En 1893, le sculpteur Augustus Saint Gaudens entreprend la réalisation d’une grande mosaïque à l’entrée de la salle des régents de la Smithsonian Institution. A cette date, Saint Gaudens est au sommet de sa carrière et est l’une des grandes figures artistiques de la nation. Son travail a une forte dimension patriotique : depuis bientôt deux décennies, il réalise des œuvres monumentales commémorant la Guerre de Sécession à New York, Boston et Chicago571. Cette nouvelle mosaïque à laquelle il travaille est le sceau dont se dote alors la Smithsonian Institution. Au centre, une carte représente partiellement le monde et sa forme circulaire suggère un globe terrestre. Bien qu’elle ne soit pas indiquée sur la carte, la capitale des Etats-Unis, Washington, est au centre géométrique du cercle. La carte est surmontée de quelques mots extraits du testament de James Smithson : « for the increase and diffusion of knowledge », qui font référence au don de sa fortune afin que soit créée aux Etats-Unis une institution ayant pour but « l’accroissement et la diffusion du savoir ». Au dessous de la carte figure le nom de la Smithsonian Institution et sa date de fondation. Elle est encadrée par deux torches qui évoquent le pouvoir éclairant du savoir et par sa devise inscrite en plus petits caractères : « per orbem » – « de par le monde ». Si la carte est pensée comme une illustration de la devise, elle offre cependant une vision remarquablement ethnocentrique du monde : le sceau nous offre ainsi un premier aperçu du rapport problématique qu’entretiennent à la Smithsonian Institution nationalisme et universalisme.
En 1966, à l’occasion du bicentenaire de la naissance de James Smithson, la Smithsonian Institution se dote d’un logo. Elle sera désormais représentée par un soleil blanc sur fond noir (ou jaune sur fond bleu) et par la mention « Smithsonian Institution Washington, D.C. ». Ce changement d’esthétique n’est pas surprenant de la part de Dillon Ripley, qui depuis sa prise de fonction deux ans auparavant, révolutionne la culture interne de la maison. Le motif solaire est emprunté au blason de la famille Smithson, ce qui ancre le nouveau logo dans la tradition. Il représente également une rose des vents, car quatre de ses rayons indiquent les points cardinaux. Il n’indique pas nécessairement un changement du discours officiel sur la mission universaliste des musées : en effet, sa symbolique est proche de celle du sceau de Saint Gaudens. La lumière des torches est remplacée par le soleil et la mission universaliste de la devise « per orbem » par les points cardinaux de la rose des vents. Cependant, la dimension ethnocentrique de la carte a disparu et seules demeurent les connotations universelles.
Pour les mêmes cérémonies de 1966, le Secrétariat de la Smithsonian Institution se dote d’un médaillon symbolique572. Le médaillon, dont on trouve la reproduction sur les communiqués de presse, est l’agrandissement d’une pièce de monnaie athénienne. Au centre de l’image figure une chouette, symbole d’Athéna et de la sagesse, surmontée d’un rameau d’olivier, l’arbre associé à la déesse. Dans la mythologie grecque et dans la mythologie chrétienne, le rameau d’olivier est un symbole de paix et de bonne volonté, comme sur le drapeau des Nations unies. La chouette, elle, représente l’idéal de promotion du savoir de la Smithsonian Institution, à l’instar du sceau de Saint Gaudens et du nouveau logo. Cet ensemble iconographique témoigne de la continuité de l’éthique universaliste à la Smithsonian Institution. Pourtant, à partir des années 1960, ses nouveaux musées proposent de nouvelles représentations muséographiques de la nation. Comment la Smithsonian Institution, fondée sur des principes universalistes, peut-elle être dans le même temps un lieu central de la définition nationale et donc une entreprise éminemment particulariste ?
