C.2.3- La référence aux acteurs investis d’une autorité

Par investis, nous voulons dire les personnes reconnues comme compétentes ou investies d’une autorité pour parler du sida. Il s’agit aussi bien des hommes de sciences, des hommes politiques que des religieux. Nous l’avons relevé plus haut : dans un média se développent plusieurs discours. En effet, il y a le discours du média qui est un discours éditorial souvent intitulé « d’éditorial » ou signé « la rédaction » ou simplement anonyme. Il y a également le discours des journalistes et le discours des spécialistes. Le discours des spécialistes peut se déployer sous la forme d’une interview, d’une citation ou d’article.

En plus de l’expression directe des spécialistes sous forme d’interview ou de citation, les journalistes se réfèrent à eux pour soutenir leurs propres discours. Tous les articles de Cameroon Tribune parus au milieu des années 80 s’appuient sur l’OMS, l’UNESCO ou l’UNICEF. Il s’agit des comptes rendus des réunions de sensibilisation, organisées par ces institutions. Dans cette perspective, les responsables de ces institutions sont soit cités, soit simplement rapportés. Dans l’article intitulé Le rôle de l’information est essentiel selon l’OMS paru le 05 septembre 1985 on peut lire :

‘« Enfin, l’OMS estime que les femmes atteintes du SIDA ou courant un risque élevé devraient éviter d’être enceinte, car l’infection peut se transmettre au fœtus et au nouveau-né ». ’

Dans un billet signé de Joseph TSALA ADAH et intitulé « La psychose du sida » (op.cit.) on peut lire : « A ce jour, l’OMS chiffre à 15 000, le nombre de cas dont 13 000 aux Etats-Unis ». Ces deux articles sont représentatifs du principe d’expression de Cameroon Tribune.

Dans son fonctionnement, Cameroon Tribune publie régulièrement les articles des spécialistes dans des domaines nécessitant une expertise pointue qui manque souvent à ses rédacteurs. Le sida fait partie de ce type de sujets. Dans l’édition du 21 février 1987, trois médecins universitaires du Canada signent un article intitulé Première banque d’échange internationale pour les recherches. Du 6 au 9 juin 1987, Isaac NJIFAKUE du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique publie trois articles : Une maladie encore peu connue (6 juin 1987) ; diagnostiquer ? Oui et après ? (8 juin 1987) et une peur bienfaisante (9 juin 1987). Dans le même sens, un représentant de l’OMS signe un autre article dans l’édition du 5 juin 1987 intitulés : Les moustiques n’y sont pour rien.

Les articles des spécialistes sont supposés apporter plus de crédibilité au discours du média. En effet, le spécialiste est investi d’une compétence qui fait que quand il dit quelque chose, cela devient vrai pour parler comme le professeur David SIMO. Ce mode d’expression n’est pas inconnu dans la radio et à la télévision. Outre les interviews des spécialistes, il arrive en effet que ces médias présentent des programmes produits par des acteurs extérieurs. La radio publique CRTV comporte dans son fonctionnement un espace appelé « le plateau des administrations » qui diffuse les programmes des différentes administrations publiques. Dans le même sens, cette radio diffuse également les programmes de la coopération internationale et ceux des confessions religieuses. Il n’existe pas de « plateau des administrations » à la télévision nationale mais des programmes de la coopération y sont régulièrement diffusés. Il en est de même des programmes religieux ou des documentaires reçus (achat ou dons) de l’extérieur. Il s’agit des tons extérieurs et différents, qui augmentent à la crédibilité du média.