C.2.2- Les cinéastes et comédiens

L’art théâtral au Cameroun est essentiellement marqué par la comédie. Le comédien a lui aussi une personnalité paradoxale. Ce paradoxe obéit aux mêmes critères que ceux analysés dans le cas du musicien. En effet, au Cameroun, le comédien, au plan social ne jouit pas d’une grande considération. Il est jugé comme individu amusant et peu sérieux. Peu de comédiens ont pu briguer un poste politique dans le pays. Un seul, Ismaël BIDOUNG MPKWAT, a pu, par décret du président de la République, accéder au post de ministre de la Jeunesse et des Sports. Il faut cependant, relever qu’au-delà de son statut de comédien, cette personnalité est un haut cadre de la Jeunesse et des Sports.

A l’image du musicien, le comédien ne manque pas de séduire le public par ses prestations. Jean Miché KANKAN (nom d’artiste) était considéré par plus d’un Chef d’Etats africains comme ami. Ses prestations publiques drainaient des foules et, dans la vie courante, il ne pouvait passer inaperçu. Comme le musicien, le comédien se laisse souvent distancer par son œuvre. Très souvent celle-ci a une personnalité distincte détachée du comédien. Daniel NDO veillait d’ailleurs à marquer cette distance avec le personnage d’OTSAMA qu’il incarnait dans ses pièces.

Le cinéaste par contre jouit d’une personnalité plus acceptée et plus respectée au Cameroun. Cette considération, le cinéaste la partage avec l’écrivain (auteur) dans le cas du théâtre. Il s’agit du prestige que confère l’instruction. Ecrire une pièce de théâtre au Cameroun suscite respect et admiration alors que jouer un rôle dans cette pièce n’apporte aucun prestige. Le réalisateur de films apparaît comme cet intellectuel qui est allé au-delà de la simple maîtrise de l’écriture pour atteindre le « divin » stade de la création (cinématographique). Cependant, le film semble faire écran entre ce créateur et le public qui le vénère. En effet, seuls les personnages du film s’adressent directement au public. Dans ces conditions le cinéaste c’est-à-dire le réalisateur de film ne peut être véritablement considéré comme un acteur de la communication sociale sur le sida au Cameroun. Ce statut, il le « prête » à son film ou mieux aux personnages de son film. C’est à ces personnages que le public s’adresse pour acquiescer ou pour contester un aspect du discours tenu dans le film. Seule une frange réduite d’ « intellectuels » parvient à franchir l’écran du film pour s’adresser à l’auteur qui se trouve caché à l’arrière.

En somme le comédien, à l’image du musicien n’a pas d’autorité politique. Cependant, parce qu’il suscite l’admiration du publique il a une grande capacité de persuasion. Cependant, parce que le film cinématographique semble refléter la réalité il suscite un peu plus d’adhésion.