2 Les réformés français et leur relation avec le COE : adhésion et tensions autour du Programme de Lutte contre le Racisme (PLR) et questions autour de la légitimité du recours à la violence

2-1 L’évocation du Programme de Lutte contre le Racisme dans la presse

La presse réformée française fait régulièrement référence à la mobilisation et aux prises de position de Conseil œcuménique des Eglises vis-à-vis de la question sud-africaine. Cette mobilisation prit place dans un mouvement plus vaste de positionnements et de déclarations du COE concernant la question du racisme, et ceci dès le début des années 601779.

Les réformés français réunis au sein du groupe Racisme de la Commission sociale, économique internationale (CSEI) publient, eux aussi, dans le dossier qu’ils font paraître en 1974, un long article retraçant l’historique du Programme de Lutte contre le Racisme. L’auteur de la partie du dossier consacrée à cette question est le sociologue hollandais Baldwin Sjollema1780, directeur du Programme de Lutte contre le Racisme.

Avant la création du Programme, diverses déclarations du Comité central du COE témoignent déjà de la nécessité pour le Conseil de prendre en compte l’aspect moral de la question raciale dans les conflits mondiaux :

‘« Dans leurs déclarations, les Eglises insistaient sur le fait que « toute forme de ségrégation fondée sur des considérations de race, de couleur et d’origine ethnique est contraire à l’Evangile » (déclaration officielle de l’Assemblée du COE à Evanston (USA) en 1954), mais elles refusaient en même temps les implications nécessaires de la position qu’elles prenaient de ce fait, car elles agissaient plutôt au nom d’une morale qui soutenait les intérêt du pouvoir occidental dominant, lequel n’était prêt à accepter aucune modification radicale des relations de pouvoir existantes1781 ».’

La mobilisation devient plus concrète lors de l’Assemblée du Comité du COE à Uppsala (1968). La déclaration finale présente le racisme comme une violation de la foi chrétienne et attire l’attention sur l’entrelacement du racisme avec l’économie et la politique, et en déduit la nécessité d’aider les victimes du racisme avec, en vue, un changement des structures économiques et politiques existantes pour pouvoir garantir la même participation de tous dans ces domaines. Le « programme antiraciste » du COE (Program to Combat Racism, PCR) est approuvé par le Comité central à Cantorbéry en août 1969, « ayant pour objectif d’élever le niveau de conscience de ceux qui sont opprimés du point de vue racial et d’affermir leurs possibilités d’organisation 1782 ».

Le Programme de Lutte contre le Racisme (PLR) entre en vigueur en janvier 1970, mettant l’accent sur différents points :

  • Le combat contre le racisme blanc.
  • La nécessité de mettre en question le racisme institutionnalisé tel qu’il se reflète dans les structures sociales, économiques et politiques du pouvoir.
  • La lutte contre le racisme qui doit impliquer une redistribution du pouvoir social, économique, politique et culturel.
  • La nécessité d’analyser et d’éliminer « la complicité des Eglises qui tirent profit du racisme blanc et le perpétue. C’est là une priorité absolue si les Eglises veulent contribuer à résoudre le problème du racisme blanc dans la société 1783».
Notes
1779.

Les programmes antiracistes du COE sont décrits dans : « Le racisme et les Eglises chrétiennes », Concilium, n°171, 1982.

1780.

Le propos est reproduit en partie dans « Racisme », le christianisme au XXème siècle, n°6, 6 février 1975, p. 3.

1781.

Baldwin Sjollema, « Lutte contre le racisme du COE », dossier n°1 du groupe Racisme de la CSEI, 1974, p. 19.

1782.

« Le racisme et les Eglises chrétiennes » (1982), Concilium, op.cit.

Pour un historique des déclarations du COE en rapport avec la question raciale, voir également  Breaking down the walls : statements and actions on racism (1948-1985), World Council of churches, 1980, 107p. (2ème édition d’une brochure publiée en 1980 en préparation à la consultation mondiale : Les Eglises répondent au racisme (Netherlands)

1783.

Ibid.