La photographie

Les gens se méfient parfois des photographies, pour différentes raisons. Une jeune fille ne veut pas être photographiée avec un garçon, elle ne veut pas passer pour une vagabonde qui sort facilement , si on voit son image sur le présentoir du studio. Exposer des photos à l’extérieur est difficile. Les gens craignent les moqueries, les insultes d’une personne en querelle avec une autre. Ils ont peur d’être déshonorés. Dans l’ensemble, les Togolais aiment les photos, ils aiment être pris en photo, c’est l’utilisation qu’on en fait, c’est l’exploitation qui leur déplait. Les gens ne veulent pas que leurs photos partent, moins par crainte des maléfices qu’à cause de l’exploitation ( commerciale et artistique) dans laquelle ils ne sont pas impliqués. Pour les touristes cette photo c’est de l’argent, et toi tu n’as rien gagné.

Je travaille beaucoup pour une clientèle catholique qui me demande souvent des portraits de funérailles, c’est une très ancienne tradition chez nous dont les origines ne sont pas chrétiennes pour autant. Je réalise le portrait principal, puis des images secondaires et des cartes de visites avec une petite photo du défunt. Ces cartes seront distribuées à tous les invités lors de la cérémonie. La photo principale est montrée à tous les participants pendant la procession, elle se déplace avec le mort, elle l’accompagne, puis le portrait est exposé sous l’apatam. Chacun verra une dernière fois l’image de la personne décédée.

Très souvent on m’apporte une vielle photo du défunt qu’on me demande de rénover et d’embellir. Je suis libre de proposer toutes sortes de compositions. J’ai ainsi représenté le portrait d’une défunte en installant une photo principale avec un plus petit portrait de son visage au dessus d’elle-même, au milieu des étoiles pour montrer son double, ou son âme qu part vers le ciel. Il faut bien conserver fidèlement le visage, car c’est la physionomie qui intéresse la famille. Il faut ensuite embellir, enluminer le personnage. le fond d’étoiles est un fond de lumière propice au voyage de l’âme.

Un autre genre de photographie me passionne. C’est le travail que je fais avec des enfants des rues. « La rue c’est l’enfer, l’école c’est la vie » c’est le titre d’un travail que nous avons réalisé avec les enfants. Grâce à la photographie simple d’utilisation et qui procure de beaux résultats, on peut aider les enfants. On peut les aider à réaliser leurs rêves, on peut leur donner un métier, on peut presque les aider à s’en sortir et les ramener vers l’école. Je fais des travaux photo avec eux, puis on expose les photos afin de sensibiliser les gens aux problèmes des enfants des rues.