1.3 La décentralisation politique

La décentralisation politique est un processus permettant une importante participation des habitants dans la planification des politiques de leurs localités. Les autorités locales (les élus) doivent donc assumer plus de responsabilités devant leurs habitants (Thanh Tu Anh et al. 2007), ce qui augmente la crédibilité politique du système politique local (Fritzen, 2002). Au Vietnam, ce processus se manifeste par deux grandes orientations : le renforcement de la compétence des organes législatifs et normatifs, de l'Assemblée nationale aux Comités populaires de tout niveau (Bring et al. 1998)317 et la réalisation de la démocratisation locale.

La démocratisation locale est visée par un certain nombre de textes officiels comme la directive n°30/1998/CT/TW du bureau politique du Parti Communiste, la Résolution n° 45/1998/NQ-UBTVQH10 du Comité permanent de l’Assemblée nationale et le décret gouvernemental n°29/1998/ND-CP du Gouvernement relatif au Règlement sur l’exercice de la démocratie locale au niveau des communes. Pour Nguyen Van Sau et Ho Van Thong (2005) ces textes sur la démocratie locale forment le fondement juridique permettant aux habitants de jouir de leurs droits, en présentant des candidats aux élections du Comité populaire des communes, en participant aux élections des chefs de leurs hameaux, en apportant leur avis sur le plan de développement socio-économique de leurs localités. Ces textes ont créé une plate-forme où les habitants peuvent s'exprimer et un pont reliant le Parti communiste, le Gouvernement à leurs citoyens.

Les habitants et responsables ont intégré cette évolution et des changements positifs de comportement – manifestant une prise de conscience et de responsabilité – ont été constatés. Les localités ont associé la réalisation de la démocratie locale aux objectifs de développement économique, social et culturel et de consolidation des infrastructures. Concernant le développement économique, les habitants peuvent donner leur avis sur plusieurs questions telles que le changement de la structure économique, le développement des métiers ou le transfert des technologies. Sur l'aspect social, la démocratie contribue considérablement à la mise en œuvre de diverses activités sociales, dont la lutte contre la pauvreté. Des résultats encourageants ont été obtenus : amélioration de l'environnement culturel et éducatif, réalisation réussie de politiques sociales et mesures d’aide aux personnes en difficulté.

Un autre impact positif de la réalisation de la démocratie locale réside dans le fait qu'elle contribue à la conciliation des conflits survenant dans la vie des habitants. Il est à souligner que l'un des principes les plus importants de cette démocratie locale est la transparence : strictement respectée, cette transparence favorise la résolution rapide, par des habitants eux-mêmes, des conflits. Selon les estimations, 75 % des conflits nécessitant l'intervention des autorités locales (au niveau des communes) sont résolus à l'amiable. La mise en œuvre de la démocratie locale est aussi un moyen de mobiliser la participation de tous à la lutte contre les fléaux sociaux.

Cependant, la réalisation de la démocratie locale a aussi des points faibles, notamment concernant la perception des compétences des fonctionnaires des communes. Fritzen (2002) cite par exemple le Programme n°135318 lancé en 1998, dans le cadre duquel les fonctionnaires des communes étaient jugés non compétents pour gérer des ressources financières accordées par le Gouvernement. La gestion de ce Programme a donc été attribuée à des districts et des provinces. Même après l'an 2000, alors que le Gouvernement avait décerné le rôle de chef de projet aux communes, peu de provinces le leur confiaient. Il faut reconnaître que les responsables des communes, influencés par le mécanisme « demandeur-donneur » (par lequel les responsables de niveau inférieur attendent des décisions de leurs supérieurs hiérarchiques), ont pendant longtemps dépendu de leurs supérieurs au niveau des districts et des provinces dans la recherche de solutions à de nombreux problèmes de leurs communes. Ceci explique de grandes différences dans les résultats obtenus bien que la démocratie locale soit – officiellement – mise en place dans 100 % des communes. Dans de nombreuses communes, cette mise en place n’a pas été réalisée de façon sérieuse, et elle ne favorise donc pas la participation des habitants dans la détermination du plan de développement local. (Nguyen Van Sau et Ho Van Thong, 2005)319.

Notes
317.

BRING, Ove et al. (1998), Viet Nam: Democracy and Human Rights, Sida,Stockholm.

318.

Programme d'assistance à la construction d’infrastructures dans des communes pauvres, particulièrement en difficulté, éloignées et reculées. Prime Minister’s Decision No. 135/1998/QD-TTg of July 31st, 1998 approving the socio-economic program for extremely difficult, deep-lying and remote communes.

319.

NGUYỄN Văn Sáu, HỒ Văn Thông (2005), Thể chế dân chủ và phát triển nông thôn Việt nam hiện nay [Démocratie et développement rural au Vietnam], Nxb Chính trị quốc gia , Hà nội.