Le manque de moyens financiers constitue une difficulté majeure pour les PME vietnamiennes. La situation est d’autant plus préoccupante que les banques et les investisseurs ne se montrent pas toujours favorables au secteur privé (Webster L. et Taussig M., 1999)285. À projet égal, les entreprises publiques ont plus de chance de se voir octroyer des prêts. Cette situation s’explique par :
Ces préjugés ne sont pas fondés, tel est le constat de l’expérience, car le secteur privé a connu au cours de ces dernières années un développement spectaculaire. Cependant les banques, entrées elles aussi dans une concurrence plus acharnée, ont commencé à modifier leur stratégie vis à vis du secteur privé. La vie et le développement d’une entreprise dépendent beaucoup des prêts bancaires. Mais les entreprises qui s’implantent en milieu rural et les établissements de production des villages ne sont pas sur un pied d’égalité avec les entreprises situées dans des zones urbaines en termes d’accès aux prêts bancaires. Une enquête à deux volets menée par Ronnas Per (1998) a montré une meilleure résistance des entreprises urbaines par rapport aux entreprises rurales. Cette différence tient beaucoup aux difficultés d’accès au crédit de ces dernières. Selon le rapport JICA-MARD 2004, les ressources financières font défaut chez 80 % des villages artisanaux. La collection des matières premières, les investissements dans la rénovation de la technologie sont affectés, ce qui provoque d’autres impacts négatifs : faible qualité des produits, part de marché réduite… Selon les estimations de l’étude, la complexité des procédures administratives complexes fait que seuls 10 % des producteurs peuvent accéder au crédit. Une autre étude réalisée par l’HISEDS en 2004 révèle que les établissements de production dans les villages artisanaux utilisent les moyens financiers disponibles mais ces ressources ont tendance à se réduire. En effet, le taux des établissements utilisant leur capital propre est passé de 80 % en 1999 à 62 % en 2003, tandis que les fonds provenant d’autres canaux augmentent. Les prêts bancaires n’ont contribué que pour 10 % au budget des établissements en 1999 mais ce taux était de 25 % en 2003.
1999 | 2000 | 2001 | 2002 | 2003 | |
Capitaux disponibles | 80 | 79 | 69 | 65 | 62 |
Prêts concessionnels | 5 | 5 | 6 | 6 | 6 |
Prêts bancaires | 10 | 13 | 20 | 25 | 25 |
Autres sources | 5 | 3 | 5 | 4 | 7 |
Source : HISEDS (2004), Plan de développement et d’aménagement des villages artisanaux de la ville de Hanoï à 2010.
Selon une autre étude menée par le CIEM en 2003286 sur l’environnement des affaires en milieu rural, seuls 30 % des établissements de production ont accès aux prêts bancaires, le reste doit recourir aux moyens financiers disponibles. Les grandes entreprises peuvent accéder à des crédits hypothécaires importants. Mais les PME doivent se contenter de prêts modestes. Les entreprises enregistrées ont de meilleures conditions d’accès aux crédits que le secteur de « informel ».
Les ressources disponibles, les prêts bancaires ou les subventions des autorités locales constituent les principales sources de capitaux dont disposent les entreprises de Bát Trang. Il est étonnant de constater qu’un grand nombre de foyers et d’entreprises (dont les responsables ont été interviewés au cours de notre étude) ne pensent jamais à des prêts bancaires. Ils se contentent de leur propre capital. Cette pratique semble résulter de la persistance de coutumes en vigueur sous l’économie planifiée. Nous aborderons ce problème dans un autre chapitre287.
WEBSTER Leila, TAUSSIG Markus (1999), Vietnam under-sized engine: a survey of 95 larger private manufacturers, MPDF Private Sector Discussion Paper N°8, IFC, The World Bank.
Central Institute for Economic Management (Ministry of Plan and Investment). Site du CIEM : www.ciem.org.vn. Business environment in Vietnam rural areas: current situation and solutions, Le Xuan Ba, Chu Tien Quang (editors). – Hanoï: National Political Publisher, 2003
L’économie planifiée a fait naître chez de nombreux travailleurs une attitude de dépendance. Ils n’osent pas se lancer dans la production de créations audacieuses. Cette attitude persiste et régit l’orientation de leurs affaires.