1.3.1.4. Localisation des sources impliquée dans l’étude de la distinctivité

Les études réalisées avec des patients cérébro-lésées ont montré qu’une variété de régions cérébrales était responsables de la génération d’ondes P300. À ce sujet, il convient de différencier deux réponses électrophysiologiques distinctes de l’onde P300: P3a qui est obtenu lors de la présence des stimuli rares ou inattendus dans le matériel et P3b qui est obtenu par les tâches qui consistent à identifier une cible (task-relevant targets). Dans le cas de la distinctivité primaire, nous allons nous intéresser particulièrement à la P3a qui présente une distribution frontocentrale.

Selon Knight (1996), les lésions de l’hippocampe postérieur ainsi que de la jonction temporo-pariétale empêchent l’émergence du P300. Selon le même auteur, les patients avec des lésions unilatérales du cortex préfrontal dorsolatéral présentent les ondes P300 moins amples que les sujets contrôles.

En neuroimagerie, différentes études en IRMf ont montré que l’hippocampe ainsi que les cortex temporaux, préfrontaux et pariétaux contribuent à la génération de P3a (Kirino, Belger, Goldman-Rakic, & McCarthy, 2000 ; McCarthy, Luby, Gore, &Goldman-Rakic, 1997 ; Strange, Henson, Friston, & Dolan, 2000 ; d’après Michelon et Snyder, 2006). McCarthy et ses collègues ont utilisé un paradigme d’isolation dans laquelle le sujet devait répondre à des stimuli « X » rares versus des stimuli « O » fréquents. Les résultats ont montré que le gyrus frontal médianet les lobules pariétaux inférieurs, qui sont particulièrement impliqués dans des tâches de mémoire de travail, sont activés par la présence des cibles rares.

Dans une étude réalisée en IRMf3, Strange et al., (2000), s’intéressent particulièrement aux activations communes d’un paradigme « oddball » réalisé avec les matériaux sémantiques, émotionnels et perceptuels. En effet, les sujets devaient détecter un mot non relié sémantiquement aux autres mots; un mot chargé émotionnellement parmi d’autres mots et un mot écrit dans une police particulière parmi d’autres mots écrits dans une autre police. Indépendamment des modalités d’isolations, ils ont observé que deux régions s’activaient pendant la détection de l’item distinct : la région préfrontale droite et le lobe pariétal inférieur. L’isolation perceptuelle a par ailleurs activé les régions fusiformes bilatéralement alors que l’isolation émotionnelle a activé l’amygdale gauche, une région impliquée dans les processus émotionnels (pour une revue voir LeDoux, 2000). Finalement l’isolation sémantique a activé le cortex préfrontal gauche, une région associée au processus sémantique dans la littérature (Cabeza & Nyberg, 2000). La figure ci-dessous illustre les matériaux sémantiques, émotionnels et perceptuels.

Figure 5. L’exemple des matériaux sémantiques, émotionnels et perceptuels dans l’étude de Strange et
Figure 5. L’exemple des matériaux sémantiques, émotionnels et perceptuels dans l’étude de Strange et al., (2000)

De ce fait, Strange et al., (2000) proposent deux niveaux de réseau activés dès lors que le système nerveux est en présence d’un stimulus déviant ; un premier réseau qui détecterait la déviance quelle que soit sa modalité, qui implique le cortex préfrontal droit et les régions du cortex fusiforme bilatérales et un autre réseau qui traiterait l’information déviante selon sa modalité, et impliquerait les régions qui traitent ce genre de modalité (ici, sémantique, émotionnelle et perceptuelle).

Ainsi, d’après Michelon & Snyder (2006) les régions frontales auraient une fonction de « superviseur » de l’incongruité entre les attentes de l’organisme et la situation alors que les régions postérieures peuvent jouer un rôle pour le processus attentionnel et pour le fonctionnement de la mémoire de travail. L’activité hippocampique serait observée dès lors qu’il s’agit d’encoder des nouvelles associations de l’item incongru.

En conclusion, ces études ne nous informent pas davantage sur l’implication des sources citées plus haut dans le cas d’une récupération explicite versus implicite en mémoire des éléments distinctifs. Cependant, l’observation de l’activité hippocampique et des régions frontales selon Michelon & Snyder (2006) et Knight (1996) coïncide avec les conclusions des travaux effectués sur le mécanisme d’intégration des informations sensorielles que nous allons étudier lors du chapitre 3.

Notes
3.

IRMf : L’Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle est une application de l’imagerie par résonance magnétique à l’étude du fonctionnement du cerveau. Elle consiste à alterner des périodes d’activité avec des périodes de repos, tout en acquérant des images de l’intégralité du cerveau toutes les 3 secondes.