Un dossier, symbole d’une prise de conscience en France

Ne se limitant pas à l’exposé des prises de position exprimées au sein des Eglises chrétiennes, la démarche de Joseph Limagne fut de dresser un tableau complet de la situation (exposé historique, présentation de la mentalité afrikaner, justification religieuse du système, rencontre avec des personnalités afrikaners…). Elle révèle une volonté d’échapper à un manichéisme trop simpliste qu’il était courant de rencontrer à cette époque. Joseph Limagne évite donc la dénonciation caricaturale tout en parvenant à faire une critique totale de tous les effets du système, en insistant sur le but ultime de l’apartheid, l’exploitation d’une main d’œuvre noire.

Enfin, le témoignage de Joseph Limagne, 30 ans après qu’il ait effectué son reportage, permet de mieux évaluer la difficulté que pouvait rencontrer un journaliste désirant travailler sur l’Afrique du Sud : difficultés à obtenir un visa, « surveillance » plus ou moins constante dans le pays, contrôle de l’information, difficulté pour rencontrer des témoins dans un contexte d’extrême répression…

J’ai en tous cas pu comprendre, d’un point de vue plus sensible qu’intellectuel, que Joseph Limagne a été transformé et bouleversé par cette expérience sud-africaine, expérience qu’il renouvellera en 1994, toujours en tant que journaliste, au moment des premières élections démocratiques que connaîtra le pays.

Si l’implication de Joseph Limagne vis-à-vis de l’Afrique du Sud fut ponctuelle, d’autres personnalités, au titre de leur appartenance à une confession religieuse et de leur engagement dans le champ social, s’engagèrent à plus long terme dans le pays. Jean-Marie Dumortier, au titre de son appartenance à la JOC française, fut l’un d’eux.