7-5 La France touchée : l’assassinat de Dulcie September

Le 29 mars 1988, Dulcie September584, représentante de l’ANC à Paris, est assassinée sur le palier de son bureau au 28 de la rue des Petites écuries. Son assassinat a suscité une forte émotion dans les milieux français de gauche et plus particulièrement au sein du Parti communiste qui réagit violemment en invoquant la responsabilité du gouvernement français :

‘« Le président de la République et le premier ministre ont le sang de Dulcie September sur les mains pour n’avoir pas rompu avec le régime sud-africain 585  ».’

Un jour plus tard, La Croix rend compte de l’avancée de l’enquête qui parle de l’œuvre d’un professionnel586, alors qu’un article de Réforme rappelle les liens étroits de Dulcie September avec le parti communiste et s’interroge :

‘« Cet assassinat serait-il le résultat de « dissensions internes » entre le courant nationaliste et le courant communiste de l’ANC ? […] Dans une déclaration diffusée par l’ambassade d’Afrique du Sud à Paris, le ministre des Affaires étrangères a déclaré que le gouvernement de Pretoria « ne pouvait être tenu pour responsable de cette mort ». Reste que le gouvernement de M. Botha ne s’est jamais caché de prendre l’ANC comme cible privilégiée 587  ». ’

Un éclairage sur les auteurs de la mort de Dulcie September est donné dans La Croix 588 en février 1990. Le capitaine Coetzee, sentant sous doute venir à grand pas la fin du régime d’apartheid et estimant que le temps où il faudra rendre des comptes approche, révèle que ce sont bien les « commandos de la mort », section spéciale de la police sud-africaine qui ont organisé l’assassinat. Il semblerait même que l’auteur des coups de feu soit un homme du mercenaire français Bob Denard. Paskal Chelet reste cependant interrogative sur ce point.

La mort de l’opposante Dulcie September, sans doute parce qu’elle se passe à Paris et non pas à l’autre bout du monde, provoqua un véritable électrochoc chez les Français, rendant responsable le gouvernement de Pretoria de la mort d’une militante, et réagissant par une manifestation massive (2000 à 3000 personnes) organisée à l’appel du parti communiste français.

Notes
584.

Dulcie September était la représentante de l’ANC pour la France, le Luxembourg et la Suisse depuis 1984. D’origine métisse, née en 1943, elle avait été bannie d’Afrique du Sud en 1963 à cause de son appartenance au parti communiste.

585.

« La représentante de l’ANC assassinée à Paris », La Croix, 30 mars 1988, p. 5.

586.

Yves PITETTE, « L’apartheid qui tue », La Croix, 31 mars 1988, p. 1-4.

587.

« L’apartheid ensanglanté », Réforme, 2 avril 1988, p. 10.

588.

Paskal CHELET, « Les révélations du Capitaine Coetzee », La Croix, 7 février 1990, p. 5.