b.2 Le programme des études et ses transformations

b.2-1 Catéchisme gallican ou théologie thomiste, scolastique ou pastorale ?

‘« Dans la caisse de livres qui fut envoyée il y a quelques temps de Lyon pour les élèves de Pinang, il y avait plusieurs exemplaires de l’Homo Apostolicus du bienheureux Liguori : nous jugeâmes que cet ouvrage était au-dessus de la portée des élèves et nous le mîmes de côté. 1370  . »

Qu’enseignait-on aux élèves de Penang ? La encore, les sources sont surabondantes : aux procès-verbaux, aux règlements, aux coutumiers, à la correspondance des Pères s’ajoutent divers plans de réforme des études. À partir des années 1880-1890, le nombre d’élèves diminuant et celui des séminaires locaux augmentant, l’utilité du Collège général fut remise en cause. Progressivement, l’on s’achemina vers sa transformation en grand séminaire sur le modèle romain. Je distinguerai, par conséquent, deux périodes dans l’évolution des programmes d’enseignement, avant et après 1880. Les programmes, tout au long de l’existence du Collège général, comportent la formation théologique et la formation générale. La formation théologique, tout d’abord. Pendant les premières décennies de l’installation du Collège en Malaisie, les programmes ne diffèrent pratiquement pas de ceux en vigueur aux siècles précédents :

‘ On apprendra à lire et à écrire aux premiers et on les instruira plus ou moins suivant leur talent et leur portée. On leur apprendra toutes les parties de la doctrine chrétienne comme s’ils n’en avaient aucune teinture. On leur fera deux conférences toutes les semaines, l’une sur l’évangile, l’autre sur l’oraison. Ceux qui seront plus avancés en âge apprendront à expliquer le Nouveau testament et quelques livres latins faciles à entendre qui traitent des quatre parties de la doctrine chrétienne. Ceux qui n’auront que fort peu de temps apprendront seulement à expliquer les principales parties de la messe et particulièrement le canon, comme aussi les formes des sacrements et on les instruira autant qu’il sera nécessaire des cérémonies, du missel, du bréviaire et du rituel1371.’

En 1740, Pierre Lacère, professeur au Collège général de Mahapram, décrivant le déroulement d’une journée, cite plusieurs auteurs : Fleury, Érasme et Baronius1372 :

‘Il me reste icy dix-neuf écoliers qui étudient, partie les humanistes, partie apprennent à lire et à écrire, instruits par moy-même les uns et les autres et fais pour cela quatre classes par jour ; nous nous levons à cinq heures, au quart nous récitons prime, ensuite nous méditons jusqu’à six heures. À six heures un quart je célèbre la Sainte messe, ensuite les écoliers étudient et apprennent par cœur quelque chose de l’écriture sainte, les grands apprennent cinq versets, les petits deux ; ensuite vient le déjeuner en commun. À 7 heures trois quart, je fais réciter les dits versets, en explique le sens littéral seulement et fais réciter cette explication ; à huit heures, la classe jusqu’à onze heures et demy ; cette classe consiste à étudier la moitié d’un chapitre du grand cathéchisme historique de M. Fleury, traduit en latin par M. Le Maire et quelque chose de quelque auteur. Je leur fais voir Érasme corrigé, à 10 heures j’entre en classe, je fais réciter et expliquer et corriger leur composition qui n’est autre que le dit cathéchisme qu’ils mettent en un autre latin. Depuis onze heures jusqu’à l’à demie ils composent. J’employe cette dernière demie heure à faire l’école aux petits qui depuis huit heures jusqu’à onze heures ont été occupés à écrire, lire ou apprendre par cœur. À onze heures et demy ce sont deux classes de chant jusqu’à midy. À midi nous dînons tandis qu’on fait la lecture. Après un chapitre de l’écriture Sainte, je fais lire, faute d’autre livre qui soit à la portée des élèves, je fais lire dis-je l’Abrégé de Baronius1373 .

Le choix de ces auteurs est nettement influencé par les traditions humanistes et gallicanes. Seul Fleury, – auteur en 1725 d’un essai sur les « libertés de l’Église Gallicane » ouvrage qui, de même que son Catéchisme historique (1679), fut mis à l’index –, était encore utilisé à Penang vers 1830 (le Catéchisme historique est d’ailleurs répertorié dans la bibliothèque). Ici, la méthode pédagogique repose essentiellement sur la mémorisation et la copie. En 1780, Mgr Pottier préconise, en ce qui le concerne, l’étude de la théologie – en insistant sur la morale –, de la logique et de la métaphysique, qui forment les esprits ; pour le dogme, le catéchisme du concile de Trente et l’Écriture sainte suffisent ; enfin, il souhaite que les élèves connaissent les décrets de la Sacrée Congrégation de la Propagande :

‘Qu’on leur donne ensuite une espèce de logique pour rectifier leur jugement ; qu’on s’attache à leur expliquer le Catéchisme du concile de Trente avec tout au plus un autre traité abrégé pour les instruire sur le dogme ; qu’après cela on donne tout le temps à l’étude et à l’exercice de la morale, dans laquelle on ferait entrer toutes les décisions de la Sacrée Congrégation qu’on pourrait ramasser, nous aurions par ce moyen de savants missionnaires. L’étude de l’Écriture Sainte qu’on leur expliquerait avec l’idée juste des différentes matières, et au moyen de preuves dont on doit se servir pour instruire les fidèles, qu’on composerait exprès pour eux et qu’on leur ferait apprendre en latin et exercer au Collège quand ils seraient déjà avancés, en ferait d’excellents prédicateurs1374 .

Le règlement des élèves de 1848 ne mentionne presque aucune des matières étudiées, sauf les dimanches et jours fériés ordinaires ; les séances de travail scolaire sont alors plus courtes, une demi-heure le matin, une explication de l’Écriture sainte l’après-midi, pendant une heure1375. Pendant la semaine, les directeurs du Collège de Penang s’inspirent directement des anciens règlements. Lors de conférences, on explique aux élèves le Nouveau Testament et les fondements de la doctrine chrétienne au moyen de catéchismes. Les procès verbaux sont heureusement plus précis : « Distribution des charges : M. Tisserand est chargé d’un cours de théologie dogmatique, d’un cours de latin, du petit catéchisme, du catéchisme annamite. M. Jourdain est chargé d’un cours de théologie morale, du catéchisme du concile de Trente, d’un court d’écrit 1376 . » Le catéchisme du concile de Trente est l’un des piliers de la formation religieuse à Penang. Non seulement les élèves l’étudient, mais ils le recopient et en reçoivent un exemplaire à l’issue de leur formation :

‘Mgr Lefebvre vic. apost. de la Cochinchine occidentale qui demande 10 élèves et désire que désormais tous ses sujets soient à leur départ munis, outre le dictionnaire annamite, le documenta rationis et les autres livres que le Collège fournit, d’un catéchisme du concile de Trente1377 .

Bien entendu, ce catéchisme est en latin. Or, les élèves ne sont pas tous en mesure de le comprendre. Aussi les directeurs utilisent-ils des catéchismes en langues vernaculaires, dont ils sont parfois eux-mêmes les auteurs, à l’instar de Jean Pupier et de son catéchisme en malais :

‘On a réglé encore que dorénavant, le catéchisme du S. concile de Trente serait expliqué pendant une partie de l’année par les élèves de la classe de latin […] M. Delpech a été chargé d’un sermon à faire tous les dimanches, tantôt en latin, tantôt en annamite ; il est en outre chargé du catéchisme annamite le dimanche soir1378.’

Toutefois, à partir de 1869, cette pratique est abandonnée :

‘Quant au catéchisme, voici les décisions qui ont été adoptées. Les catéchismes en langues étrangères sont supprimés et les élèves qui assistaient aux catéchismes seront partagés en deux cours, dont l’un placé sous la direction du P. Wallays comprendra le 4e et le 3e cours de latin et l’autre placé sous la direction du P. Laigre comprendra les élèves des deux premiers cours de latin1379 .