Le paradoxe n’est qu’apparent car le national, c'est-à-dire, le particulier, se définit par rapport à l’universel. Ce phénomène est souligné par des travaux qui décrivent le nationalisme dans son rapport au reste du monde. Ainsi Michel Winock, qui s’est intéressé au cas français, remet-il en cause l’idée que la France ait connu un nationalisme de droite et un nationalisme de gauche, ou encore un nationalisme républicain et un nationalisme conservateur. Il situe plutôt le clivage entre un nationalisme « ouvert » et un nationalisme « fermé » :
‘Nationalisme ouvert : celui d’une nation, pénétrée de sa mission civilisatrice, s’auto-admirant pour ses vertus et ses héros, oubliant volontiers ses défauts, mais généreuse, hospitalière, solidaire des autres nations en formation, défenseur des opprimés, hissant le drapeau de la liberté et de l’indépendance pour tous les peuples du monde. Ce nationalisme-là, on en retrouve l’esprit et l’enthousiasme jusque dans l’œuvre coloniale. […]Anatol Lieven utilise une autre image pour différencier deux aspects du nationalisme aux Etats-Unis. Il nomme le « Credo américain » « un ensemble de convictions fortes et de principes démocratiques, juridiques et individualistes, qui forment le socle de l’Etat et de la Constitution ». Il oppose à ce credo national son « antithèse », dont les racines sont ethno-religieuses, qui inclut « les sentiments anti-immigrés d’une partie de l’Amérique blanche traditionnelle, la culture spécifique du Sud blanc, ainsi que les convictions et les programmes des lobbies ethniques » 574. Bien qu’il ne fasse pas référence à Winock, Lieven retrouve la distinction de ce dernier entre un projet national dont les idéaux ont une ambition universelle et un sentiment national nourri de peur et d’exclusion du monde. Les deux auteurs s’accordent pour considérer le nationalisme comme constitué de ces deux facettes.
Ces travaux présentent l’inconvénient de décrire la relation entre la nation et le monde sous la forme d’un jugement de valeur. Pour Winock, l’analogie est psychologique et pathologique : il présente le rapport au monde d’une communauté de citoyens comme s’il s’agissait d’une personne plus ou moins ouverte aux autres et précise que son ouvrage aurait également pu s’appeler « le moi national et ses maladies » 575. Pour Lieven, qui de manière significative intitule son ouvrage America Right or Wrong, l’analogie est religieuse : au « credo » national, il oppose « l’antithèse », sorte d’antéchrist qui ne fait pas moins partie de la religion civile. Ce jugement de valeur est doublé d’une explication en termes d’échec : « l’antithèse » du nationalisme serait le fait des vaincus et des laissés pour compte576. Les deux démonstrations découlent de l’idée selon laquelle il y a un bon et un mauvais nationalisme : on retrouve ce clivage en anglais comme en français dans le vocabulaire courant, qui oppose le patriotisme, connoté positivement, au nationalisme, aux connotations souvent réprobatrices.
A travers une étude du discours nationaliste aux Etats-Unis dans les décennies qui suivent la Seconde Guerre mondiale, Tom Engelhardt présente pour sa part les mutations d’un nationalisme essentiellement « fermé ». Son ouvrage s’attache à retracer les mutations de la culture populaire et du rapport au monde des Etats-uniens après 1945. Il démontre l’existence d’une « culture de la victoire », ciment narratif de la communauté nationale contre l’ennemi. Cette « culture de la victoire » oppose les Etats-Unis, dont les héros sont d’origine européenne et empreints d’une profondeur psychologique, à un ennemi impersonnel, ethniquement et racialement autre, dont l’archétype est l’Indien. Elle s’exprime dans un schéma narratif constamment rejoué, celui des péripéties qui conduisent à la défaite de l’ennemi et à la victoire de la nation577. Les conclusions d’Engelhardt s’appuient sur des productions de la culture populaire telles que le jeu des enfants et des fictions littéraires et audiovisuelles. Dans le discours muséographique de la Smithsonian Institution en revanche, on constate que n’apparaissent pas de figures de l’ennemi ou d’autres aspects d’un nationalisme « fermé » : les expositions offrent plutôt des représentations de la nation sur le mode d’un nationalisme ouvert.
Winock, Lieven et Engelhardt nous fournissent un premier outil de description de l’argumentaire nationaliste. Les travaux de Benedict Anderson et d’Anne-Marie Thiesse permettent d’enrichir l’analyse. Ils suggèrent l’existence de divers registres discursifs propres à l’expression du nationalisme, dont le point commun est d’établir une relation entre le particulier et l’universel, ainsi qu’entre la nation et le monde.
En explorant les conditions transnationales d’apparition du nationalisme, Anne-Marie Thiesse s’attache à décrire la « révolution esthétique » qui traverse l’Europe à partir du XVIIIe siècle :
‘A partir du milieu du XVIIIe siècle, la nécessité de redéfinir les rapports entre l’universel et le particulier – préalable indispensable à la construction des nations – induit une mutation de la légitimité culturelle. Son centre de gravité fait l’objet d’un triple déplacement : historique, géographique, et social. A l’Antiquité gréco-romaine sont substitués les âges barbares, au monde méditerranéen l’Europe du Nord, aux salons de l’élite raffinée les chaumières rustiques. Une nouvelle théorie de la culture est formulée, qui permet de poser le national comme principe créateur de la modernité578.’Cette nouvelle esthétique est notamment formulée dans les travaux de Herder, philosophe originaire de Prusse Orientale qui jouit d’une influence considérable dans une intelligentsia qui commence à se penser comme cosmopolite. Herder redéfinit la relation entre universel et particulier en postulant que la valeur d’une culture tient à son originalité et à son authenticité. Il ne valorise pas l’authenticité de la culture allemande plus que les autres, mais manifeste au contraire un souci universaliste de voir s’affirmer toutes les nations579.
