1. La commémoration à la Smithsonian Institution, 1964-1976

Au fil des célébrations (à l’occasion de l’anniversaire de la naissance de Hamilton, de Lincoln, puis de la Guerre de Sécession), la commémoration et sa préparation suscitent une activité continue au sein de l’Etat. A l’examen de l’activité muséographique à la S.I., il est possible d’élargir ce constat. Dans la décennie qui précède 1976, la quasi-totalité de l’activité muséographique est orientée vers la commémoration. L’effort commémoratif s’enchaîne donc sans interruption avec l’intense activité qui a permis l’ouverture progressive du Museum of History and Technology de 1964 à 1967. Ainsi la continuité des pratiques commémoratives semble s’insérer dans une continuité plus large, celle des pratiques nationalistes. A la fin des années 1940, le sentiment général qu’un nouveau chapitre de l’histoire nationale commence encourage les conservateurs de la S.I. à formuler de nouveaux projets au nom de la grandeur de la nation. Le projet de rénovation des expositions et celui de nouveau musée d’histoire, formulés en termes d’intérêt national, sont favorablement accueillis par les instances fédérales dans les années 1950. Puis pendant une décennie, la Smithsonian Institution donne la priorité à la réalisation du Museum of History and Technology avant d’envisager de nouvelles activités dans le cadre de la commémoration du Bicentenaire.

Les pratiques commémoratives s’inscrivent donc dans l’ensemble plus large des pratiques nationalistes. Dans leur ensemble, elles font converger la rationalité des hommes de musée, qui cherchent à obtenir de meilleures conditions de travail et la rationalité nationale, représentée de manière beaucoup plus large par l’opinion publique, l’intelligentsia fédérale mais aussi ces mêmes hommes de musée. Les pratiques observées à la Smithsonian Institution sont donc nationalistes dans la mesure où elles sont investies d’un sens symbolique national. A ce propos, notons qu’en 1965 le Congrès exige de la Smithsonian Institution qu’elle lui présente un projet commémoratif pour 1976, mais ne lui ordonne jamais explicitement de construire un projet patriotique ou nationaliste473. La rationalité professionnelle des acteurs des Musées Nationaux est donc déterminée par une rationalité commémorative, elle-même déterminée par la rationalité nationaliste.

Notes
473.

« patriotique » serait vraisemblablement le terme employé en raison de sa connotation positive.