En mai 1876, les directeurs rédigent eux-mêmes un catéchisme latin : « Le Conseil s’est occupé de la rédaction du catéchisme latin 1380. »Mais en 1883, nouveau revirement : « Le Conseil ayant à cœur que les élèves n’oublient pas ici la lettre du catéchisme de leur mission décide que dans toutes les classes de caractère on fera réciter périodiquement le texte même du catéchisme en langue indigène 1381 . » Nous trouvons ici une illustration de la nécessité d’entretenir la connaissance des langues maternelles, pour préparer les élèves à la prédication. Ne lisait-on que le catéchisme du concile de Trente ? D’autres catéchismes figurent dans l’inventaire après décès des livres de François Régereau (1843) : le Petit catéchisme historique de Fleury, le Catéchisme abrégé de Couturier, un Catéchisme des dimanches et des fêtes, une Méthode pratique pour faire le catéchisme, le catéchisme de Montpellier (Charancy), un Catéchisme des fêtes de Meusy, une Explication du nouveau catéchisme à l’usage du Mans et enfin le Catéchisme de Guillois, que j’ai déjà signalé à propos de ses conceptions sur la « dégradation » des sociétés indigènes1382. Dans sa réponse au questionnaire de la Propaganda Fide, en 1870, Mgr Boucho mentionne à la fois les catéchismes du concile de Trente et de Guillois. Ce dernier a semble-t-il concurrencé celui du concile de Trente au tournant des années 1850-1860. Mgr Boucho apporte également une intéressante précision quant aux traductions en usage dans son vicariat :

‘7° Du catéchisme, s’il est pur de toute erreur et s’il y a conformité entre les divers catéchisme du vicariat ? Nous avons cinq différents catéchismes : anglais, malais, chinois, portugais et malabare. Ils sont exempts d’erreur. Le catéchisme chinois est le même qu’au Sut Chuen ; le catéchisme malabare est le même qu’à Pondichéry. Les catéchismes anglais et malais sont la traduction l’un de l’autre.’

L’étude de l’Écriture sainte est orale. Elle consiste notamment en « explications sur les principales difficultés de l’ancien testament. » et en lecture et méditation du nouveau testament.Lorsque les étudiants sont assez avancés, ils abordent la théologie. En 1820, une lettre de Mgr Florens donne une information précieuse à ce sujet : « Quant au spirituel, je vois que les prières et les études se font fort exactement. On enseigne la théologie d’Antoine 1383 » Plus tard, le rapport de Mgr Boucho donne plusieurs auteurs :

‘Voici les études que l’on fait dans ce séminaire : elles embrassent l’enseignement de la théologie, de la philosophie, de la rhétorique et des cours de latinité distribués en plusieurs classes. Les livres classiques qu’on y suit sont : pour le cours de théologie, théologie de Mgr Bouvier expliquée quant à la morale par Alphonse de Liguori ; pour le cours de philosophie : extrait de la philosophie de Mgr Bouvier et du Compendium de Magniez1384  ; pour le cours de rhétorique, éléments de littérature et de rhétorique ecclésiastique ; ouvrage sorties de l’imprimerie du séminaire1385 .

Un autre document, intitulé « État des cours d’instruction et des auteurs en usage au séminaire général de Pinang 1386 »,confirme et complète les renseignements fournis par Mgr Boucho.La formation au Collège dure sept ans, parfois un peu plus. Le programme est divisé en trois « séries » : la théologie, l’Écriture sainte et enfin des « éléments de sciences naturelles », l’arithmétique, la géométrie et la géographie. Pour la théologie, les auteurs sont les mêmes que ceux cités par Mgr Boucho : Bouvier, « expliqué quant à la morale selon Liguori », le Compendium de Bouvier pour la philosophie, des ouvrages de la collection Gaume, « selectae Sti Bernardi epistolae », une autre compilation enfin, le Compendium historiae sacrae, de Lefranc1387. Cette liste mérite quelques commentaires : Jean-Baptiste Bouvier (1803-1854), professeur au grand séminaire du Mans, est l’auteur d’un manuel de théologie en six volumes, publié en 1834 sous le titre d’Institutiones theologicae. La partie dogmatique est empreinte de gallicanisme alors que la partie morale (t. 5 et 6) se rattache effectivement à la pensée d’Alphonse de Liguori, très hostile au rigorisme religieux des luthériens mais aussi des jansénistes. Philippe Boutry voit dans l’emprise croissante de Liguori un « retour à Rome 1388. » Mgr Dufresse, dans sa lettre édifiante (placée à la fin du règlement de 1848), évoquait déjà saint Bernard :

‘Que chacun donc, comme Saint Bernard, s’interpelle souvent par ces mots : Pourquoi viens-tu ? Non pour le loisir, le jeu ou le repos mais pour travailler, étudier les lettres, les sciences et les autres disciplines qui me permettront de propager et de protéger la foi dans mon peuple et d’œuvrer à mon salut et à la gloire de Dieu1389.’

Le choix des Lettres de saint Bernard, fondateur des cisterciens mais aussi prédicateur de la deuxième croisade, confirme la coloration missionnaire combative de ce programme d’enseignement. La lecture de saint Jérôme est également recommandée, à en juger par cette lettre du P. Robert, en novembre 1935 :

‘Je pense comme vous : il vaudrait mieux se mettre aux bons auteurs chrétiens que de traduire des païens. Je crois que tout le monde y viendra. On trouve des éditions à bon marché des Lettres de st Jérôme qui intéressent fort les élèves. ’

En 1847, le séminaire de Paris reçoit la commande de livres qui suit :

‘Nous vous prions, chers confrères, de vouloir bien faire votre possible pour nous procurer pour la bibliothèque du Collège les ouvrages indiqués sur la petite note ci-incluse : Histoire de l’Église par Henrion (12 volumes), Histoire de N.S. J.C. par Ligny (3 volumes), Histoire de la mère de Dieu par Orsini (2 volumes), Dictionnaire français–portugais et portugais-français par Constancio. Grammaire française de Noël et Chapsal avec exercices et corrigés, un Paroissien Romain (in 18°, deux exemplaires reliés en basane gaufrée), un Télémaque polyglotte contenant les six principales langues d’Europe. Il se trouve probablement à la librairie de F. Didot1390.’

En 1854, le Conseil des directeurs passe une nouvelle commande de livres1391. L’obéissance à Rome y est visible : « Catechismus concilii Trid.S., Concilii trid. Canones et Decreta, Ritualis romanum.  » En ce qui concerne la théologie, de nouveaux noms apparaissent : « Pérocheau. Théologie de Louviers ou bien celle que l’on suit à Paris. Gury Compend. Theol. Moral 1392 Jacques Pérocheau, évêque de Maxula et vicaire apostolique du Sichuan depuis 1838, avait enseigné la philosophie pendant sa jeunesse. Il était l’auteur d’un traité de théologie qu’il avait voulu imposer aussi bien en Chine qu’à Penang. Or sa « théologie du Sichuan » était contestée et les directeurs du Collège se refusaient à l’enseigner dans leurs cours. La réaction du prélat ne se fit pas attendre. Il menaça de rappeler tous ses élèves et se livra à une critique acerbe de l’enseignement à Penang :

‘À Pinang, l’instruction et l’éducation des élèves sont loin de répondre à vos désirs et aux nôtres. L’an dernier en octobre, M. Martin a renvoyé deux de nos écoliers qui avaient terminé leurs cours. Ce pauvre jeune homme ne sait ni le latin, ni la théologie. Il n’en sait pas deux mots. Mgr de Sinite avait voulu le questionner sur la théologie du Sutchuen, il lui a répondu qu’il ne pouvait rien réciter. Les causes de si grands maux sont […] qu’on ne fait point actuellement apprendre, réciter une théologie déterminée, courte, adaptée aux missions, le professeur donne ses leçons à la Sorbonne, interroge, laisse la liberté de lire toutes les théologies de la bibliothèque. D’où résulte précipitation, confusion, oubli du nécessaire. Les Chinois ordinaires sont incapables de loger dans leurs petits cerveaux tant de connaissances, les dernières font oublier les premières. Mon affliction est grande ! Voici en abrégé ce que j’écris à M. Martin : […] Ils réciteront la seule théologie du Sutchuen pendant trois ans au moins1393.’