Dans le même temps, comme le note Benedict Anderson, la nation devient une catégorie de découpage du réel qui acquiert progressivement plus de légitimité que les communautés religieuses ou les empires580. C’est ce nouveau découpage du réel qui conduit Marx à parler du rassemblement de la classe ouvrière mondiale au-delà des frontières comme d’une « internationale » à la fin du XIXe siècle et qui conduit les Etats à s’organiser en une « Société des Nations » en 1920.
Cette montée en puissance du nationalisme passe par l’apparition de différents registres discursifs qui tous sont l’expression d’une relation entre la nation et le monde, qui se recoupent parfois et qui coexistent, sans toutefois former un ensemble philosophiquement cohérent. En premier lieu, la légitimité croissante des Etats nations donne lieu à un nationalisme internationaliste (c'est-à-dire un nationalisme qui se pense dans le cadre des échanges et de l’émulation entre les nations) dont on trouve l’illustration dans les expositions internationales (également dites universelles) qui jalonnent le XIXe siècle. L’héritage de Herder, qui valorise la diversité culturelle du monde et l’envisage comme une juxtaposition de cultures nationales, constitue un second registre, celui d’un nationalisme culturaliste. Winock et Lieven mettent en évidence un troisième registre, celui du nationalisme messianique. Ils montrent que les révolutions politiques états-unienne et française de la fin du XVIIIe siècle fondent une communauté politique nationale particulière sur des principes à l’ambition universelle. Le nationalisme messianique présuppose par ailleurs le caractère unique et exceptionnel de la nation. En effet, en tant que source de valeurs universelles, la nation ne souffre pas de concurrence581.
Le registre rationaliste constitue un dernier registre discursif du nationalisme. Il se fonde sur des mutations intellectuelles qui traversent le Siècle des Lumières, notamment la sécularisation du rapport au savoir et l’ambition de parfaire la connaissance du monde, telle qu’elle se manifeste dans l’entreprise des Encyclopédistes. Dans le cadre de la concurrence que se livrent les Etats nations au XIXe siècle, la recherche du savoir est constituée en un terrain universel sur lequel les nations se comparent. Dans ce registre discursif, la spécificité nationale tient à ses contributions (forcément importantes) au progrès de la science et de l’humanité dans son ensemble.
Ce nationalisme rationaliste est le registre qui apparaît le plus dans le discours nationaliste de la Smithsonian Institution jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. En cela, la S.I. est proche de la Bibliothèque du Congrès. Les deux institutions ont un projet culturel similaire : toutes deux ont des collections importantes sur les Etats-Unis, mais également une politique de collection universaliste. Elles ont donc une fonction nationale à plusieurs niveaux : elles représentent la somme de ce qu’est la nation grâce à leurs collections portant sur les Etats-Unis et elles sont au service de l’intérêt national en fournissant aux citoyens états-uniens des informations sur le reste du monde. En 1940, le directeur de la Bibliothèque peut formuler ses objectifs ainsi :
‘The Library of Congress should possess in some useful form all bibliothecal materials necessary to the Congress and to the officers of government of the United States in the performance of their duties.Pendant et après la Seconde Guerre mondiale, la Smithsonian Institution comme la Bibliothèque du Congrès justifient leur politique de collection universaliste en montrant qu’elle leur a permis de participer à l’effort de guerre. Si la « civilisation » est sortie victorieuse du conflit mondial, assure Luther Evans, le directeur de la Bibliothèque, c’est grâce à une mobilisation sans précédent du savoir des hommes sur eux-mêmes et leur environnement. Dans cette perspective, aucune facette du savoir universel ne devrait être négligée583. A la Smithsonian Institution, dont la devise est per orbem, on tient un discours similaire en 1945. Cette guerre a mis la science à contribution plus que tout autre conflit antérieur, peut-on lire dans le rapport annuel de 1945, qui souligne le rôle joué par les anthropologues, les biologistes et les géologues de la Smithsonian Institution en temps de guerre. Outre la publication d’essais sur l’histoire, l’histoire naturelle et la géographie de l’aire pacifique depuis l’Union Soviétique jusqu’à la Polynésie dans une série intitulée War Background Studies, la Smithsonian Institution s’enorgueillit de son rôle d’informateur auprès de l’armée :
