3. Les enquêtes-ménages de Niamey, Puebla, Lyon et Montréal

Les enquêtes-ménages utilisées dans ce travail sont différentes les unes des autres. Les responsables et les financeurs ne jouent pas le même rôle d’un point de vue institutionnel, les moyens engagés sont donc très variables. A Montréal (1998) et Lyon (1994-1995), les responsables des enquêtes sont les entités administratives responsables de l’organisation des transports dans leur métropole, ce sont donc respectivement l’A.M.T. et le SY.T.R.A.L.. Dans le cas des deux villes du Sud, la situation est différente puisque ce sont des structures de recherche en bonne partie situées dans des villes du Nord qui ont réalisé les enquêtes-ménages. Il s’agit du Groupement Interuniversitaire de Montréal (G.I.M.) pour l’enquête-ménages de Puebla (1993-1994) et du Laboratoire d’Economie des Transports (L.E.T.) pour Niamey (1996). Le tableau 1 présente une synthèse de quelques caractéristiques des enquêtes-ménages des quatre villes choisies.

Le L.E.T. a organisé l’enquête à Niamey (1996). Les enquêtes étaient menées en face à face au domicile des enquêtés, du 26 novembre au 11 décembre 1996, par les enquêteurs de la division des statistiques [Diaz Olvera & alii, 1999]. Répartis dans 29 zones, 750 ménages comportant 2 732 individus (ayant réalisé 9 116 déplacements en tout) ont été interrogés. C’est l’enquête présentant les effectifs les plus faibles. Seuls les membres des ménages âgés de 14 ans et plus ont été enquêtés, aussi bien les jours de semaine que les week-end. Contrairement aux autres enquêtes que nous utilisons, l’ensemble des quartiers de l’aire urbaine n’a pas été enquêté. Une typologie a priori des territoires urbains niaméens a permis, sinon de viser une représentativité des populations, de prendre en compte la diversité des espaces. Nous reviendrons par la suite sur les conséquences de ce choix en termes de traitement de données. Si les effectifs et la couverture spatiale de l’enquête ne sont donc pas très bons, la diversité et la précision des questions offrent à l’analyste une grande liberté pour les traitements secondaires.

Tableau 1 : Enquêtes-ménages à Montréal, Lyon, Puebla et Niamey
Villes Année de l’enquête Responsables de l’enquête Nombre d’individus enquêtés
Niamey 1996 L.E.T. 2 732 personnes
Puebla 1993-1994 G.I.M. 14 818 personnes
Lyon 1994-1995 SY.TR.A.L. 13 997 personnes
Montréal 1998 A.M.T. 164 075 personnes

L’enquête-ménages réalisée à Puebla du mois de novembre 1993 au mois de février 1994 a été conduite par le Groupement Inter-universitaire de Montréal, dans le cadre du programme de Partenariat en Développement Urbain associant des unités de recherche mexicaines et québécoises. L’enquête a donc été réalisée par des chercheurs des deux nationalités. L’Université Autonome de Puebla et le Gouvernement de l’Etat de Puebla y ont activement participé. Les entretiens ont eu lieu en face-à-face au domicile des enquêtés. 3 505 ménages ont répondu, ce qui correspond à 14 818 individus et 27 603 déplacements. Chaque membre des ménages ayant plus de 5 ans a été enquêté. Les revenus ne font pas partie des variables demandées, pour des raisons de fiabilité des réponses données. Cette lacune impose l’utilisation de proxys tels que le niveau d’éducation ou la catégorie socioprofessionnelle (C.S.P.).

Dans le cas de l’enquête lyonnaise, la maîtrise d’ouvrage a été confiée au SY.T.R.A.L. mais il était assisté par la Direction Départementale de l’Equipement du Rhône (D.D.E. 69), le Centre d’Etudes Techniques de l’Equipement de Lyon (C.E.T.E.) et l’Agence d’Urbanisme de la Communauté Urbaine de Lyon (AG.UR.CO.). La maîtrise d’œuvre a quant à elle été confiée à l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques Rhône-Alpes (I.N.S.E.E.) et au C.E.T.E.. La mise en œuvre a été conforme à la méthodologie nationale des enquêtes-ménages du C.E.R.T.U. [1999]. Les enquêtes ont donc été menées comme à Niamey et Puebla au domicile des enquêtés, du milieu du mois de novembre 1994 au début du mois d’avril 1995 [I.N.S.E.E. & alii, 1995]. Pendant cette période, 6001 ménages ont été enquêtés, ce qui représente 13 997 individus et 53 216 déplacements.

Dans le cas de Montréal, et pour la première fois en 1998, l’enquête est plus précisément le résultat d’une implication conjointe de plusieurs acteurs publics (se référer à la description des transports publics montréalais pour les sigles) : l’A.M.T., la S.T.C.U.M. (devenue S.T.M.), la Société de Transport de la Rive-Sud de Montréal (devenue R.T.L.), la Société de Transport de la ville de Laval (S.T.L.), le Ministère des Transports du Québec (le M.T.Q.) et le Ministère des Affaires Municipales et de la Métropole (M.A.M.M.) [A.M.T., 2000]. Ces différents acteurs ont des implications variables. Le M.T.Q. est l’un des plus importants et a contribué au financement de l’enquête à hauteur de 70 %. Le coût de l’opération est sans aucun doute le plus élevé des quatre enquêtes-ménages que nous utilisons, il atteint 1,1 millions de dollars canadiens. Le questionnaire est administré par téléphone et les réponses sont directement saisies sur informatique. Une géo-localisation immédiate des sites a été rendue possible grâce au système MADITUC (Modèle d’Analyse Désagrégée des Itinéraires de Transport Urbain) développé par l’équipe de R. Chapleau à l’Université de Montréal. Le choix d’une enquête téléphonique présente des avantages et des inconvénients déjà évoqués en partie. La flexibilité de l’administration des questionnaires permet dans un premier temps de limiter les coûts par enquêté donc de tabler sur un échantillon important (65 227 ménages, soient 164 075 individus et 383 552 déplacements). Chaque ménage, prévenu précédemment par un courrier, choisit un enquêté référent qui va préciser les parcours de l’ensemble des membres. Ce principe implique assez directement, pour les enquêtés non-référents, une sous-estimation des déplacements intermédiaires en général, et de leurs petits déplacements à pied en particulier. Une prise de position plus forte à l’avenir de la Ville de Montréal devrait être associée à une prise en compte de ce biais (cet acteur a tout intérêt en effet à ce que les petits déplacements à pied soient mieux appréhendés). L’enquête a été réalisée de fin-août à mi-décembre 1998, ce qui correspond donc à la période automnale. Pour limiter la durée de l’entretien téléphonique, les responsables de l’enquête montréalaise ont décidé de faire l’impasse sur un certain nombre de variables, jugées insuffisamment fiables. C’est le cas en particulier des durées de déplacements (les heures d’arrivée n’ont pas été demandées) et des revenus. Ces derniers ont été évalués grâce à une mise en parallèle des données de l’enquête-ménages (grâce à leur grande précision géographique) avec celles du recensement de la population effectué en 2001.

Les différences d’effectifs et de variables disponibles dans les enquêtes de chaque ville limite a priori la comparaison directe des données. Les tendances mises en exergue peuvent cependant être confrontées en structure, pour une analyse comparative à vocation compréhensive. Celle-ci s’articulera autour de plusieurs typologies.