De ces griefs, je ne retiendrai que ceux qui concernent la méthode d’éducation. Les professeurs de Penang se croiraient, en quelque sorte, « à la Sorbonne ». Leur enseignement serait inadapté à des élèves intellectuellement plus faibles que les européens et dangereux, aucun contrôle n’étant exercé sur les lectures des séminaristes. Jacques Pérocheau ne parvint pas à imposer sa théologie du Sichuan. En revanche, ses conceptions pédagogiques rencontrèrent moins d’oppositions. Un argument courait dans les missions et à Penang, au sujet de l’enseignement de la théologie : il convenait de ne pas laisser les élèves s’aventurer dans de hasardeuses élucubrations en lisant des traités savants qui pourraient semer la confusion dans leurs esprits :

‘Ici nous devons vous signaler un inconvénient, qui n’aura sans doute pas échappé à votre sagacité, qu’il ne serait peut-être pas à propos de ne pas mettre certains auteurs entre les mains de vos élèves parce qu’ils ne sauraient pas s’en servir, et que cela pourrait bien ne laisser dans leurs esprits que des idées confuses. Vous remédierez à cet inconvénient par des notes supplémentaires que vos élèves pourront étudier et consulter au besoin. Pour ce qui est des cours supplémentaires, il nous semble qu’il serait bon d’établir des catégories parmi vos élèves afin que ceux-là seuls les suivent qui peuvent en profiter sans préjudice d’études plus nécessaires auxquelles ils doivent avant tout s’appliquer. Dans les cours supplémentaires, passez aussi légèrement que possible sur ce qui n’est que de par curiosité et donnez une très large part aux questions qui peuvent servir à établir la vérité de notre sainte religion et fournir des preuves contre les erreurs et les superstitions de paganisme1394.’

Certains auteurs pourraient donc s’avérer préjudiciables à des élèves qui manquent de discernement et de savoir : « Il n’est pas nécessaire qu’ils soient instruits de toutes les controverses qui s’agitent entre les théologiens catholiques. Il y en a même sur lesquelles on ne pourrait guère les enseigner et expliquer sans inconvénient et sans danger et qu’il vaut mieux leur laisser ignorer. » Ces préjugés ont eu une conséquence durable : la surveillance et la censure de la bibliothèque. Les élèves n’y vont pas seuls, signalent les livres qu’ils empruntent, n’ont pas le droit de les emmener dans les dortoirs. Les livres accessibles aux élèves sont choisis par les Pères : « Le Conseil a décidé qu’une bibliothèque à l’usage des élèves serait établie dans la salle de théologie. Le Conseil a fait le choix des ouvrages qui la composent 1395  . » Dans les versions plus récentes du règlement, une citation du droit canon, à l’article 611, dispose que les séminaristes ne doivent accepter un livre que de la main du supérieur1396. La théologie enseignée au Collège n’est nullement spéculative (on ne discourra pas sur le sexe des anges), mais apologétique. Il faut que le futur prêtre indigène puisse asséner à ses contemporains des « preuves contre les erreurs et les superstitions du paganisme. » C’est une ancienne tradition de la pédagogie des missionnaires. En 1690, Alexandre Pocquet écrivait :

‘Pour les études de philosophie et de théologie il est à propos de retrancher toutes les questions épineuses et tout à fait abstraites qui ne leur servent de rien et ruineraient infailliblement leur santé comme cela est arrivé. Ils veulent se rendre compte de tout et font des efforts qui leur échauffent le sang et la poitrine et finissent par tomber malades1397.’

Voilà bien ce que Mgr Pérocheau cherchait à éviter. Sa théologie est expurgée de tout ce qui pourrait troubler les élèves ou les induire en erreur. C’est une sorte de compendium, ces compilations thématiques en quoi se résumait la pédagogie dans la plupart des séminaires en Europe comme en Asie, au XIXe siècle :

‘Voici pourquoi il est incontestable que l’enseignement auprès des orientaux doit nécessairement différer de celui d’Europe, non seulement quant au mode mais encore quant à un grand nombre de questions. Dans la théologie en général il y a des questions necessario sutu. D’autres bonnes et utiles et d’autres oiseuses. Pour nos élèves il y en a une quatrième espèce qui est nuisible. Cette dernière proposition n’a pas besoin de preuve auprès de vous Messieurs, qui connaissez mieux les asiatiques que moi. Je dis même que les questions oiseuses sont nuisibles pour eux qui, étant naturellement curieux, passent un temps qu’ils devraient consacrer à acquérir les vérités nécessaires, à se farcir l’esprit des questions qui n’ont d’autre but pour eux que d’augmenter leur estime d’eux-mêmes et les embrouiller dans leurs études. De là, découle naturellement la nécessité d’un selecta théologique, d’où toutes les questions de ce genre soient élaguées. Or le recueil nous l’avons, par les soins et les travaux de Mgr de Maxula1398.’

Les subtilités théologiques, lorsqu’elles ne sont pas « oiseuses », sont « nuisibles » et flattent la curiosité « naturelle » (je souligne) des asiatiques. Le risque que comporte la composition d’un « selecta » théologique est au mieux la simplification outrancière, au pire la perte de toute cohérence intellectuelle. C’est probablement ce que l’on finit par reprocher à Mgr Pérocheau. Tout bien considéré, le Conseil du séminaire de Paris donna gain de cause aux directeurs de Penang :

‘Le résultat de notre examen est d’appeler votre attention sur deux points, l’enseignement de la théologie et les cours secondaires. Sur le 1er, il est bon que vous sachiez qu’il n’est pas dans nos intentions de vous astreindre à suivre servilement la théologie de Mgr de Maxula dont vous nous signalez vous-même les défauts et l’insuffisance. S’il y a des lacunes à combler, des opinions et des décisions à modifier, vous avez la théologie de St Liguori, guide toujours sûr selon la remarque de la Sacrée congrégation dans des observations sur la théologie du Sutchuen1399.’

De plus, la théologie de Pérocheau avait un autre défaut : « Mgr de Maxula déclare ne plus vouloir envoyer d’élèves à Penang jusqu’à ce que l’on enseigne sa théologie pure et simple. Vous pouvez bien croire que nous ne pouvons accéder à ce désir, car elle est l’abrégé de Bailly, qui est à l’index 1400 » Cité dans l’inventaire Régereau de la bibliothèque du Collège (n° 155), Bailly est souvent mentionné dans les correspondances :

‘S’il manque à un exemplaire de la théologie de Bailly deux volumes, je vous en envoie deux autres en la place : ce sont les tomes 2 & 3 c’est à dire ceux vous manquent mais peut-être ne seront-ils pas de la même édition que les autres. On n’est plus à temps de vous envoyer par la présente occasion une théologie de Liguori : au reste jusqu’à ces temps-ci, les missionnaires ont pu s’en passer et si cette théologie ne contient rien qui soit digne de censure, cela ne dit pas qu’on soit obligé de la suivre en tout et d’admettre tous les sentiments de son bienheureux auteur, ce qu’un certain nombre de personnes dans ces temps-ci semble croire1401.’