‘Many of the requests were for information that had only an indirect war connection, but others led straight to the fighting fronts and had a direct bearing on the progress of the war. Among these latter requests were calls for means of identification of various kinds of disease-bearers, such as mosquitoes, rats, and mollusks; for reports on geography, peoples and other features of areas ahead of the actual fighting; for transliteration of Chinese and Japanese names on maps of war areas; for preparation of a survival manual for aviators and other personnel stranded in unfamiliar areas; and for many other items of equal importance584. ’Invoquée en temps de guerre, l’utilité de constituer des sources de savoir universel à la Smithsonian Institution comme à la Bibliothèque du Congrès est confortée par l’idée plus ancienne selon laquelle les nations contribuent conjointement au progrès universel du savoir. Avec ses allégories des contributions des nations du monde au savoir, l’intérieur du dôme de la Bibliothèque du Congrès illustre graphiquement cette idée, que l’on retrouve à la Smithsonian Institution dans de nombreuses assertions585. A partir du dernier tiers du XIXe siècle, les deux institutions portent donc un discours nationaliste rationaliste. Grâce à leurs collections nationales et internationales, elles espèrent contribuer au prestige que retire la nation de sa contribution à la culture et la science universelles.
En même temps que se développe le discours nationaliste rationaliste, les musées connaissent une intense croissance dans les pays industrialisés. L’avènement du musée comme projet encyclopédique coïncide ainsi avec la montée en puissance du nationalisme dans le cadre des Etats nations. Les musées ont pour ambition de contribuer à l’avancement du savoir et de couvrir tous les domaines de la connaissance humaine grâce à une représentation taxinomique du monde que l’on trouve (par une translation métonymique) dans leurs collections. L’avancement de la science au musée est fondé sur l’examen systématique des objets et place les collections muséographiques au centre de la démarche scientifique. En tant que vitrine de l’excellence scientifique nationale, le musée est l’un des marqueurs de la concurrence que se livrent les nations. De plus, l’attachement des conservateurs à l’accroissement des connaissances scientifiques est fortement marqué par une vision du monde centrée sur leur Etat nation d’appartenance. Que le musée tire son autorité d’une science positive et à ce titre universelle n’empêche pas que nombre des objets exposés au musée soient représentatifs de la communauté imaginaire, comme le souligne Dominique Poulot586. Par exemple, les expositions ethnologiques sur les Indiens sont à la fois une démonstration de la méthode universelle de l’ethnologie et une affirmation de la spécificité des Etats-Unis.
Cependant, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les musées ne sont plus le lieu de l’innovation scientifique ; de ce fait, il ne peuvent plus véhiculer le même discours sur la relation entre la nation et le monde. Depuis le début du XXe siècle, les laboratoires des universités élaborent d’autres représentations de la science qui mettent en cause l’épistémologie propre aux musées, notamment en fragmentant le champ de la recherche en de nombreuses disciplines nouvelles au degré de spécialisation accru et en construisant des objets de recherche à une autre échelle. A l’âge où l’on découvre l’infiniment petit, les artefacts muséographiques ne semblent plus être la seule échelle scientifique pertinente. Le bouleversement des catégories disciplinaires et épistémologiques remet en question la vocation du musée à être le lieu central des débats scientifiques contemporains. C’est pourquoi Steven Conn parle du musée des années 1920 comme d’un « dernier grand projet encyclopédique »587.
C’est en 1945 que les musées de la Smithsonian Institution sont confrontés à ce tournant. Leur légitimité ne réside plus dans l’avancement de la science, mais dans leur fonction de vulgarisation des connaissances auprès d’un public toujours plus nombreux. Les conservateurs héritent d’une culture scientifique nationaliste rationaliste, celle qui a présidé à la création des musées du XIXe siècle en général et à celle de la Smithsonian Institution en particulier. Au cours de trois décennies d’intense innovation muséographique, leur culture professionnelle évolue et les conduit à formuler de nouvelles représentations de la nation et du monde.
