2.5.1 Les clusters gérés par le gouvernement

Il existe plusieurs formes d’agglomération au Vietnam que gouvernement a légalisées en leur donnant une définition officielle. Les pouvoirs publics reconnaissent comme entité socio-territoriale trois sortes d’agglomération.

  • La Zone industrielle, créée par le gouvernement ou le premier ministre, implique la concentration, dans un espace bien cerné géographiquement, d’entreprises manufacturant des biens industriels ou fournissant des services à la production industrielle. Les travailleurs ne vivent pas dans la zone industrielle.
  • La définition de la Zone spéciale d’exportation est la même que pour la zone industrielle, la seule différence étant qu’elle inclut des entreprises orientée vers l’exportation. Personne n’habite dans ces zones.
  • La Zone de haute technologie, créée par le gouvernement ou le premier ministre, concerne également une concentration de firmes dans un espace donné, géographiquement déterminé, cependant ces firmes doivent opérer dans des domaines de haute technologie tels la R&D, la formation et les services concernés.

Les statistiques du ministère du Plan et de l’investissement attestent que 137 projets de clusters industriels ont été approuvés et développés sur tout le territoire. 85 de ces clusters bénéficient d’une superficie de 16 000 ha (non compris le cluster Dung Quat — moins de 14 000 ha — la zone high-tech Hoa Lac et la zone high-tech de Hô-Chi-Minh-Ville). La force d’attraction des clusters vis-à-vis des investissements est considérable. Grâce à une bonne base d’infrastructure technique, un mode de gestion spécial, des procédures administratives allégées, et un grand nombre de mesures politiques en faveur des firmes, en juin 2003, ils avaient absorbé près de 2 500 projets d’investissement soutenus par un capital de 60 000 milliards VND (environ 37 milliards USD) et 10,5 milliards USD. Hô-Chi-Minh-Ville, Binh Duong, Binh Dinh et Phu Yen sont les provinces les plus attractives pour les entreprises. Les projets d’investissement concernent notamment les industries légères : produits électriques (chaîne de montage), industrie alimentaire (utilisant une technologie avancé par rapport au moyen niveau national). Certains clusters ont accueilli les projets de haute technologie de firmes telles que Nomura (dans la zone industrielle de la ville de Hai Phong), Fujitsu (clusters de la ville de Bien Hoa, dans la province de Dong Nai) ou Canon (parc industriel de Thang Long, dans la ville de Hanoï). Les clusters constituent un bassin pour les emplois. Ils emploient aujourd’hui directement près de 500 000 travailleurs, et ont entraîné la création de plus d’1 million d’emplois indirects, autour des clusters.

Pourtant, les zones industrielles font actuellement face à des difficultés majeures :

  • Le manque d’employés qualifiés constitue un problème commun pour l’ensemble des entreprises. La plupart des 3000 emplois des clusters de Hanoï exigent une qualification, car les firmes appartiennent toutes à des secteurs nécessitant une technologie avancée (industries électriques, mécanique de précision…). Pour satisfaire aux exigences du travail, les firmes doivent parfois envoyer leurs ouvriers dans un centre de formation professionnelle. Dans un cluster vietnamo-singapourien (joint-venture), établi dans la province de Binh Duong, un tel centre a été créé pour former les employés en fonction de la demande des entreprises.
  • La séparation entre l’aménagement des clusters et le développement du secteur d’activité ou du territoire. En réalité, il y a peu de clusters dont la production varie autour d’un produit ou d’un type de produit, d’où une faible évolution des clusters de pointe hautement compétitifs sur le marché régional et international. Un bon nombre de provinces bénéficiant de conditions socio-économiques similaires ont construit les mêmes types de clusters. Il en résulte du gaspillage et une concurrence imparfaite entre eux.
  • La faible coopération entre les clusters et les provinces pose difficulté : comme chaque province a ses propres clusters dans des secteurs d’activité similaires, les clusters ne peuvent pas bénéficier d’avantages comparatifs. La politique locale de chaque province est d’attirer à tout prix l’attention des investisseurs. Chaque province construit ses clusters, ses infrastructures sociales, sans penser à un investissement commun interprovincial.
  • De nombreux clusters ont vu leur progression enrayée en raison d’un désengagement territorial croissant. En réaction, le gouvernement et les autorités locales ont fourni des aides financières comme le cas ville de Da Nang (cluster Lien Chieu), la province de Thanh Hoa (cluster Le Mon) ou celle de Dac Nong (zone industrielle de Tam Thang).
  • Les infrastructures autour des clusters ne sont pas toujours construites, en particulier le système de traitement des déchets. Parmi les clusters existants, une dizaine seulement disposent d’un tel système ; ailleurs il est inexistant ou est en cours de construction.
  • Les handicaps résultant du cadre législatif : les entreprises locales et étrangères sont régies par des lois différentes, ce qui crée un traitement inégal entre ces deux catégories concernant par exemple la location des infrastructures ou du terrain. Autre type de contrainte : une décision oblige les firmes implantées dans des zones spéciales d’exportation à exporter 100 % de leurs produits. Les firmes situées à l’extérieur de ces zones ont à payer une taxe d’importation lorsqu’elles achètent des composants aux entreprises de la zone. Ces dernières ont donc des difficultés pour obtenir des contrats de sous-traitance avec les firmes extérieures, qui préfèrent recourir à une « vraie » importation.
  • Une infrastructure sociale surchargée constitue un nouveau phénomène, qui émerge lors du développement des clusters modernes.Ce problème concerne un bon nombre de clusters. L’agglomération de firmes provoque mobilité ou migration interne, ce qui surcharge l’infrastructure sociale de la province d’accueil. Le logement, l’école, l’hôpital, l’espace public pour les travailleurs sont les problèmes les plus urgents. Ces aspects sociaux n’ont pas été pris en compte avec toute l’attention nécessaire lors de l’établissement des clusters.
  • Autre difficulté relevée par de nombreux auteurs, l’industrie et les services complémentaires sont jugés peu efficaces et suffisants : basse qualité des transports, faible développement des industries concernées, coût élevé de services tels que les communications ou l’Internet…