La sympathie des missionnaires allait apparemment plutôt à Bailly qu’à Liguori, certes plus flexible en matière de morale (donc plus adaptable dans les missions), mais ultramontain. Après 1852, Bailly n’est plus mentionné. Théologien jugé rigoriste et gallican, il avait en effet été désavoué par Rome et mis à l’index en 18521402.En dehors de ces considérations doctrinales, l’affaire de la théologie du Sichuan montre que des doutes sur les capacités intellectuelles des élèves s’exprimaient encore ouvertement au Collège général, au début des années 1850, en dépit du synode de Pondichéry, dont la seconde session venait d’être clôturée. Dans la commande de livres passée en 1854 par les directeurs figurent, à côté de Pérocheau, une « théologie de Louviers ». Aucun théologien ne portant ce nom (du moins pendant la période moderne), il pourrait s’agir en fait de Jean-Baptiste Gauthier, né à Louviers en 1685 et mort à Gailly en 1765. Grand contempteur des jésuites, ce prêtre et théologien ultra gallican est l’auteur d’une « Lettre à M. de Charancy », au sujet de sa révision du Catéchisme de Montpellier, suspect de jansénisme, de plusieurs lettres sur les rites Malabares en Inde et sur les cérémonies des jésuites en Chine et enfin de la réfutation (en 1746) d’un poème de Pope intitulé « Essai sur l’homme ». Or, est-ce une simple coïncidence, de même que le catéchisme de Charancy est utilisé au Collège, l’œuvre de Pope figure sous le n° 150 dans l’inventaire des livres de François Régereau légués à la bibliothèque du Collège général en 1843 ? Quoiqu’il en soit, dans le courant des années 1840-1850, un glissement s’opère au Collège général pour ce qui concerne l’enseignement de la théologie. Les Pères des Missions Étrangères s’alignent avec docilité, comme souvent, sur la politique du Saint-Siège. Les auteurs français suspects ou convaincus de gallicanisme, de rigorisme, voire de jansénisme cèdent la place aux précurseurs de l’ultramontanisme, dont Liguori est le principal représentant. Autre signe d’évolution, ils adoptent, pour enseigner l’histoire ecclésiastique, l’Histoire universelle de l’Église catholique de René-François Rohrbacher et l’Histoire de l’Église de Joseph Darras, deux auteurs ouvertement « ultrapapalistes 1403 ». Cette tendance se renforce à partir de 1880 avec la diffusion du thomisme, souhaitée par le Vatican : « Le P. Cazenave a reçu les deux derniers volumes de la grande édition de S. Thomas 1404 », l’année même de la parution de l’encyclique Cum hoc sit, de Léon XIII, faisant de saint Thomas le patron des écoles catholiques. Un an plus tôt, le 4 août 1879, une autre encyclique, Aeterne patris, avait officiellement établi le thomisme comme fondement de l’enseignement théologique dans les séminaires et les universités catholiques. Étienne Fouilloux a clairement établi la chronologie du passage au thomisme, qui entend substituer « au rationalisme scientiste en passe de tout emporter sur son passage, la rationalité de la foi chrétienne selon Saint Thomas. » D’abord incitatif « un enseignement de type scolastique est fortement conseillé, mais sans caractère impératif ni exclusif », il devient le fer de lance de l’attaque contre le modernisme de Loisy : « rétabli pour conquérir, le thomisme sert désormais à défendre, et ce d’une manière de plus en plus intolérante 1405. » L’un des effets de cette réforme fut de stimuler le travail intellectuel dans les séminaires, l’amélioration de la formation des prêtres étant plus que jamais une priorité du Saint-Siège, en raison de l’élévation générale du niveau d’instruction en Europe. Par ailleurs, le modèle d’enseignement sulpicien (qui était grosso modo celui de Penang), était de plus en plus souvent contesté en France1406. Au Collège général, les professeurs de théologie emboîtent donc le pas au séminaire de la rue du Bac :

‘Nous enseignons depuis deux ou trois ans avec un auteur dogmatique qui n’est pas trop clair : c’est un Allemand, c’est tout dire. Theologia dogmatica,auctore Hurdes, professeur de dogme à l’Université d’Insbrück. Je me suis efforcé à le rédiger selon notre manière française de concevoir les choses et de les mettre en forme : et le séminaire a bien voulu autoriser que ce petit travail fût lithographié. Je vais vous en envoyer deux exemplaires, l’un pour vous, l’autre pour votre professeur de théologie1407.

Ce chauvinisme prête à sourire. Mais l’évolution est nette : les théologiens français ont été détrônés par des auteurs moins suspects de gallicanisme. Les changements se font encore plus sentir à partir de 1894, lorsque l’effondrement de l’effectif des élèves obligea les directeurs à redéfinir leurs objectifs. Je ne reviendrai pas sur la chronologie des faits qui, entre 1894 et juin 1932, aboutirent à la transformation progressive du Collège en grand séminaire régional, jusqu’à son affiliation, le 23 mars 1965, à l’université Urbana de Rome, pour me concentrer sur le contenu des réformes1408. Il fut d’abord question de faire du Collège « une université des hautes études, à l’effet de former des professeurs indigènes 1409. » Ce projet ne fut pas retenu, pour plusieurs raisons, les unes financières, les autres déontologiques (la Société des MEP n’avait pas pour mission de former des professeurs), les dernières stratégiques :

‘Tout le monde ici regrette l’effondrement du pauvre Collège de Pinang, qui n’a pas démérité de la Société, et dont le seul tort est qu’on n’a plus besoin de lui. Et, coïncidence curieuse, il tombe juste au moment où, sur les ordres du St Père, on vient de fonder un séminaire général pour toutes les missions des Indes. Que faire ? Faut-il reprendre l’ancienne idée de transformer le Collège en espèce d’université pour hautes études et formation de professeurs destinés à enseigner dans les séminaires particuliers des missions ? Pour ma part, je vous avoue que plus j’y pense, plus cela me paraît théorique, nullement pratique. C’est pour le coup que cela formerait une caste de savants orgueilleux, suivant la rengaine ordinaire et que les missionnaires jetteraient les hauts cris1410.’

En 1912, un « Rapport sur l’établissement d’un cours d’enseignement supérieur à Penang », à l’initiative de Mgr Pierre Gendreau, vicaire apostolique du Tonkin, est présenté devant le Conseil du séminaire de Paris. Le Collège accueillerait des séminaristes de toutes les missions qui auraient achevé leurs « études théologiques ordinaires ». Les études dureraient deux ans et comprendraient la philosophie et la théologie dogmatique et morale. Elles s’adresseraient à des élèves ayant « une solide instruction secondaire » et vise clairement à « élever le niveau du clergé indigène 1411. » L’un des arguments en faveur de ce cours d’enseignement supérieur mérite d’être cité :

‘Il est certain que le relèvement du niveau est on ne peut plus désirable. Dans notre circulaire du 24 mai 1895, nous disions que la multiplication des Européens en Extrême-Orient a profondément modifié la condition des missions et le degré d’instruction qui suffisait autrefois aux prêtres indigènes peut-être insuffisant aujourd’hui. Aussi les efforts du pape Léon XIII et de nos jours ceux de Pie X tendent-ils à assurer, dans le clergé, le développement des études dans toutes les branches du savoir humain1412.’

N’était-ce pas admettre implicitement que le clergé indigène était appelé à se substituer aux missionnaires européens (en nombre insuffisant), dans une Asie durablement colonisée par l’Occident, pensait-on. Le projet de Mgr Gendreau finit par aboutir, car il concordait avec les vues de la Propaganda Fide, désireuse d’insérer les établissements comme celui de Penang dans un réseau de grands séminaires régionaux qu’elle contrôlerait. Mais il provoqua la résurgence de l’ancienne controverse sur le niveau des indigènes :

‘On aura beau établir à Pinang un cours supérieur, que produira-t-il ? Les indigènes sont-ils moins intelligents que les européens ? Oui et non. Ce qui nous rend d’emblée supérieur à eux, c’est surtout la civilisation chrétienne de notre pays dont nous sommes imbibés et qui agit sans cesse et sans que nous nous apercevions sur nous ; c’est elle qui est le grand facteur de notre supériorité relative sur les indigènes. Cela d’abord et en second lieu, nos études plus longues que celles des indigènes nous font une mentalité différente de la leur. En général, après avoir quitté l’école, l’Européen continue à s’instruire et même à étudier pour le plaisir du savoir. L’indigène, soit laïc soit prêtre ferme alors ses livres : il est arrivé. Voyez-vous un indigène faire de la botanique, s’occuper de linguistique, d’ethnographie, se demander la théorie d’un gramophone etc. ? Nos prêtres indigènes ont besoin d’études plus fortes ? Alors faites-les durer plus longtemps. D’un autre côté, leur santé corporelle leur permet-elle de prolonger ces études ? […] Les prêtres indigènes, en voyant leurs concitoyens faire bonne figure dans les emplois civils concurremment avec les Européens et travaillés par des meneurs, se flattent de pouvoir faire de même par rapport aux emplois ecclésiastiques et mettre les Européens hors de leur pays. Cela se dit tout bas ; cela s’écrit même dans certains pamphlets1413.’

