1.1.2 Méthode

Participants

Trente-six étudiants de l'Université Lumière Lyon 2, de langue maternelle française, ayant une vision normale (ou corrigée) ont participé à cette expérience. Aucun d'entre eux n'était familier avec les buts de l'expérience. Aucun d’entre eux n’était daltonien. La moyenne d’âge des participants, soit 25 femmes et 11 hommes, était de 22,5 ans.

Stimuli

Un ensemble de 100 mots a été utilisé. Ces mots ont été choisis en fonction de leur fréquence lexicale. Ils faisaient partie des 2000 premiers mots les plus fréquemment utilisés sur 48887 mots de la langue française selon la base de données Manulex(Lété, Sprenger-Charolles, & Colé, 2004). Ces mots étaient des noms communs de 4 à 7 lettres maximum. Nous avons évité, autant que possible, de sélectionner à la fois des mots et leurs voisins orthographiques en tant que stimuli expérimentaux. Nous avons considéré que deux mots étaient voisins lorsqu'ils partageaient les mêmes lettres à une près (Coltheart, Davelaar, Jonasson, & Besner, 1977), tels que les mots « épice » et « épine ». De plus, nous n'avons pas pris en compte les voisins adjectifs, participes passés ou pluriels, ni les mots homophones, homographes, ou homonymes. Tous ces mots sont relatifs à des « objets » physiques et n’ont donc qu’un seul sens concret. Nous avons particulièrement veillé à ce que le genre des mots, la distinction des mots en lien avec les catégories vivant / non-vivant, ainsi que la répartition de la couleur pour marquer la différence contextuelle soient présentés en nombre équitable. Ces variables ne rentreront pas en compte dans l’analyse.

La distinctivité manipulée

La totalité des mots étaient écrits en police « Chicago », de taille 48, en minuscule, de couleur blanche. Pour ne pas fatiguer les yeux et maintenir l’attention des sujets, le fond d’écran était noir. Les contextes d’encodage rare et fréquent étaient représentés par des cadres rouges ou jaunes tandis que la condition sans contexte (qui existe uniquement en phase test) correspond à une absence de cadre. Il s’agit donc ici d’un contexte extrinsèque, c’est-à-dire qu’il est totalement indépendant du mot lui-même. Les différentes conditions contextuelles de la phase test sont illustrées dans la figure ci-dessous :

Figure 10. L’illustration des conditions expérimentales utilisées dans l’expérience 1.
Figure 10. L’illustration des conditions expérimentales utilisées dans l’expérience 1.

Procédure expérimentale

Chaque participant était testé individuellement. Au début de la session, il s'installait devant un ordinateur (Macintosh eMAC G4). L'expérience a été programmée sur le logiciel  PsyScope (Cohen, McWhinney, Flatt, & Provost, 1993).

Les passations se sont déroulées dans une salle d’expérimentation insonorisée du laboratoire d’Étude des Mécanismes Cognitifs (EMC) de l’université Lumière Lyon 2. Après avoir rempli un formulaire de consentement, il s’installait devant un ordinateur à environ 50 cm de l’écran. Nous avons utilisé une mentonnière pour permettre de maintenir constante cette distance pendant l’expérience.

Les participants avaient pour consigne d'indiquer le plus rapidement et le plus précisément possible, si le mot présenté était un mot masculin ou féminin. Ils donnaient leur réponse en appuyant avec les index de leurs mains sur les touches « x » et « . » du clavier (respectivement libellées -Mas- pour signifier qu'il s'agissait d'un mot masculin et -Fém- pour signifier qu'il s'agissait d'un mot féminin). L'ordinateur enregistrait les temps de réponse des sujets, c'est-à-dire le temps qui s'écoulait entre le moment où l’item apparaissait à l'écran et le moment où le sujet appuyait sur une touche du clavier. La qualité de la réponse était également enregistrée.

La passation durait environ 30 minutes, avec trois phases : une phase d’encodage incident, une phase distractrice, et finalement une phase test. Dans la phase d’encodage comme dans la phase test, un essai était composé des événements suivants : un point de fixation était présenté pendant 1000 ms, immédiatement suivi d’un mot qui restait affiché à l’écran pendant 1500 ms, même en cas de réponse. L’intervalle inter-essais était de1000ms. Tous les stimuli étaient présentés au centre de l'écran. La luminosité et le contraste étaient maintenus constants dans chaque condition expérimentale et pour tous les sujets. Le déroulement d’un essai est représenté dans la figure ci-dessous.

Figure 11. Déroulement d’un essai.
Figure 11. Déroulement d’un essai.

Entre la phase d’encodage et la phase test, nous avons mis en place une tâche distractrice qui se composait d’une succession de calculs mentaux de 5 à 10 minutes selon la rapidité des sujets. Notre but était de distraire les sujets en leur demandant d’effectuer une tâche ne faisant intervenir ni des mots ni de la catégorisation pour éliminer au maximum la répétition des items vus précédemment.

Plan expérimental

Phase d’Encodage Incident

100 mots répétés deux fois ont été présentés aux sujets dans la phase d’encodage. 24 mots ont été présentés avec un cadre d’une couleur spécifique (soit jaune soit rouge), et 76 mots ont été présentés dans un cadre de l’autre couleur (rouge ou jaune). Les premiers appartenaient à la condition que nous appellerons « contexte rare », et les seconds à la condition  « contexte fréquent ». Parmi les 76 mots en contexte fréquent, seuls 24 mots seront utilisés par la suite dans la phase test (donc les 52 mots restant n’étaient que des distracteurs destinés à rendre le contexte fréquent). Au total, le contexte « fréquent» est donc 3 fois plus présent dans la phase d’encodage que le contexte « rare». C’est ainsi que nous avons formé nos catégories expérimentales pour la phase d’encodage.

Nous avons construit différentes listes afin de contrebalancer les items dans les différentes conditions expérimentales : ainsi les mots présentés en contexte rare pour la moitié des sujets se trouvaient en contexte fréquent pour l’autre moitié. De plus, les mots présentés en contexte rare étaient présentés en rouge pour la moitié des sujets et en jaune pour l’autre moitié (et réciproquement pour le contexte fréquent). Ceci nous a permis d’avoir au final 4 listes pour la phase d’encodage.

Phase Test

48 mots ont été choisis parmi les mots présentés en phase d’encodage. Ces 48 mots étaient répartis dans 3 conditions expérimentales : dans la condition « contexte identique », les mots choisis étaient présentés dans le même contexte que lors de l’encodage, c’est-à-dire avec le cadre de même couleur. Dans la condition « contexte différent», les mots étaient présentés dans le cadre de couleur différente que celle de l’encodage. Finalement, dans la condition « sans contexte», quelle que soit la couleur des cadres à l’encodage, les mots de cette condition étaient présentés sans cadre.

Nous avons également effectué un contre balancement pour les listes en test. En effet, les mots qui se trouvaient dans la condition contexte test identique pour 1/3 des sujets se retrouvaient dans la condition contexte test différent pour un autre tiers, et dans la condition sans contexte pour le dernier tiers. Ainsi les blocs de mots changeaient trois fois de conditions. Étant donné que pendant la phase d’encodage, il y avait 4 listes d’encodage, cela impliquait donc au total 12 listes expérimentales.

Le plan expérimental, représenté dans la figure ci-dessous, était le suivant : S36*E2*T3, avec :

Figure 12. Illustration du plan expérimental dans l’expérience 1.
Figure 12. Illustration du plan expérimental dans l’expérience 1.