Dans le même temps, les représentations de la nation connaissent d’importantes mutations. Engelhardt fait commencer le déclin de la « culture de la victoire » avec le lancement des bombes atomiques sur le Japon en 1945. La puissance de l’arme atomique, en particulier lorsque l’URSS se dote de la bombe en 1949, inaugure un nouveau rapport au monde. Désormais, la victoire totale devient impossible, car elle serait suivie d’une contre-offensive atomique qui annihilerait la nation, voire le monde. C’est dans les longues années de l’échec militaire des Etats-Unis au Vietnam, de 1961 à 1975 que l’auteur lit la fin de la culture de la victoire.
Cette mise en cause du schéma narratif de la nation victorieuse implique une crise de la figure de l’ennemi. A l’ennemi clairement identifiable du mythe se substitue l’ennemi invisible du communisme, notamment l’ennemi invisible de la jungle vietnamienne, d’autant plus invisible qu’il est indiscernable des civils. En période de Guerre Froide, l’ennemi est certes extérieur, mais il est aussi intérieur. A cela s’ajoute le mouvement de lutte pour les droits civiques, qui renverse les rôles : un discours voit le jour dans lequel les Blancs, qui ont habituellement le rôle type du héros des Etats-Unis, sont désormais les oppresseurs. Simultanément, les émeutes qui éclatent dans les centres-villes font des Noirs un autre ennemi intérieur. Enfin, l’opposition à la Guerre du Vietnam présente les Etats-Unis, voire les soldats, comme des criminels de guerre : le rapport à la communauté imaginée et au monde s’en trouve bouleversé588.
Le discours muséographique qui s’élabore dans les décennies de l’après-guerre doit donc surmonter une crise de la légitimité ; les Musées Nationaux ne peuvent plus se définir uniquement par l’avancement de la science universelle et cela, alors que les représentations populaires de la nation connaissent d’importantes mutations. L’objet de ce chapitre est d’examiner comment se construisent, dans ce contexte, de nouvelles représentations des Etats-Unis et du monde à la Smithsonian Institution.
Wilkinson, Burke, and David Finn, photographs, Uncommon Clay: The Life and Works of Augustus Saint-Gaudens, Harcourt Brace Jovanovich, Publishers, San Diego 1985 ; « Smithsonian Seal », notice du catalogue « Historic Images of the Smithsonian », SIRIS.
On trouve des précisions sur les emblèmes de la Smithsonian Institution in « Wayne Clough Installed as 12th Secretary of the Smithsonian », communiqué de presse de la S.I., 26 janvier 2009, http:// newsdesk.si.edu.
Michel Winock, «Nationalisme ouvert et nationalisme fermé», in Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France (Paris: Points Histoire, Seuil, 1982), pp. 37-38.
Anatol Lieven, Le nouveau nationalisme américain (America Right or Wrong) (Paris: Jean-Claude Lattès, 2005 [2004]), p. 31.
Winock, «Nationalisme ouvert et nationalisme fermé», , p. 7.
Lieven, Le nouveau nationalisme américain (America Right or Wrong) , p. 34.
Tom Engelhardt, The End of Victory Culture : Cold War America and the Disillusioning of a Generation, Culture, Politics and the Cold War (Amherst: University of Massachussetts Press, 1995).
Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales, Europe XVIII e -XX e siècle (Paris: Seuil, 1999), p. 23.
Thiesse, La création des identités nationales , pp. 34-42.
Benedict Anderson, L'imaginaire national : réflexions sur l'origine et l'essor du nationalisme [1983], trad. Pierre-Emmanuel Dauzat (Paris: La Découverte, 1996), pp. 26-34.
Voir à ce sujet Immanuel Wallerstein, L'universalisme européen : de la colonisation au droit d'ingérence (Paris: Demopolis, 2008), Frederick Merk, Manifest Destiny and Mission in American History; a Reinterpretation (New York: Knopf, 1963).
Library of Congress Annual Report for 1940, pp. 27-29, in John Y. Cole, The Library of Congress in Perspective : a Volume Based on the Reports of the 1976 Librarian's Task Force and Advisory Groups (New York and London: R. R. Bowker Company, 1978), p. 30.
Cole, The Library of Congress in Perspective , p. 33.
« A Brief Summary of the Smithsonian Institution’s Part in World War II », Smithsonian Institution Annual Reportfor the year 1945, pp. 459, 461, 470.
Webster True, The First Hundred Years of the Smithsonian Institution, 1846-1946 (Washington, D.C.: Smithsonian Institution, 1946), p. 14.
Dominique Poulot, Musée et muséologie (Paris: La Découverte, 2005), p. 43.
Steven Conn, Museums and American Intellectual Life, 1876-1926 (Chicago: The University of Chicago Press, 1998), pp. 9, 31.
Engelhardt, The End of Victory Culture , pp. 108, 116, 233.