L’argumentation habituelle contre le clergé indigène s’exprime ici sans nuances : moins capable que les Européens par manque de moyens et à cause d’un retard de civilisation, les indigènes, de santé fragile mais gonflés d’orgueil, risquent de supplanter les missionnaires à la tête des Églises locales. En 1922, le Bulletin des Missions Étrangères publia un article anonyme, dû à « un professeur de théologie d’une de nos mission », intitulé : « Considérations sur l’enseignement de la théologie en pays de mission 1414 » Cet article qui suscita plusieurs réponses également publiées, ouvrit un bref débat au sein de la Société. L’auteur des Considérations se livrait à une critique implacable de la méthode utilisée pour l’enseignement de la théologie aux élèves indigènes, méthode qu’il jugeait inappropriée pour deux raisons. Calquée sur l’enseignement dispensé dans les séminaires européens, elle ne tient compte ni de l’infériorité naturelle des étudiants asiatiques : « Les étudiants, quoique généralement bien doués, ne peuvent avancer que lentement, étant, surtout ceux des pays chauds, d’une santé délicate », ni de l’écart culturel dû à leur éducation dans des milieux récemment christianisés, qui ne peuvent leur transmettre la familiarité « naturelle » qu’ont les Européens avec le christianisme. Par ailleurs, l’enseignement trop scolastique de la théologie ne permet pas de passer de la théorie à la pratique individuelle : « Les élèves sont, en général, incapable de faire par eux-mêmes, ces applications pratiques de la doctrine qu’ils étudient. » L’auteur allait même jusqu’à dénoncer le « rationalisme » de certains manuels de théologie, – dépourvus de toute dimension « surnaturelle », qui « n’influent point sur le cœur et la vie pratique », – notamment parce qu’ils séparent artificiellement le dogme de la morale : « Cette division arbitraire et contre nature laisse le dogme sans conclusion et la morale sans fondement, d’autant plus que fréquemment la partie dite dogmatique n’est enseignée que deux ou trois ans après la partie censée morale. » Il proposait par conséquent de doter les missions d’un manuel « doctrinae catholicae, aussi complet que possible quant à l’objet quoique bref quant au développement. » Il plaidait pour un abrégé de théologie d’où seraient exclues les références qui encombrent les esprits et ne peuvent servir qu’aux érudits, les « preuves par les SS. Pères » qui surchargent « la pauvre mémoire » et surtout les controverses, car les indigènes retiennent mieux les erreurs que l’on réfute que la vérité qu’il faut établir. Plusieurs articles lui répondirent, la plupart pour l’approuver, sauf un, dû à Léopold Cadière1415. Selon cet ancien professeur, missionnaire au Vietnam, les « Considérations » contenaient deux erreurs fondamentales : « Je vois, écrit-il, une ruée formidable vers les sciences occidentales, vers la Science, l’idole obscure à la fascinante majuscule. » Or les programmes proposés dans les écoles, les lycées et les universités catholiques et protestantes en Asie sont semblables à ceux des établissements scolaires en Europe : « Pour ces centaines de mille enfants ou jeunes gens japonais, chinois, annamites ou indiens, est-ce qu’on minimise les programmes ? Est-ce qu’on rédige des manuels spéciaux ad usum delphini ? » Aux antipodes de la vision dépréciative souvent répandue parmi les missionnaires, Léopold Cadière refusait de faire une différence entre les capacités des Asiatiques et celles des Européens. Selon lui, seule la pédagogie était à incriminer :

‘Mais lorsque la notion occidentale, de quelque ordre qu’elle soit, scientifique, littéraire, philosophique, peut arriver dans toute sa plénitude, sans être déformée ou obscurcie par l’expression, jusqu’à l’intelligence de l’étudiant, elle est pleinement perçue et elle produit les mêmes effets que sur un esprit européen.’

Il en concluait que l’adoption d’un manuel abrégé serait « un recul et une stagnation à une époque où tout le monde avance autour de nous. » Ce débat révèle à la fois la survivance de préjugés indéracinables et le progrès, parmi les missionnaires, de la compréhension lucide du risque que courrait la Société si elle restait à l’écart des rapides transformations du monde. À partir des années vingt, la mise du Collège aux normes de la Propaganda Fide semblait inéluctable. À Penang, le programme des études était déjà assez chargé :

‘Théologie dogmatique et morale, deux ans ; philosophie, un an, rhétorique, un an, grammaire, un an. Cours de sciences, de liturgie, d’écriture sainte et d’histoire ecclésiastique, une fois par semaine et pendant cinq ans. Géographie et arithmétique pour les élèves de grammaire. Cours de littérature chinoise par un lettré chinois trois fois par semaine1416.’

En décembre 1924, Mgr Marchetti, secrétaire du cardinal Van Rossum, préfet de la Sacrée congrégation, écrit à Mgr de Guébriant : « Le but poursuivi en ceci par la SCPF, V.S. ne l’ignore pas, est de mettre le séminaire de Poulo Pinang à même de devenir non seulement le séminaire central des missions confiées à cette très méritante Sté des ME mais encore le séminaire régional des Vicariats du Sud de la Chine et des Iles Malaises 1417 . » Pour obtenir l’agrément de la Propaganda Fide, les Missions Étrangères devront faire parvenir un rapport détaillé sur les études et les élèves : « À propos de l’instruction de la Propagande concernant les séminaires régionaux : je suis en possession des Normae pro Seminaris Regionalibus approuvées par rescrit de la Propagande en date du 27 avril 1934 », écrit le P. Robert. Désormais, la Propaganda Fide sera consultée pour la nomination des supérieurs et des directeurs, ainsi que sur les programmes d’enseignement, les auteurs en usage. Le niveau des études sera poussé pour être conforme à celui des autres séminaires régionaux :

‘Afin de répondre aux désirs exprimés par les V.A. relativement à l’institution d’un cours supérieur plus poussé destiné à la formation des futurs prêtres dans les séminaires du vicariat il faudrait qu’au cours de Philosophie de deux ans obligatoire pour tous les élèves s’ajoute une troisième année complémentaire de philosophie pour les élèves les plus remarquables de même pour la théologie si possible dans la suite1418 .

Dès lors, il n’est plus question de programme allégé et les controverses sur le niveau des indigènes s’estompent :

‘Nous avons commencé cette année l’application du nouveau programme d’études établi d’accord avec Mgr Ajuti, Délégué Apostolique de l’Indochine. Un temps plus long est consacré à l’étude de l’Écriture sainte, du Droit canon, des sciences ; nous avons des cours réguliers de théologie pastorale et d’éloquence sacrée pendant toute l’année. C’est une surcharge assez lourde pour un personnel assez éprouvé par le climat, aussi avons-nous appris avec joie l’arrivée d’un nouveau confrère, M. Davias. Désormais tous nos élèves portent la soutane. Il semble que la discipline et la piété ont reçu de ce fait une nouvelle impulsion1419.’

On parle, au contraire, d’envoyer des étudiants parfaire leur formation en France ou même à Rome :

‘À propos d’Edward, nous sommes ici d’avis qu’il mérite d’être envoyé en Europe. Le séminaire d’Issy conviendrait mieux que le Collège Urbain de la Propagande à Rome. Il suffirait d’en écrire à M. le supérieur du séminaire d’Issy. Je joins une feuille de notes qui est de nature à favoriser son admission. Elle est notre appréciation en conscience de la valeur du sujet. S’il est admis, il pourrait partir, tôt dans le courant de 1936, pour faire, comme plusieurs dans son cas, un séjour de quelques mois à l’École Apostolique de Montmélian où il se familiariserait avec le français et à la rentrée d’octobre 1936 il serait à même de suivre les cours. M. le supérieur d’Issy pourra vous dire la marche à suivre pour l’admission à Montmélian1420.’

