Chapitre VIII : Pour l’Eglise réformée française, la question sud-africaine comme une « épine dans le pied1737 »

La question sud-africaine a occupé une place particulière chez les réformés français pour des raisons déjà évoquées notamment dans la première partie de cette thèse. Je reviendrai ici sur la notion de responsabilité des réformés français qui est apparue particulièrement lorsqu’il s’agit d’évoquer et d’établir des liens avec les « frères » d’Afrique du Sud.

La question conduisit également les réformés français à se questionner sur les liens qu’ils entretiennent avec le Conseil œcuménique des Eglises. En effet, la mobilisation du COE concernant la situation raciale en Afrique du Sud fut réelle, notamment en matière économique et financière, par l’intermédiaire d’une série d’actions en direction des banques ayant des intérêts en Afrique du Sud1738. Elle le fut aussi au sein du Programme de Lutte contre le Racisme créé en 1968. Les réformés français répercutèrent régulièrement l’évolution du programme et les aides apportées à l’Afrique du Sud par son intermédiaire. Il s’agira ici d’étudier les interrogations de certains réformés face à l’option du COE.

La commémoration du 10ème anniversaire des émeutes de Soweto en juin 1986 a ainsi permis de voir l’adhésion toute relative des fidèles chrétiens à l’événement, organisé par le SACC et relayé par le COE. La dernière partie de ce chapitre sera consacrée à l’étude de deux voix réformées françaises, témoignages de courants multiples au sein du protestantisme français. La première voix réformée, celle du pasteur Frédéric Albrecht, émane de l’ACFA (Amis français des communautés sud-africaines) et livre un regard à contre-courant de celui le plus souvent répercuté concernant l’Afrique du Sud. L’autre voix, s’exprimant dans deux articles majeurs de Réforme en 1986, est celle de Jacques Ellul, dont les positions, contraires sur plusieurs points à celles des membres du groupe racisme de la CSEI, suscitèrent des réactions animées de ces derniers, réagissant ainsi aux questions notamment idéologiques évoquées par Jacques Ellul.

Notes
1737.

Expression utilisée par Ariane BONZON : « Les protestants français et l’apartheid : une épine dans le pied ? », Réforme, 21 juin 1986.

1738.

La presse réformée va régulièrement rendre compte de la mobilisation du COE sur la question des banques. Voir par exemple « Le COE, les Eglises, l’apartheid », Réforme, 24 octobre 1981 ; « Sud de l’Afrique : les combats de la liberté et de la dignité », Le christianisme au XXème siècle, n°37, 5 octobre 1981, p. 3.