2. L’ampleur des violences conjugales au Canada :

La violence familiale se produit dans les relations intimes, entre parents, dans les relations de dépendance ou les relations de confiance. Elle varie de l’abus physique, émotionnel et sexuel à l’exploitation financière et la négligence.

Le gouvernement du Canada a réitéré son engagement de lutte contre la violence familiale au Canada.

‘« Au nom du gouvernement fédéral et des quinze ministères partenaires, l'Agence de santé publique du Canada coordonne l’Initiative de lutte contre la violence familiale (ILVF)… Le gouvernement fédéral fournit chaque année un financement de 7 millions de dollars à l’Initiative de lutte contre la violence familiale… L’ILVF vise à sensibiliser le public aux facteurs de risque de violence familiale et à la nécessité de l’engagement du public contre la violence; elle renforce le système de justice criminelle et les réseaux de santé et d’hébergement des victimes; elle appuie les efforts de collecte de données, de recherche et d’évaluation visant à déterminer les interventions efficaces… Dans le cadre de l’Initiative de lutte contre la violence familiale, l'Agence de santé publique du Canada gère également le Centre national d’information sur la violence dans la famille (CNIVF). Le CNIVF est un centre de ressources canadien qui offre des renseignements sur la violence dans la famille. Il offre un service centralisé et complet de référence, de renvoi et de distribution pour la documentation sur la prévention, la protection et le traitement des aspects de la violence familiale.» (in L’initiative de lutte contre la violence familiale, Centre national d’information sur la violence, 2007).’

Au Québec, la statistique évalue 350.000 le nombre de femmes qui seraient victimes de violences. (in Ministère de la santé et des services sociaux, une politique d’aide aux femmes violentées,1985).

On évalue à une femme sur sept, le nombre de canadiennes victimes de violences. (in Macleod, pour les vrais amours… prévenir la violence conjugale…, 1987).

Dans le cadre d’une vaste enquête nationale sur la violence faite aux femmes, menée en 1993 par statistique Canada, 30% des canadiennes ont signalé avoir été victimes d’au moins un acte de violence physique ou sexuelle infligé par leur conjoint. Le tiers des femmes ayant subi des sévices avaient craint pour leur vie pendant leur relation avec leur agresseur.

48% des femmes ayant été mariées auparavant ont déclaré avoir été victimes de mauvais traitement. En 1992, plus de 200000 femmes ont été victimes de violence physique ou sexuelle de la part de leur époux ou conjoint de fait. Durant la période allant de 1974 à 1992, une femme mariée était 9 fois plus susceptible d’être tuée par son époux que par son étranger.

L’enquête nationale sur la violence contre les femmes, menée par statistique Canada en 1993, a révélé que la violence psychologique était une expérience très répandue chez les Canadiennes âgées de 18 à 65 ans ayant déjà vécu avec un partenaire :

En 1993, 39% des femmes prisonnières de relations abusives ont déclaré que leurs enfants les avaient vu se faire agresser.

De même, selon les statistiques Canadiennes, en 1993, l’enquête menée auprès d’un échantillon aléatoire de plus de 12000 femmes de toutes les régions du Canada, 29% des femmes ayant déjà été mariées ont déclaré avoir été victimes de violences physiques de la part d’un conjoint. Parmi celles qui vivaient dans une relation conjugale au moment de l’enquête, 15% ont dit avoir été victimes de violence, 29% des canadiennes sont victimes de violence physique de la part de leur époux ou de leur conjoint de fait (Rodgers, 1994, in La violence conjugale, Renseignements du centre national d’information sur la violence dans la famille).

Echelle d’agression verbale :

La quasi-totalité des hommes (96%) déclarent avoir fait preuve de violence verbale dans les 6 mois précédents. Les formes les plus présentes d’agression verbale consistent à dire ou à faire quelque chose pour vexer la conjointe (93%), à l’insulter ou à l’injurier (89%), à lancer un objet dans la pièce, à casser, à frapper quelque chose ou à donner un coup de pied (82%).

On note aussi que 52% des maris ont quitté la pièce ou la maison en claquant la porte et que 63% ont boudé ou refusé de parler avec leur conjointe. Finalement, 41% des hommes ont menacé de frapper leur conjointe ou de lui lancer quelque chose.

La totalité des femmes ont indiqué que leur conjoint avait fait preuve d’agression verbale dans les 6 mois précédents l’étude. Le nombre moyen d’abus verbaux qu’elles signalent est par ailleurs beaucoup plus élevé. En effet, les femmes rapportent, en moyenne, 61 abus verbaux dans les six mois précédents l’étude.