Agréé officiellement par la Propaganda Fide en 1932, après l’approbation du nouveau règlement, le Collège, où étudient une centaine d’élève, est devenu un grand séminaire régional, quoiqu’il n’en porte pas le nom ; les directeurs le refusèrent toujours, par crainte de se voir phagocytés par Rome :

‘L’aboutissement de l’initiative de la S.C. est dans la suppression du Collège, ce qui paraît tout à l’encontre des traditions de la Société et la méconnaissance du rôle historique de cette maison pendant les persécutions, rôle qu’elle peut-être appelée à jouer de nouveau1421. ’

Mais ils respectent scrupuleusement les obligations afférentes à leur affiliation romaine : « Le Conseil considère l’opportunité de changer le manuel de philosophie. La proposition d’adopter Bayer est approuvée par le Conseil. On fera les démarches nécessaires auprès de la Propagande pour obtenir l’autorisation nécessaire 1422 . » De nouveaux auteurs sont mentionnés :

‘Le P. Sup. communique une lettre du R.P. Michotte procureur à Rome, confirmant la liberté qu’a le Conseil de changer de manuel pour les élèves sans en demander la permission à S.C. de la Propagande. En conséquence le manuel de théologie dogmatique par Hurter s.j. devenant introuvable, le conseil décide d’adopter pour la théologie dogmatique le manuel de Tanquerey1423.’

L’étape ultime est franchie à l’occasion du tricentenaire du Collège, alors que se tient le concile de Vatican II. L’enseignement à Penang, pourtant parfaitement conforme aux desideratas du Saint-Siège, s’était en quelque sorte fossilisé. Aucun des débats qui agitaient le milieu des théologiens ne semble avoir franchi les murs du Collège général avant 1960. Il n’est jamais question, dans les correspondances, des controverses et des multiples mises à l’index suscitées, dans le sillage du modernisme, par les travaux inspirés de la méthode historico-critique appliquée à la Bible, ni des spéculations sur la possibilité d’une connaissance objective de Dieu par les moyens de la raison humaine1424. En revanche, les Pères prêtent, dès novembre 1910, le serment instauré en septembre par le motu proprio « Sacrorum antistitum » :

‘Comme vous le savez déjà, le souverain Pontife Pie X, dans son motu proprio « sacrorum antistitum » a ordonné à tous les prêtres employés au saint ministère et à plusieurs autres classes d’ecclésiastiques de faire la profession de foi de Pie IV et de prêter serment contre les erreurs modernistes. Afin de vous mettre à même de remplir cette obligation grave et urgente, si déjà vous ne l’avez fait, nous vous envoyons quelques exemplaires de ce serment, en nombre égal à celui des confrères de Pinang1425.’

Le légalisme des professeurs du Collège de Penang est inébranlable. Pourtant, en dix ans, le Collège va connaître une mutation tout aussi radicale que le fut son immobilité ; abandon progressif du latin, arrivée des professeurs indigènes, renouvellement des livres et des programmes, nouvelles matières enseignées ou du moins rééquilibrages en faveur d’une formation moins abstraite :

‘1954 : Le conseil décide que désormais un seul cours nommé cours de Pastorale comprendra outre la théologie pastorale proprement dite les notions essentielles sur l’éloquence sacrée, et sur la sociologie : on y abordera quelques problèmes principaux de la « question sociale » à la lumière des Encycliques des derniers papes. Le cours de prédication sera supprimé et le cours de Pastorale prolongé sur deux années scolaires.’ ‘1961 : Le conseil décide d’adopter un manuel pour le cours de Droit canon et choisit le manuel de Vermeersch-Creusen.’ ‘1966 : Théologie. Importance de la théologie Biblique et Pastorale (pratique)1426.’ ‘Q.: Qu’est-ce qui a changé concrètement sur le plan intellectuel ?’ ‘J. L’H. : Tout s’est mis à changer. L’enseignement a également fortement évolué. Lorsque je suis arrivé, en 1961, on m’avait chargé du cours sur le dogme. Je veillais à préparer longuement mes leçons, en latin. […] Avec l’aggiornamento, cela n’avait plus rien à voir. Nous étudiions les documents les plus récents de Vatican II sur le dogme, ce qui nous demandait un énorme travail d’actualisation. Nous faisions des rencontres libres sur la Bible ; nous avons même envisagé d’entreprendre une traduction en malais. Nous incitions les élèves à participer, nous faisions des travaux pratiques en petits groupes avec des ateliers de réflexions, des traductions des psaumes en malais. Nous favorisions la culture et la communication. Le concile cherchait une harmonie entre la vie spirituelle, intellectuelle et pastorale. Dans l’esprit de l’Action catholique, nous avons développé les stages en paroisse, les visites des élèves aux malades, la catéchèse et la pastorale. En 1965, il y a eu l’important décret Ad gentes, sur la fonction apostolique des communautés confiées au clergé local. Cela poussait à s’engager plus encore. Mais il fallait trouver un équilibre entre la formation intellectuelle et la présence au monde1427. ’

La bibliothèque du Collège est enrichie. Des livres sont commandés, ainsi que des revues. Parmi celles-ci, plusieurs sont en anglais (le fonds de la bibliothèque étant plutôt latin et français) ; quant aux sujets abordés, en dehors de la théologie, la pastorale et les études bibliques sont représentées :

‘11 novembre 1961 : « Le Conseil décide de s’abonner à quelques nouvelles revues pour le séminaire. Ce sont : Maison-Dieu, Lumière de vie, Periodica, Christ to the world, Lumen vitae (angl.) Homelitie and pastoral review, Vocations sacerdotales, Worship, Theological studies, Fides (angl). »
13 novembre 1961 : « Le Conseil décide de s’abonner à quelques nouvelles revues : Catéchèse, Paroles et missions, Informations catholiques internationales, Osservatore romano en Anglais, Recherches de sciences religieuses, Revue thomiste, Vie spirituelle, Supplément de la vie spirituelle, Bulletin du comité des Études. »
1er septembre 1964 : « Abonnement pris à Herder Correspondance, National Geographic Magazine. »’

L’influence du concile est évidente. Le choix de la Revue thomiste, comme celui de l’Osservatore romano, traduisent toutefois l’obédience romaine du Collège général. L’examen d’une période moyenne, 150 ans environ, ne permet pas d’entrer dans les détails. Mais il a cependant l’avantage de révéler à la fois des tendances enracinées dans le passé lointain (XVIIe-XVIIIe siècle), des ajustements conjoncturels (le passage du Gallicanisme au Liguorisme puis du Liguorisme au Thomisme) et enfin une mutation, certes radicale, mais qui était latente, comme l’attestent les fréquents débats au sujet du latin ou de l’excès de rationalisation, en théologie dogmatique notamment.

Notes
1370.

DB 460-5, M. Langlois à M. François Albrand, Paris, 15 mars 1834.

1371.

Règlement, 1665, chap. 3, « Avis pour les séminaristes. »

1372.

Claude Fleury, 1640-1723. Confesseur de Louis XV et académicien. Auteur d’une Histoire Ecclésiastique en 20 volumes, parue en 1691. César Baronius, 1538-1607, cardinal, bibliothécaire du Vatican. Auteur d’Annales Ecclésiastiques.

1373.

Vol. 884, Pierre Lacère, Collège de Mahapram, 12 mai 1740.

1374.

Mgr Pottier, Conseils sur la conduite du Collège Général, AME, vol. 438, p. 26.

1375.

