C.2- Posture contradictoire des discours dominés

Les discours dominés portant sur l’épidémiologie du sida sont multiples et variés. Cette variation tient à la fois aux différents types d’acteurs et au temps.

C.2.1- Les discours des dissidents adeptes de l’hypothèse virale

Nous avons observé au chapitre II que les discours dissidents sur l’épidémiologie du sida se rapprochent beaucoup des discours dominants. Ils admettent que le sida est une épidémie due à un virus le vih et qui se transmet par le sexe et par le sang. Seulement, alors que le discours dominant parlant de la voie sanguine pense davantage aux contacts entre un sang infecté par le vih et un sang sain, le discours des dissidents adeptes de l’hypothèse virale voit en plus de ce mécanisme, une contamination par la vaccination. Ici, il s’agit de l’inoculation dans le sang sain des virus se trouvant non pas dans un sang contaminé mais dans des instruments de vaccination.

Par ailleurs, alors que le discours dominant situe dans le temps, l’origine du sida en 1981, les dissidents adeptes de l’hypothèse virale du sida ont les premiers, remonté cette origine entre les années 50 et 60. Pour Edward HOOPER cette origine se situerait entre 1957 et 1960, période au cours de laquelle la campagne de vaccination antipolio qu’il incrimine aurait eu lieu en Afrique Centrale. Dans l’article intitulé Origine possible du sida on peut lire à la page 2 sur 2 :

‘« Que ces essais aient peut-être provoqué une pandémie mondiale n’en finira pas de hanter notre conscience. Cela permet aussi de replacer les autres activités humaines – sexualité, échanges sanguins - à leur juste place. Elles ont favorisé l’épidémie mais ne l’ont pas provoqué ». ’

Un deuxième groupe, parlant plutôt de campagne de vaccination contre la variole situe cette période à la fin des années 70. Ils évoquent pour les uns des groupes minoritaires aux Etats-Unis (les Noirs) et des pays tels que le Brésil, Haïti ou l’Afrique Centrale. Pour ces deux premiers groupes, le virus inoculé par le vaccin s’est ensuite propagé par les voies sexuelle et sanguine.

Un troisième groupe pense plutôt que le sida existerait depuis bien plus longtemps. C’est ce groupe qui estime qu’Erasme de Rotterdam, l’auteur de l’Eloge de la folie serait mort en 1731 de sida. Ils apportent une particularité en postulant qu’avant 1981 le sida sévissait de manière sporadique. Comme les discours dominants, ils évoquent la notion de cofacteurs pour expliquer la survenue de l’épidémie.

En définitive, il apparaît que le discours des dissidents adeptes de l’hypothèse virale n’est pas statique. Il considère que le sida est passé du statut d’une affection sporadique à une épidémie. Il admet également l’intervention des cofacteurs dans sa mutation. Enfin, il admet que non seulement le sida se transmet par la voie sexuelle et par le sang c’est-à-dire par contact entre le sang infecté et le sang sain, mais aussi par le canal de la vaccination, mode qui semble le plus avoir retenu l’attention de ce type d’acteurs de la communication sur le sida.