La première grande enquête spécifique sur les violences envers les femmes réalisée au Canada en 1993 a reçu un accueil mitigé. Parmi les résultats obtenus, une proportion est devenue emblématique : une femme sur deux a été victime d’au moins un acte de violence physique ou sexuelle depuis l’âge de 16 ans ; cette proportion est d’une sur quatre lorsqu’elle est limitée à la vie en couple. En revanche, les résultats portant sur les douze derniers mois sont presque passées sous silence ou considérés comme sous-déclarés : 10% des femmes avaient subi des actes de violence, dont 3% dans le cadre conjugal au cours de l’année. Taux pourtant proches de ceux de l’enquête annuelle canadienne ESG qui, en 1999, avait introduit des questions de victimisation. (Jaspard, 2005, p. 86).

La faiblesse du taux annuel observé au Canada en 1993 a été une surprise, confirmée par l’enquête ESG menée en 1999, de finalité et de méthodologie très différentes. Dans l’intimité de la vie conjugale, les taux annuels de violence se situent vraisemblablement pour les brutalités physiques entre 2,5% et 6%, et ceux des violences sexuelles graves oscillent entre 1% et 3%.(Jaspard, 2005, p. 88).

En 1993, 25% des femmes canadiennes ont été violentées de la part de leurs conjoints au cours de la vie de couple et 3% au cours des douze derniers mois. (Hirigoyen, 2005, p. 286).

Une femme sur quatre a subi de la violence de la part de son partenaire actuel ou précédent et, dans 20% des cas, cette violence a commencé pendant la grossesse. Selon le conseil consultatif canadien sur la situation des femmes, 18% des femmes qui se présentent aux urgences des hôpitaux seraient des victimes de violence conjugale. Chaque année, en moyenne, 20 Québécoises sont assassinées par leur conjoint (in Centre canadien de la statistique juridique).

Les formes d’agression verbale les plus présentes restent les mêmes, mais dans des proportions plus importantes, une seule exception à cette règle, les femmes sont un peu moins nombreuses à déclarer que leur conjoint a lancé un objet dans la pièce, cassé, frappée quelque chose ou donné un coup de pied (78% contre 82%). Finalement, on ne note pas de différence statistiquement significative entre les items pris un à un, or cette différence entre les déclarations des hommes et des femmes est modérée (Rinfret-Raynor, Cantin, 1994, p. 162).

La force physique constituait le moyen le plus souvent utilisé pour infliger des blessures. Ainsi, 76% des victimes blessées l’ont été au moyen de la force physique exercée par leur conjoint (in Comité consultatif canadien, 1992).

Dans le cadre d’une étude canadienne sur la violence dans les fréquentes actions en milieu universitaire et collégial, 81% des répondants masculins ont déclaré avoir exercé de la violence psychologique sur leur partenaire féminine.

En 1995, sur 1000 femmes âgées de 15 ans ou plus ayant répondu à un test relatif à la santé : 36% ont déclaré avoir été victimes de violences psychologiques au cours de leur croissance et 43% de mauvais traitements pendant leur enfance ou leur adolescence ; 39% ont dit avoir été victimes de violence verbale ou psychologique dans le cadre d’une relation au cours des cinq dernières années.

En 1995, une étude des dossiers tenus par divers organismes canadiens par leurs clients âgés, a révélé que la violence psychologique était la forme de mauvais traitements la plus répandue (in Dussault, La francophonie, notre monde à nous…).

25% des femmes victimes de violences conjugales consomment l’alcool, des drogues ou des psychotropes, arrivent parfois à tuer leurs maris suite aux violences commises par ces derniers sur elles, 5% seulement des conjoints subissent la violence de la part de leurs conjointes (in La violence conjugale…santé Canada, 1993).

En 1993, dans le cadre de la lutte contre la violence familiale entreprise au niveau fédéral, Santé Canada a financé une enquête nationale sur la violence envers les femmes. L’objectif principal était de produire des données valides sur la fréquence et la nature des violences masculines contre les femmes. Un échantillon équiprobable de ménages équipés de téléphone des dix provinces a été constitué. Sur les 19000 ménages contactés, 12300 entretiens téléphoniques ont été réalisés auprès de femmes âgées de 18 ans ou plus, soit un taux de participation de 64%. Les femmes étaient interrogées sur les actes de violence physique et sexuelle qu’elles avaient subis depuis l’âge de 16 ans.