« Les dimanches et les jours de fêtes non solennelles […] de huit heures et demie jusqu’à neuf heures ils vaqueront à l’étude ; de neuf heures à onze heures ils recevront de leurs maîtres une leçon de mathématiques […] A deux heures et demie, ils écouteront attentivement l’explication de la Sainte Écriture afin à la fois que leurs esprits soient éclairés par la lumière céleste et que leurs cœurs soient nourris de charité », Règlement, 1848, Règles particulières, art. 20. « Les jours fériés, de huit heures jusqu’à neuf heures, ils vaqueront au travail manuel ; ensuite ils étudieront jusqu’à dix heures et, de dix heures jusqu’à onze heures il y aura cours de mathématiques pour tous ; le soir, promenade comme le dimanche », Idem, art. 22.

1376.

Procès-verbaux, 17 avril 1847.

1377.

Idem, 14 avril 1851. Le documenta rectae rationis seu forma instructionis ad usum alumnorum sinensium, anamitarum necnon et catechistarum concinnata, est attribué à Mgr Pottier. Il fut révisé par Georges Alary et publié en 1839 par Jean-Louis taberd, vicaire apostolique de Cochinchine. C’est un manuel de pédagogie.

1378.

Idem, 4 juillet 1853, 13 février 1854. 4 février 1969 : « Le P. Wallays a accepté de faire le catéchisme en annamite. Le P. Cazes s’est chargé du catéchisme en birman. Le P. Laigre s’est chargé de le faire en latin aux élèves de langue autre qu’annamite ou birman. » L’intérêt des missionnaires pour les catéchismes en langue asiatique n’est pas nouveau, comme témoigne cette lettre de Mgr Garnault : « J’avais demandé au préfet de la Sacrée-Congrégation des livres malais que je sais avoir été imprimés dans l’imprimerie de la Sacrée-Congrégation, ainsi que j’ai vu dans un catalogue de livres malais à la fin d’une grammaire malaise imprimée par les Hollandais ; on ne les a pas trouvés à Rome, malgré les recherches qu’on a faites. Il se pourrait qu’il s’en trouvât quelques-uns à Macao, principalement dans la bibliothèque de la procure de la Propagande. Dans ce catalogue du livre hollandais est porté un catéchisme malais, composé par Saint-François-Xavier ; je serais bien curieux de l’avoir. Le Préfet de la Sacrée-Congrégation n’a pu trouver qu’un dictionnaire malais », vol. 891, p. 1541, Mgr Garnault à M. Letondal, Jongselang, 29 avril 1791.

1379.

Idem, 19 août 1869.

1380.

Procès-verbaux, 20 mai 1876.

1381.

Idem, 5 juin 1883. L’argument est quasi-identique à celui de Mgr Kerhervé en 1764 : « S’ils n’ont soin de faire enseigner aux nouveaux venus le catéchisme dans leur langue naturelle, ils l’oublieront bientôt, et en attendant qu’ils le sachent en latin, ils s’habitueront à faire tous les exercices de piété sans goût, sans fruit et par routine, ce qui dans la suite ne sera pas facile à corriger. »

1382.

Jean Couturier est également l’auteur d’un Catéchisme dogmatique et moral, 10e édition en 1863. Le Catéchisme de Montpellier est dû à l’oratorien Pouget. Il avait été commandé par Mgr Colbert de Croissy, (1667-1738), évêque de Montpellier, l’un des quatre évêques de France qui refusèrent de se rallier à la condamnation des thèses jansénistes. Condamné par Rome, ce catéchisme fut amendé par Charancy, successeur de Colbert de Croissy. N. Meusy a écrit un Catéchisme historique, dogmatique et moral des fêtes principales, paru en 1788. Merci à Michel Ollion, Conservateur aux Archives nationales, pour ces précisions.

1383.

Vol. 887, Mgr Joseph Florens, 17 juin 1820. Paul-Gabriel Antoine, jésuite, auteur d’une Theologia universa dogmatica (1740), et d’une Theologia moralis, imposée par Benoît XIV au collège de la Propaganda Fide. Cet ouvrage figure dans la liste des livres de l’inventaire après décès du P. Régereau (n° 161).

1384.

Il pourrait s’agir non de Magniez, mais de Neyraguet, auteur d’un Compendium theologiae moralis sanctis Liguori, publié en 1841. À moins que ce ne soit effectivement Louis-François Magniez, Le postulant, essai de méthode pour commencer l’étude du latin, 1722. Mais dans ce cas, pourquoi le placer parmi les philosophes ?

1385.

Mgr Boucho, « réponse à la Propaganda Fide », op. cit., 1870. La réponse à ce questionnaire, que j’ai déjà mentionnée plusieurs fois, suscita l’inquiétude des directeurs qui craignaient que Mgr Boucho ne cherchât, par ce biais, à étendre son autorité sur le Collège : « Une petite difficulté nous étant survenue, nous sommes bien aises de vous la soumettre. Mgr Boucho nous a fait proposer, par l’intermédiaire de Mgr Leturdu, la question suivante : Monseigneur m’a prié de vous demander pour qu’il l’envoie à Rome, un état des études faites au Collège, et quels sont les livres classiques. En vertu des droits qu’a Monseigneur de voir au Collège de la foi, de la discipline et des mœurs et aussi de son droit de visite et de surveillance sur l’enseignement, comme il est constaté par une lettre du conseil en date du 14 décembre 1847, nous n’avons pas cru ni devoir, ni pouvoir ne pas donner quelques renseignements. Mais nous avons craint que Mgr Boucho ne voulût profiter de cette occasion pour chercher de réaliser une de ses idées favorites, qui serait de se substituer comme supérieur majeur du Collège général. De plus, rien n’empêche de supposer que Rome n’ait quelques observations à faire sur l’enseignement donné au Collège ; et dans cette hypothèse, elles suivraient naturellement le même canal par lequel elle aurait reçu ces renseignements. C’est ainsi que nous pourrions être placés dans la fâcheuse situation de recevoir des ordres de Rome par une voie autre que la voie régulière », vol. 340, n° 240, les directeurs du Collège de Penang au séminaire de Paris, 30 mars 1870.

1386.

Vol. 340, n° 241, juillet 1870.

1387.

Lefranc était membre de la congrégation des Pères de la doctrine chrétienne. Son Compendium fut publié en 1828.

1388.

Claude Langlois a montré que Bouvier avait notamment utilisé Liguori pour atténuer la prise de position des moralistes rigoristes sur les questions de la sexualité conjugale et du coïtus interruptus, pratique peccamineuse puisque s’opposant à la nature, dont on faisait peser la responsabilité sur la femme. Bouvier avait d’abord postulé la passivité de la femme, ce qui permettait de l’exonérer de toute culpabilité et de ne pas l’exclure des sacrements. Puis, devenu évêque du Mans, il revient à la charge et « demande à la Sacrée Pénitencerie que l’on tienne compte des pratiques du couple. Prendre comme ‘’sujets’’ de l’acte moral non point individuellement chacun des partenaires, mais les deux conjoints ensemble, paraît d’une réelle modernité […] Liguori est utilisé pour répondre positivement sans le dire évidemment, à une sécularisation de fait de la sexualité conjugale […] Le rôle de la Sacrée Pénitencerie est déterminant, manifestation, parmi d’autres, d’un ‘’retour à Rome’’ (Ph. Boutry) anticipant l’ultramontanisme […] », Claude Langlois, « Changer les normes éthiques ? Le débat en théologie morale dans la première moitié du 19e siècle », in Annuaire EPHE, Section sciences religieuses, t. 103, 1994-1995.

1389.

Mgr Dufresse, « Lettre aux élèves du Collège général », op. cit., art. 1.

1390.

Vol. 901, p. 1315, les directeurs du Collège général au Conseil de Paris, 26 septembre 1847. Mathieu-Richard-Auguste Baron Henrion, Histoire ecclésiastique depuis la création jusqu’au pontificat de Pie IX, éd. Migne, Paris, 1841. François de Ligny, s.j., Histoire de la vie de N.S.J.C., éd. Méquignon junior, 1830. Noël et Chapsal, Grammaire française, 1ère édition en 1824. Abbé Matthieu Orsini, Histoire de la mère de Dieu, complétée par les traditions d’Orient, les écrits des saints Pères et les mœurs des Hébreux, éd. Boisadam, 1838. Francisco Solano Constancio, Nouveau dictionnaire français-portugais, 1842, éd. Baudry, Paris.

