3. Violences conjugales et domination :

Toutes les recherches qualitatives sur le sujet de la violence conjugale ont révélé l’existence d’un phénomène ainsi que les mécanismes à l’œuvre, notamment de comportement de domination.

Le cycle de la violence conjugale se répète infiniment et comprend toujours les mêmes étapes : montée en puissance progressive de la violence qui s’exacerbe jusqu’à une crise aigue, à laquelle succède une phase de regrets /pardon, appelée « lune de miel » et souvent idyllique, puis une période variable de rémission, jusqu’à la reprise du mouvement. Durant la première phase de tension, d’irritabilité de l’homme, la violence n’est pas exprimée directement, mais elle transparaît à travers les mimiques, les attitudes comme les regards agressifs ou le timbre de la voix. Durant la deuxième phase d’agression, l’homme donne l’impression de perdre le contrôle de lui-même. Ce sont alors des cris, des insultes et des menaces, la violence physique commence progressivement et toute réaction de colère ne fait qu’aggraver la violence du partenaire, aussi la femme est démunie et, en raison de l’emprise, n’a souvent pas d’autre solution que la soumission. Arrivons à la troisième phase d’excuses, de contrition, où l’homme cherche à annuler ou à minimiser son comportement. Ces explosions de violence sont suivies de remords, mais, comme il s’agit d’un sentiment désagréable, l’homme tente de s’en débarrasser en cherchant une explication qui pourrait le déculpabiliser, il demande pardon et jure que cela ne se reproduira plus, à ce moment-là, il est sincère, mais cela ne veut pourtant dire qu’il ne recommencera pas. Finalement la phase de réconciliation, appelée aussi phase de « lune de miel », où l’homme adopte une attitude agréable, est soudainement attentif, prévenant. Il se montre même amoureux et offre les cadeaux, et c’est la peur de l’abandon qui conduit à ce changement ponctuel et c’est cette même peur qui va, plus tard, les amener à reprendre le contrôle de leur femme. Les femmes reprennent espoir et reste. Le cycle de la violence peut donc recommencer…

‘« Chez l’homme violent, il y a une sorte d’addiction à ce comportement, il ne sait plus se calmer autrement que par la violence. Lorsque le cycle est initié, il ne peut être interrompu que par l’homme lui-même. Quelle que soit son attitude, la femme n’a aucun moyen de l’arrêter.»(Hirigoyen, 2005, p. 23). ’

La pertinence du modèle ne fait aucun doute et permet d’appréhender l’incompréhensible, à savoir pourquoi les femmes restent prisonnières de ces situations.

De fait, ce processus peut, à la fois pour les victimes et les auteurs, donner l’illusion de la possibilité de la réparation, l’illusion d’un nouveau départ.

Il semble logique que l’amour s’effrite lorsque la conjointe est confrontée à des violences répétées. L’objectivation par les femmes de leur « désamour » à l’égard du conjoint violent est le point de départ de la prise de conscience de leur situation de victime. Les femmes fuient le danger en général lorsqu’elles ont peur de mourir, ou peur pour leurs enfants. Mais ce n’est qu’à partir du moment où elles réalisent qu’elles ne l’aiment plus, qu’elles ont la possibilité de ne plus se sentir coupables et de s’envisager comme des victimes. En tant que victimes, elles pourront alors faire valoir leurs droits.