L’intérêt du CCFD pour les questions d’éducation

A la veille de la libération de Nelson Mandela et alors que se profile l’espoir de voir instaurer un régime démocratique et la possibilité d’une société enfin multiraciale, Faim et développement consacre un long article à l’état du système scolaire proposé aux Noirs :

‘« La situation scolaire des Noirs est très difficile. L’Etat dépense six fois moins pour un écolier noir que pour un Blanc, bien que les premiers soient cinq fois plus nombreux. Les cours sont dispensés dans la langue vernaculaire pendant les quatre premières années, puis en anglais1362 ».’

La question de l’accès à l’éducation pour tous étant prioritaire au CCFD, il n’est pas étonnant qu’un article informe des inégalités dont sont victimes les jeunes noirs sud-africains au sein des écoles et des universités. L’article rapporte ainsi longuement les actions de l’association SACHED, soutenue par le CCFD, et qui œuvre pour proposer des cours, des livres de classe, des formations aux Noirs sud-africains qui ne peuvent pas bénéficier d’un système éducatif valable1363.

Ce « survol » de quelques articles parus dans la revue Faim et développement depuis le milieu des années 70 jusqu'au début des années 90 permet d’avoir un aperçu de l’information délivrée et des points privilégiés pour présenter aux lecteurs la situation dans laquelle est l’Afrique du Sud. Les fondements historiques et idéologiques de l’apartheid sont finalement assez peu rappelés (ou très rapidement), tout comme les conséquences des lois de l’apartheid sur le quotidien des populations noires (l’article de Jacques Maire étant une exception). Par contre, les effets du « grand apartheid » (formation des bantoustans, travail migrant des hommes, terres improductives…) font plus souvent l’objet d’articles. Ainsi, très tôt, les observateurs au sein du CCFD privilégient la nature économique du système en mettant en évidence qu’une telle supercherie vise à une exploitation de la main d’œuvre noire. Avant que n’éclatent les émeutes de Soweto, il est déjà compris qu’une telle situation ne peut mener qu’à un état d’extrême violence. A ce titre, la lutte menée par les mouvements de libération est comprise, même si elle n’est pas explicitement défendue.

A début des années 80, le CCFD se positionne plus ou moins nettement pour l’adoption de sanctions économiques, perçues comme un moyen efficace d’affaiblir la puissance du régime de Pretoria. Comme cela fut le cas souvent dans les organes de presse, les relations économiques et commerciales que la France entretient avec l’Afrique du Sud sont condamnées et présentées comme étant parfaitement honteuses.

Enfin, le CCFD met en évidence, à plusieurs reprises, la répression qui porte atteinte aux organismes et militants anti-apartheid, particulièrement ceux issus des Eglises chrétiennes. Le Comité y sera particulièrement sensibilisée lorsque cette violence institutionnalisée sapera le travail d’associations, organes de presse qui sont soutenus par lui.

Si la nécessité de s’informer lui apparaît comme première, le CCFD insiste aussi sur celle d’agir, que ce soit en propageant cette information, en se rapprochant du CAO pour militer plus activement, ou en participant financièrement aux actions entreprises en son sein du CCFD. Ces actions vont s’élaborer au cours des années 80 et prendre différentes orientations. La première d’entre elles visera à établir des relations avec différents acteurs sud-africains, chrétiens ou non, créant ainsi un véritable « réseau » liant les mobilisations exprimées dans les deux pays et surtout, offrant une « tribune » à certains de ces acteurs en visite en France.

Notes
1362.

Nathalie PREVOT, « une école pour tous au pays de l’apartheid », Faim et développement, n°66, février 1990.

1363.

Je reviendrai sur les objectifs et les actions de cette association sud-africaine dans la partie consacrée aux projets du CCFD en Afrique du Sud.