1391.

Procès-verbaux, 7 mars 1854.

1392.

Jean-Pierre Gury est un jésuite, auteur du Prêtre confesseur et jurisconsulte et en 1850, d’un Compendium theologiae moralis.

1393.

Vol. 527, Sutchuen, Mgr de Maxula (Pérocheau) à Messieurs les Directeurs du séminaire de Pinang, 2 septembre 1851.

1394.

Vol. 64, p. 282, Mgr Le Febvre, sup. des Missions Étrangères à MM. les Directeurs du Collège de Pinang, novembre 1840. Autre exemple : « Je vous y donnais quelques conseils touchant la conduite que vous aurez à tenir envers les élèves chinois ad educantur et instructionis desquels vous devez être occupé. Il faut les former aux vertus du christianisme et aux vertus propres de l’état ecclésiastique ; aux exercices particuliers de la vie intérieure et spirituelle, à la méditation des vérités éternelles, mais sans exiger d’eux une trop grande perfection. Ils ne sont pas susceptibles d’une grande spiritualité ; il faut s’accoutumer de leur faiblesse et ne pas exiger d’eux au-dessus de leurs forces. Il en est de même pour l’étude de la théologie ; ce serait perdre notre temps que de leur enseigner cette science selon la méthode qu’on suit en Europe et de leur faire voir toutes les questions qui sont dans le métier de la théologie. Pour le dogme il suffit qu’ils aient une connaissance exacte de tous les mystères qu’enseigne l’Église Catholique, suffisante pour qu’ils puissent les enseigner et les expliquer aux fidèles, mais il n’est pas nécessaire qu’ils soient instruits de toutes les controverses qui s’agitent entre les théologiens catholiques. Il y en a même sur lesquelles on ne pourrait guère les enseigner et expliquer sans inconvénient et sans danger et qu’il vaut mieux leur laisser ignorer. S’ils possèdent bien ce qui est dans le Catéchisme du concile de Trente, ils seront je crois suffisamment instruits du dogme. Au Tong King, pendant les trois ans que dure le cours de théologie, on n’enseigne que la morale. Ils étudient le dogme en même temps qu’ils étudient le latin parce qu’on leur explique le Nouveau testament et le Catéchisme du concile de Trente et on préfère de leur expliquer toutes les vérités du dogme, non d’une manière scolastique, mais d’une manière qu’il leur est tout aussi profitable et peut-être plus. Pour la morale, il y a aussi dans les auteurs européens qu’on suit dans les séminaires beaucoup de questions inutiles aux Chinois et d’autres qui ne sont point assez développées pour de jeunes gens destinés à exercer le saint ministère au milieu des idolâtres », DB 460-5, M. Langlois à M. Albrand, Paris, le 16 mars 1831.

1395.

Procès-verbaux, 19 mai 1851.

1396.

Règlement, 1926-1932, chap. 2, « De disciplina », § 1, règles générales, art. 25-28.

1397.

Manière d’élever les écoliers indiens, A. Pocquet, supérieur du Collège de Siam, op. cit.,1690, CG 007.

1398.

Vol. 339, n° 280, M. Albrand, 11 septembre 1835.

1399.

Vol. 64, p. 282, Mgr Le Febvre, sup. des Missions Étrangères à MM. les directeurs du Collège de Pinang, novembre 1840.

1400.

Vol. 340, M. Martin à M. Libois, 19 mai 1855.

1401.

DB 460 – 5, M. Langlois à François Albrand, Paris, 15 mars 1834.

1402.

Louis Bailly, 1730-1808, Theologia dogmatica et moralis ad usum seminarium, 1789. Il est l’auteur également d’un Essai sur l’immortalité de l’âme.

1403.

La formule est de Marcel Launay, Les séminaires français, op. cit., p. 104. « Histoire ecclésiastique, n’ayant pas d’auteur, le professeur explique un compendium qu’il tire de Rohrbacher-Darras, Wouters », État des cours d’instructions, op. cit., 1870. R.-F. Rohrbacher, Histoire universelle de l’Église catholique, Gaume-frères, 1861. Rohrbacher a également écrit un Catéchisme du sens commun et de la philosophie catholique, 1854. Joseph-Épiphane Darras, Histoire de l’Église, 1854. Le plan du livre est divisé par pontificats…

1404.

DB 460-5, M. Chibaudel à M. Laigre, Paris, le 25 novembre 1880.

1405.

Étienne Fouilloux, Une Église en quête de liberté, La pensée catholique française entre modernisme et Vatican II, 1914-1962, Desclée, Paris, 1998, p. 40-41.

1406.

Cf. Philippe Boutry, « Vertus d’état et clergé intellectuel : la crise du modèle sulpicien dans la formation des prêtres français du XIXe siècle », dans Problème d’histoire de l’éducation, École française de Rome, n° 104, 1988.

1407.

DB 460-5, le P. Chibaudel au P. Wallays, Paris, 16 novembre 1886.

1408.

Voir la première partie, Histoire, I-3.

1409.

« L’établissement de séminaires dans presque toutes nos missions porte un coup funeste à notre cher Collège Général, qui a rendu tant de services à notre Société. Pour ma part, je regretterais profondément de le voir disparaître, et je verrais avec plaisir que l’on essayât tous les moyens pour le sauver. Peu de temps après mon retour de mission, je soumis au Conseil le projet d’établir au Collège quelque chose qui aurait ressemblé à une université des hautes études à l’effet de former des professeurs indigènes. Je regrette qu’on y ait pas donné suite », DB 460-6, P. Leserteur au P. Wallays, Paris, 8 mars 1894.

1410.

DB 460-6, P. Chibaudel au P. Wallays, Paris, 20 mars 1894.

1411.

« Rapport sur l’établissement d’un cours d’enseignement supérieur à Pinang », PP. Delmas et Parmentier, Bièvres, 14 mars 1912,

1412.

Idem.

1413.

« Commentaire sur le projet de réforme », 16 novembre 1912.

1414.

B.M.E., 1922, p. 118-128.

1415.

Léopold Cadière, (1869-1955), « À propos des considérations sur l’enseignement de la théologie en pays de mission », Idem, p. 278-491.

1416.

Vol. 340, n° 59, M. Pages, Penang, 3 décembre 1920.

1417.

Notes de Mgr de Guébriant, page 331, BG 1401, AME 1655. F. Marchetti, secrétaire du card. Préfet Guillaume van Rossum, à Mgr de Guébriant et aux Vicaires apostoliques, Rome, 5 décembre 1924, SCPF, objet : Pinang.

1418.

Idem.

1419.

Établissement communs, page 162, compte rendu des travaux de 1926, page 162.

1420.

Autre exemple, Procès-verbaux, 6 juillet 1956 : « S.E. Mgr Bazin archevêque de Rangoon a informé le P. Sup. du Collège de son intention de placer au Collège de la Propagande à Rome celui qui est actuellement élève de deuxième année au Collège de Penang ; et a demandé si le Conseil y voyait quelque inconvénient. Le Conseil interrogé n’a soulevé aucune difficulté contre ce projet de l’envoi de Joseph Dewellerez à Rome. »

1421.

CG 007 Carton 3, Conseil des directeurs, Penang, 1935.

1422.

Procès-verbaux, 25 septembre 1939.

1423.

Idem, 4 juillet 1952. Hugo Hurter, s.j., Nomenclator literarius recentioris, 1883. Adolphe Tanquerey, sulpicien, Synopsis theologiae moralis et dogmaticae, 1894. Ce théologien est considéré comme le représentant du néothomisme classique.

1424.

Cf. Étienne Fouilloux, op. cit., « La hantise du modernisme », p. 15-38.

1425.

DB 460-6, M. Garnier à M. Wallays, Paris, le 17 novembre 1910.

1426.

Procès-verbaux. Arthur Vermeersch (1858-1936), Epitome iuris canonici.

1427.

Entretien avec Jean l’Hour, op. cit.