Cette enquête portait uniquement sur les actes considérés comme une infraction au Code criminel du Canada. Elle enregistrait tous ces actes où qu’ils se soient produits. La violence de la part des conjoints a été mesurée à l’aide d’une série d’actes violents semblables à ceux contenus dans le CTS, auxquels se sont ajoutées les agressions sexuelles.

La moitié des femmes interrogées, 51%, ont été victimes d’au moins un acte de violence physique ou sexuelle depuis l’âge de 16 ans. Un cas de violence sur cinq déclarés dans l’enquête avait entraîné des blessures physiques. Au cours des douze mois précédant l’enquête, 10% des femmes avaient subi des actes de violence.

25% des femmes vivant ou ayant vécu en couple avaient subi des violences de la part du conjoint actuel ou d’un ex-conjoint depuis l’âge de 16 ans ; ce pourcentage était de 3% pour la période des douze mois précédant l’enquête.

Les résultats montrent que les auteurs des violences sont beaucoup plus souvent des hommes connus par les femmes que des inconnus. Ils soulignent également la répétition des violences pour les mêmes femmes, en particulier lorsqu’il s’agit des violences sexuelles.

10% des femmes ont été abusée et souvent violentée de la part de leurs partenaires, ces chiffres ont été déclaré suite à une intervention faite autour de plusieurs tiers sociaux. (in Strategies for confronting domestic violence…,1993).

Sur 31.588 femmes qui ont été victimes de violence en 1998, 37% ont subi les actes qu’elles ont dénoncés dans un contexte conjugal. En 1998, le taux de victimisation des femmes en matière de violence conjugale était de 368 par 100.000 femmes. Les femmes âgées de 18 à 39 ans, notamment celles de 25 à 29 ans, ont signalé des taux nettement plus élevés que la moyenne. En 1998, les auteurs présumés de violence conjugale provenaient en bonne partie des mêmes groupes d’âge que les victimes. Cependant, l’auteur présumé était souvent plus âgé que sa victime ; ainsi, 25% d’entre eux avaient de 1 an à trois ans de plus qu’elle, 13% de 4 à 5 ans de plus et 28% de 6 ans et plus. (in Le ministère de la sécurité publique québécois).

Plus de 25% des 1823 femmes interrogées disent avoir subi de la violence verbale (in L’enquête de santé Québec, violence faite aux femmes…,1999).

En 1999, le thème de la victimisation criminelle a été traité dans l’enquête annuelle, l’Enquête sociale générale. Les perceptions de la sécurité personnelle et les violences conjugales, ainsi que les attitudes vis-à-vis du système judiciaire et l’utilisation des services, ont été explorées dans l’enquête. Près de 26000 personnes – 14269 femmes et 11607 hommes – sur l’ensemble du territoire vivant hors institution, âgées de 15 ans ou plus, ont été interrogées. L’échantillon a été plus que doublé par rapport à l’habitude et le taux de réponse a été de 81,3%. En plus des violences conjugales, l’enquête a cherché à mesurer les mauvais traitements subis par les adultes plus âgés dans la famille, les violences envers les enfants et les jeunes, et les homicides familiaux.

Les personnes mariées ou vivant en union libre, ou ayant vécu avec un partenaire au cours des cinq dernières années, ont répondu aux questions traitant des violences conjugales. Les violences psychologiques ne sont pas incluses dans les indicateurs de violences globales, mais le questionnaire a inclus des items permettant de mesurer le lien entre les mauvais traitements psychologiques et la violence physique. L’enquête révèle des taux de violences conjugales semblables pour les hommes et les femmes (7% et 8% respectivement) au cours des cinq années précédant l’enquête. Mais les femmes déclarent davantage que les hommes des violences plus graves, d’avoir craint que leur vie ne soit en danger, et elles évoquent plus souvent des actes de violence répétés. Les taux pour les violences dans l’union actuelle sont identiques pour les hommes et les femmes, mais celles-ci déclarent plus de violences exercées par un ex-conjoint au cours des cinq dernières années.

L’enquête révèle une baisse des taux quinquennaux entre l’enquête de 1993 et celle de 1999 (12% et 8% respectivement), tandis que le taux annuel est de 3% dans les deux enquêtes. Cette légère baisse s’explique principalement par une moins grande proportion de répondantes qui déclarent des violences de formes très graves.

