Chapitre II.
Corpus de base

Notre problème majeur est de découvrir comment à partir du concept de sida, les messages qu’émettent les différents acteurs de la communication sociale au Cameroun parviennent à susciter la représentation d’une maladie mortelle et incurable et transmissible. Cette interrogation nous amène à nous intéresser aux différentes logiques qui sous-tendent cette représentation. Y aurait-il, comme le suggèrent les recherches de Ludwig WITTGENSTEIN, derrière le substantif sida une substance décelable par tous les acteurs de la communication sur le sida au Cameroun ?

Les messages émis sur le sida apparaissent comme des morceaux d’un puzzle qu’il s’agit de reconstituer afin de dégager les discours qui s’y trouvent cachés. Nous sommes convenus de désigner par discours dans le cadre de ce travail : une logique, une vision exprimée en public oralement ou par écrit. En d’autres termes, les discours sur le sida ne sont pas servis comme tels dans l’espace de communication sociale au Cameroun ; ils transparaissent à travers une masse de messages souvent épars. La référence à Michel FOUCAULT nous amène prioritairement à procéder à un travail de recension des différents messages repérables dans le champ de la communication sur le sida au Cameroun. Il est question pour nous, d’en collecter suffisamment afin de constituer des séries qui nous permettront d’identifier les différentes logiques qui s’en dégagent par rapport au sida au Cameroun. C’est la constitution de ce corpus de base qui fera l’objet de ce chapitre.

Jusqu’en 2005, le Comité National de Lutte contre le Sida (CNLS) avait émis 225 messages de sensibilisation. Nous avons par ailleurs, au cours de notre premier travail sur ce sujet (programme de Masters), recensé 72 (soixante douze) messages non officiels. A ce total de deux cent quatre vingt dix sept messages, il faut ajouter un nombre indéterminé d’articles de presse et de messages iconographiques. Il est évident que tous ces messages ne peuvent avoir, ni le même contenu, ni la même précision, encore moins la même pertinence. Par ailleurs, certains de ces messages se répètent et créent un effet de redondance.

Notre problème dès lors est la gestion de cette masse de messages et articles de manière à n’en retenir, pour exploitation, que les plus significatifs. Il nous faudra à cet effet, procéder à une sélection. Pour y parvenir nous allons opérer dans trois axes : les messages du CNLS, les articles de Cameroon Tribuneet les autres articles. Seulement, une distinction fondamentale est à établir entre les messages provenant des émetteurs qui revendiquent la légitimité exclusive de parler du sida et ceux des multiples autres acteurs anonymes qui ne manquent pas d’émettre des messages non conformes à ceux des premiers. Nous appellerons messages dominants ceux émis par les acteurs qui revendiquent la légitimité exclusive de parler du sida. Il s’agit des officiels. Les autres messages seront identifiés comme messages dominés.