D.1.2- Prévention tournée vers l’agent pathogène

Avec la découverte de l’agent pathogène, la prévention s’est concentrée sur ce dernier. Il ne s’agit plus de l’éviter à l’aveuglette, il est désormais question de le traquer même dans un organisme apparemment sain. L’action de prévention est orientée vers le dépistage. Il apparaît ici une double préoccupation : identifier aussi bien la personne infectée que la personne saine. Dans le premier cas la personne infectée doit se connaître afin d’éviter de contaminer les autres et aussi de se surinfecter. La finalité de la sensibilisation dans ce cas est de couper la chaîne de contamination. Dans le second cas, la personne saine doit préserver sa santé. A cet effet, le général Camille NKOA ATENGA (écrivain) propose, au cours d’une interview à la radio (CRTV), la constitution des clubs de séronégatifs. De tels regroupements permettraient selon le soldat écrivain, de sauver la nation, les personnes saines devant se charger de la reproduction.

Avec la mise au point des médicaments présentés comme pouvant permettre de prolonger la vie des séropositifs, le dépistage prend une autre signification. Pour les personnes saines, il est toujours question de préserver la santé, mais pour les personnes atteintes, il s’agit désormais de se découvrir tôt car plutôt intervient la prise en charge, plus le traitement est efficace. La sensibilisation se double alors de l’aspect médicamenteux de la prévention. C’est dans ce sens que médecins et autres spécialistes diront qu’on ne devrait plus mourir de sida si on découvre tôt son infection et si on se laisse prendre en charge par les centres de traitement agréés. Il apparaît que même en l’absence d’un médicament efficace, les discours officiels de prévention réussissent de tour de force de faire passer le sida du statut d’affection incurable et terriblement mortelle, à celui de maladie chronique simple, au même titre que la drépanocytose, l’hémophilie, le diabète et autre. Cette mutation idéologique s’effectue cependant en même temps que le même discours dominant continue d’affirmer qu’aucun vaccin n’est encore trouvé. Cette apparente contradiction aboutit à la pensée qui admet qu’on peut désormais vivre avec le vih : « vivre avec le vih : utopie d’hier, réalité aujourd’hui ».

En général, le discours dominant laisse apparaître une dynamique sur la prévention du sida au Cameroun. Ce discours, pessimiste au départ perçoit le sida comme une maladie terriblement mortelle et incurable ; par la suite, la létalité du sida est relativisée et l’accent est de plus en plus mis sur le concept de prise en charge qui, dans certains esprits est synonyme de guérison.