La criminalité conjugale par rapport à l’ensemble des violences contre la personne:
En 2000, une victime de crimes contre la personne sur 5 l’a été dans un contexte conjugal. 85% des victimes ont été des jeunes, les voies de fait simples ont été les délits les plus souvent commis à l’endroit des violences conjugales : 56% d’entre elles ont en effet subit ce crime, suivent les menaces, le harcèlement criminel (11%), les agressions armées ou causant des lésions (10%), agressions sexuelles (2%), les enlèvements ou séquestrations (1%) et les meurtres et voies de fait graves (1%).

Plus de 20 québécoises meurent chaque année, assassinées par leur conjoint ou ex-conjoint (in http://www.maisons-femmes.qc.ca/problématique/manifeste.html). On peut donc dire que ce ne n’est pas par amour, ni suite à un drame passionnel, c’est la manifestation ultime du contrôle exercé par un homme sur sa conjointe. Selon les données du programme de déclaration uniforme de la criminalité fondé sur l’affaire, le nombre de victimes de violence conjugale signalé au Québec a augmenté de 19% entre 1997 et 2000. En 2000, près de 16.000 victimes de crimes ont été commis dans un contexte conjugal (in le comité, consultatif canadien, 1992).

Sur une période d’une année, plus de 100.000 québécoises soit 6% des femmes de 18 ans et plus vivant en couple, ont été victimes d’atteintes physiques, 7% ont subi de la violence sexuelle et plus d’un million (66%) ont été l’objet de violence verbale de la part de leurs partenaires (in L’institut de la statistique du Québec).

En 2001:

On remarque que le plus de pourcentages, que ce soit chez la femme ou chez l’homme, se retrouvent dans la réponse : « Non, aucune violence ». Ceci révèle que ce sujet reste tabou ainsi ni la femme ne demande ses droits, ni l’homme n’avoue sa culpabilité. On évoque également le pourcentage pour l’agression physique (0.5%) qui est bien moindre que celui de l’agression verbale (10.9%) car ils préjugent que le poids de la violence verbale est moins diffamatoire que celui la violence physique.

De 20 à 50% des femmes sont victimes de mauvais traitements physiques infligés par leur partenaire à un moment ou un autre de leur vie. (in exclure pour la cause, 6ème conférence mondiale sur la prévention et le contrôle des traumatismes, le suicide et la violence…, 2002).

25% de Québécoises ont déjà été victimes de violence de la part de leur conjoint actuel ou d’un ex-conjoint. 21% des femmes agressées par leur conjoint actuel ou un ex-conjoint l’ont été pendant qu’elles étaient enceintes. Dans 4 familles sur 10 où règne la violence conjugale, les enfants sont témoins directs des actes violents subis par leurs mères.

Au Canada, les statistiques gouvernementales établissent que 98 % des agressions sexuelles et 86 % des crimes violents sont commis par des hommes. Les femmes représentent 98 % des victimes de violence conjugale sous forme d'agression sexuelle, d'enlèvement ou de prise d'otage, 80 % des victimes de harcèlement criminel sont des femmes alors que 90 % des personnes accusées sont des hommes. Une violence contre les femmes en hausse dans un pays où les acquis du féminisme sont pourtant plus importants France ou même en Allemagne.

Face à ce paradoxe, un rapport du gouvernement conclut : « Certaines études laissent entendre qu'une plus grande égalité des sexes (mesurée par les niveaux de scolarité, d'emploi et de revenu) contribue à une augmentation du nombre d'homicides commis contre les femmes. Selon cette théorie, à mesure que les femmes améliorent leur situation sociale par rapport à celle des hommes, elles deviennent plus vulnérables.» (in Violences conjugales, les chiffres, ARTE, 2007).

Cette analyse permet de mieux comprendre pourquoi les chiffres de la violence conjugale sont nettement plus élevés dans les pays occidentaux où l’émancipation des femmes bat son plein (Espagne, Québec, France, Allemagne…) que dans les pays latins où la forte tradition patriarcale n’est pas encore trop remise en cause par les femmes (Grèce, Italie, Portugal…). Ce qui ne constitue pas une raison pour mettre un frein à l’émancipation féminine car, poursuit le rapport canadien : « D'autres études ont révélé que l'égalité des sexes diminuait la vulnérabilité des femmes car en devenant plus indépendantes financièrement et personnellement, il leur est plus facile de quitter des situations où elles sont les plus vulnérables (rapport sur la détermination de la peine dans les cas d'homicides involontaires coupables commis dans le cadre d'une relation intime) » (in Violences conjugales, les chiffres, ARTE, 2007).