microbes ou des virus, nous n’avons pas tous vu ou identifié ces êtres invisibles. Nous admettons pour vrai ce que des spécialistes nous en disent.

Le consensus ne se fait pas exclusivement sur la base de la science. Autant les uns acceptent ce qui est dit parce que cela est dit sur des bases scientifiques, autant d’autres acceptent parce que ce qui est dit s’appuie sur les bases culturelles ; les anthropologues parleront d’ethnoscience. Dans tous les cas, science et ethnoscience ne sont que conventions. Ian HACKING dans Entre science et réalité : la construction sociale de quoi ? (Traduction de GRASS et LEVIT in Internet) affirme :

‘« La science est un ensemble de conventions hautement élaboré produit par une culture particulière dans des circonstances historiques particulières […] C’est un discours conçu par et pour une communauté interprétative spécialisée, en des termes créés par le mélange complexe de circonstances sociales, d’opinions politiques, d’incitations économiques et d’un climat idéologique qui constitue l’environnement humain du scientifique ». ’

Dans ce cas la réalité est davantage admise comme une affaire de croyances et de conventions. Il s’agit des certitudes, les évidences ou ce qui est admis comme vrai par un groupe ou une société donnée. Cette orientation conceptuelle tend à récuser la perception matérialiste de la réalité ; une perception qui en fait un état de référence, une glace sur laquelle viennent se miroiter les faits et les idées. Il s’agit davantage de construits, de conventions. Cependant, la société au plan macroscopique étant constituée de plusieurs microcosmes (microgroupes), il en découle que des évidences ou des certitudes générales, il existe des nuances, relatives aux différents microcosmes du macrocosme social. Nous admettons qu’à la base, il y a une certitude, une évidence scientifique générale et unique, mais la pluralité des discours sur cette réalité de base génère une pluralité de certitudes découlant des niveaux de perception des microgroupes.