2.2.1. La reddition du compte

La reddition du compte est le moment sur lequel est fondée l'intégralité du système de contrôle administratif et financier. Elle est normalement le fait du châtelain, qui se déplace à partir du XIVe siècle à la Chambre des comptes pour détailler les revenus perçus et les dépenses engagées au cours de l'exercice précédent. Le châtelain peut cependant être représenté par un lieutenant (locumtenens), vice-châtelain ou membre de sa famille. Cette pratique pourrait être justifiée par la nécessité impérieuse pour le châtelain de rester dans sa châtellenie, notamment pour en assurer la défense. Dans les faits, elle semble n'obéir à aucune règle précise, même si on peut remarquer que les châtelains les mieux implantés localement se présentent plus rarement en personne à la Chambre des comptes : c'est le cas notamment d'Antoine de Crécherel à Sallanches (1392-1427) ou de Guyot Ferlay à Miribel (1362-1378). Ce dernier ne se déplace même jamais à Chambéry après 1372 !173 Ce lieutenant peut également être, dans la pratique, le véritable administrateur de la châtellenie ; j'aurai l'occasion d'y revenir plus loin.

Le châtelain – si on s'en tient au cas d'école – détaille oralement les sommes en question, devant une commission composée de un à trois maîtres auditeurs issus de l'entourage du prince. Il présente ses propres comptes, ainsi que les documents (devis, factures, lettres) justifiant les dépenses effectuées ou les réductions d'impôt accordées. Un clerc prend en note les informations communiquées et rédige ainsi, sous la surveillance et la dictée des auditeurs, le compte officiel de l'exercice. La netteté des documents et la régularité des écritures ne doivent pas exclure l'idée que le clerc en question rédige directement le document final. Cela expliquerait les reprises ponctuelles et les quelques variations constatées dans le choix des abréviations : le clerc peut en effet, parfois, écrire les termes en entier, lorsque le rythme de la dictée le lui permet.

Notes
173.

Bâtir et dominer, p. 110.