B. Une réflexion sur la ségrégation urbaine en trois temps

Tel que le suggère la problématique, l’individu est au cœur de notre réflexion sur la ségrégation urbaine. Celle-ci est abordée dans ce travail au travers d’une étude des modes de vie et des relations tissées par les citadins avec les espaces urbains. Trois temps ponctuent notre approche et organisent la présentation des résultats (dans la partie III). Ceux-ci contribuent tous à la réponse à notre question de recherche, concentrée autour de l’intérêt d’une approche des comportements de mobilités et d’activités des individus pour compléter l’appréhension usuelle de la ségrégation sur une base résidentielle.

La typologie individuelle fait partie intégrante du premier temps, les activités réalisées constituant l’entrée par laquelle les modes de vie urbains sont considérés. Au-delà de la caractérisation des citadins selon les déplacements réalisés et leurs motifs, cette typologie est mobilisée pour évaluer les effets du lieu de résidence sur la nature des activités réalisées. Les deux premières sections de la partie III y seront consacrées.

La place des territoires attractifs en général et du centre-ville en particulier dans les espaces pratiqués au quotidien par les citadins sera considérée dans la troisième section de la troisième partie. Elle permet de rendre compte des populations concernées par la polarisation des activités en certains espaces. L’immobilité et les modes de vie locaux sont considérés ensuite. Ils suggèrent effectivement des relations spécifiques aux espaces urbains, centrées sur le quartier. Ces deux temps permettent, de manière complémentaire, de porter un regard sur la diversité des « modes de ville » et la nature des populations les plus sensibles, sujettes à l’exclusion sociale. Habiter un lieu plutôt qu’un autre a des conséquences nettes plus encore sur les espaces pratiqués au quotidien que sur les activités réalisées. Tout comme l’urbanisme et la planification des transports doivent être associés, la ségrégation résidentielle et la mobilité quotidienne ont tout intérêt à être analysées de manière intégrée.

Les résultats obtenus dans chacun des cas sont mis en commun au fil de la présentation des résultats, mais ne concernent que les grandes tendances observées. « Il faut d’abord construire des spécificités nationales au niveau microsocial. Pendant cette phase l’ignorance du contexte national est autant un atout qu’un handicap pour le chercheur. Dans un deuxième temps il s’agit d’interroger à partir d’elles des théories élaborées à d’autres niveaux d’analyse, pour voir si il y a des cohérences et si ce rapprochement permet de trouver des éléments de compréhension supplémentaires » (Vassy, 2003:223). Points communs et divergences entre nos quatre études de cas nous permettent finalement de tenir un discours plus complet sur les modes de ville et la ségrégation urbaine contemporaine.