Le fonctionnement, les objectifs

Le Programme crée un Fonds spécial qui lui permet d’accorder son appui à différents groupes et organisations parmi les groupes d’opprimés et les organisations venant en aide aux victimes de l’injustice raciale :

‘« Il a voué une attention particulière aux luttes de libération en Afrique australe. Il a distribué à ce jour 1,5 million de dollars à divers groupes de toutes les régions du globe, contre la garantie que ces sommes seraient utilisées dans un but humanitaire, conforme aux objectifs et à la ligne d’action du COE1784 ».’

Est donc énoncée clairement la volonté de venir en aide à des programmes humanitaires menées par les Eglises et non à la lutte de nature politique des mouvements de libération. Il s’agit surtout de favoriser un dialogue qui seul permettra une action efficace de la part d’un organisme d’Eglises :

‘« L’un des rôles les plus importants du PLR a été de créer des possibilités de contact, de discussion et de dialogue avec les chefs des groupes opprimés. Souvent les chefs d’Eglises responsables entretiennent un dialogue avec les chefs de ces mouvements de libération. Le PLR a facilité ce dialogue persuadé qu’il est que cette fonction fait partie intégrante d’un programme de la justice raciale. Ceci revêt une importance particulière puisque de nombreux chefs de mouvements de libération ont reçu une éducation chrétienne1785 ».’

Il semble donc nécessaire à Baldwin Sjollema de rappeler que la prise de contact avec les chefs de mouvements de libération fait partie intégrante d’un programme visant à aider des peuples victimes du racisme1786.

Il termine son exposé en mettant en évidence les débats nés dans les Eglises, pas seulement en France mais au sein de certaines Eglises en Occident. Le propos est clairement de démontrer la légitimité d’un tel programme au sein du COE :

‘« Le PLR a subi des attaques de la part d’un certain nombre d’Eglises ou de certains secteurs d’Eglises, mais la seule question qu’il est logique de se poser est celle de savoir si le COE est disposé à se mettre au service de la fraction de ses Eglises-membres dont le PLR cherche à exprimer les aspirations : les victimes de l’oppression raciale 1787».’

L’objectif du Programme implique d’avoir une « vision de la communauté mondiale où non seulement toutes les races, mais également toutes les nations ont la part qui leur revient ; une société internationale responsable dans laquelle chaque élément a la possibilité d’être lui-même et de vivre selon sa propre identité 1788  ».

Dans l’ouvrage La France et l’apartheid (1978), Baldwin Sjollema rappelle la mission évangélique de l’Eglise en matière de racisme :

‘« Les Eglises ont indiqué leur forte conviction que la ségrégation sous toutes ses formes est contraire à l’Evangile, qu’elle est incompatible avec la doctrine chrétienne de l’homme et avec la nature de l’Eglise du Christ. Le deuxième concile du Vatican et les grandes assemblées du Conseil œcuménique des Eglises ont adjuré leurs membres de renoncer à toute forme de racisme ou de discrimination et de travailler à les abolir dans leur propre sein comme dans la société1789 ».’

La presse réformée rend compte de la mise en place du Programme de Lutte contre le Racisme en précisant bien qu’une telle entreprise révèle un passage à l’acte des Eglises dans leur soutien à l’Afrique du Sud, tout en précisant la nature d’un tel soutien :

‘« Le COE a décidé de passer aux actes, c’est à dire de soutenir financièrement les mouvements de résistance au racisme établi […]. Soutien symbolique assurément. Qu’est ce que 200 000 dollars pour l’ensemble des mouvements antiracistes (dont 120 000 pour l’Afrique australe), mais pas décisif dans l’engagement qui entend ne pas demeurer indéfiniment platonique et se borner à souligner et à répéter des déclarations comme celle d’Evanston : « La ségrégation sous toutes ses formes est contraire à l’Evangile. Elle est incompatible avec la doctrine chrétienne de l’homme et avec la nature de l’Eglise. L’Assemblée adjure les Eglises membres de travailler à l’abolir dans leur propre sein comme dans la société ». Que signifie cette adjuration, si l’on refuse d’aider ceux qui lui obéissent1790 ».’

En octobre 1979, Le christianisme au XXème siècle, à l’occasion d’une nouvelle allocation de dons (349 000 dollars répartis entre 33 groupes et organisation du monde), rappelle que les fonds sont « alimentés par des dons et des revenus donnés à cet effet. Les ressources du fonds viennent d’Eglises, de groupes, et de particuliers 1791».

Notes
1784.

« Le programme de lutte contre le racisme… » (1974), op.cit., p. 20.

1785.

Ibid.

1786.

En 1970, des organisations comme la SWAPO, le PAC et l’ANC furent soutenues financièrement par le « Fonds spécial de lutte contre le racisme ». L’ANC, pour sa part, reçu 10 000 dollars « à titre d’aide à son travail d’information de l’opinion mondiale » in A.M GOGUEL et P. BUIS : Chrétiens d’Afrique du Sud face à l’apartheid », Paris, L’Harmattan, 1979, p. 72.

1787.

« Le programme de lutte contre le racisme… » (1974), op.cit., p. 21.

1788.

« Le programme de lutte contre le racisme… » (1974), op.cit., p. 22.

1789.

La France et l’apartheid, Paris, L’Harmattan, 1978, p. 208.

1790.

« Apartheid : la voie du COE », Réforme, 21 novembre 1970.

1791.

« 7 nouvelles organisations reçoivent pour la première fois un don spécial de Programme de Lutte contre le Racisme (PLR) », Christianisme au XXème siècle, n°41, 29 octobre 1979, p. 3.