II. Les typologies fonctionnelles à Niamey, Puebla, Lyon et Montréal, les grands pôles d’activités et les différentiels d’attractivité

Avant de présenter plus précisément les fonctions urbaines que nous avons choisi d’étudier dans l’ensemble des villes de notre corpus, nous souhaitons nous attarder sur quelques spécificités liées aux données utilisées. Le premier point concerne la disponibilité de certaines variables dans les enquêtes-ménages transport. Parce que le type d’emplois et les territoires urbains sur lesquels ils sont situés diffèrent nettement selon les secteurs secondaire et tertiaire, ceux-ci ont été considérés successivement. Les enquêtes-ménages de Lyon et Montréal n’offraient pas cependant la possibilité de faire cette distinction. Nous avons parallèlement décidé d’étudier séparément les emplois salariés et non salariés dans la ville de Niamey dans la mesure où ils renvoient à des situations différentes (stabilité, protection sociale, etc.) et permettent partiellement de rendre compte de la différence entre les emplois formels et informels. Les démarches, qui permettent en partie de renseigner la fonction administrative, ne font pas partie des modalités disponibles parmi les motifs à Puebla et Montréal. Elles n’ont donc pas été considérées dans ces deux villes. Il en est de même pour le motif « religion », non renseigné dans les enquêtes lyonnaise et montréalaise, pour des raisons plus évidentes cette fois, puisque la fréquence de ce type de déplacement y est réduite en semaine à sa portion congrue. Les déplacements pour les études n’ont été pris en compte qu’à partir du cycle secondaire dans la mesure où les écoles primaires sont relativement bien réparties et où nous n’avions pas ce renseignement dans l’enquête-ménages de Niamey (les déplacements des citadins de moins de 14 ans ne sont pas recensés).

La précision géographique a été jugée insuffisante à Puebla. Le territoire poblanais a effectivement été découpé en 27 zones dans le cadre de l’enquête. La pondération a été calculée par les responsables de l’enquête relativement aux effectifs enquêtés et au nombre d’habitants38 dans chacune de ces zones. Ce découpage « visait à capter un maximum de déplacements au niveau local tout en respectant les exigences de représentativité » (G.I.M., 1994:8). La taille moyenne de ces zones est de 8,7 km², variant de 1,64 km² pour la zone Centro Norte à 34,4 km² pour la zone San Pedro Cholula. Pour une plus grande précision, nous avons utilisé le découpage de l’espace poblanais (construit pour le recensement de 1990) en 352 petites zones appelées Areas Geoestadísticas Básicas, ou plus simplement AGEB. La localisation des ménages, l’origine et la destination des déplacements étaient renseignés à cette précision dans l’enquête mais nous ne disposions pas du fond de carte associé. Nous l’avons donc construit. Dans le cas lyonnais, nous avons utilisé le découpage de l’aire urbaine en 333 zones. Celui-ci permet de pointer les « générateurs ponctuels » (I.N.S.E.E., SY.T.R.A.L. & C.E.T.E., 1995:83). Sont délimités plusieurs pôles industriels, commerciaux, de santé, d’enseignement, les gares et aéroports, les parcs et espaces verts, et encore divers restaurants et cités universitaires. Dans le cas montréalais enfin, nous avons choisi de baser nos traitements sur la base d’un découpage en 757 secteurs de recensement.

Qu’en est-il alors de ces différents découpages ? Si certains d’entre eux sont plus précis que d’autres, quelles en sont les conséquences en termes d’analyse ? Avec un découpage plus précis, nous serions moins en mesure sur un territoire donné de localiser des territoires polyfonctionnels et serions contraints de baisser les seuils pour localiser les pôles d’attraction. Nous visons cependant une certaine précision pour décrire ces pôles. Plusieurs remarques méritent alors d’être faites. D’une part, plus la taille moyenne des zones de notre découpage sera grande, moins notre découpage sera précis. D’autre part, à densité de population fixée (ce qui sous-entend à densité d’activité fixée), la surface de la ville n’aura pas d’influence sur la précision associée à une zone de taille donnée. Par contre, à surface égale de l’aire urbaine, une augmentation de la population (donc de la densité) aura comme effet de faire perdre de la précision à une zone de taille donnée. Il ressort de ces trois remarques que deux variables vont influer sur la précision de nos découpages, la taille moyenne des zones considérées et la densité moyenne de population sur l’ensemble de l’aire urbaine étudiée. Nous avons effectué ces calculs pour les quatre aires urbaines considérées, les résultats sont présentés dans le tableau 2.

Les deux déterminants de la précision des découpages étant indépendants, on peut les multiplier et construire alors un nouvel indicateur, qui renvoie à un nombre d’habitants par zone, donc une densité zonale ; plus elle est faible, meilleure est la précision du découpage. Au regard de cette donnée, les découpages de nos 4 aires urbaines s’avèrent finalement relativement proches du point de vue de leur précision, même si celui de Puebla apparaît légèrement plus précis. En nous fixant sur ce premier résultat, nous pouvons opter pour des seuils d’attraction39 équivalents en absolu. Plutôt que de travailler sur le nombre d’entrées dans chaque zone, nous avons préféré utiliser des données relatives, en pourcentage sur l’ensemble de l’aire urbaine. Il convient donc d’ajuster les seuils vis-à-vis de la population concernée dans chaque aire urbaine (ensemble des citadins de 14 ans ou plus résidant sur le territoire de l’enquête). Cela nous porte finalement à prendre comme valeur 5 et 10 % à Niamey, 1,5 et 3 % à Puebla et Lyon et 0,5 et 1 % à Montréal.

Tableau 2 : Précision des découpages dans les quatre aires urbaines considérées
Aires urbaines Surface moyenne des zones du découpage (en km² par zone) Densité de population moyenne sur l’ensemble du territoire étudié (en habitant/km²) Précision des découpages (en habitants/zone)
Niamey 0,53 6000 3180
Puebla 0,67 4000 2680
Lyon 3,18 1000 3180
Montréal 5,71 522 2980

Dans l’enquête réalisée à Niamey, tous les quartiers de l’aire urbaine n’ont pas été enquêtés. Lors de la réalisation de l’enquête-ménages, une représentativité de l’ensemble des quartiers a été visée par les chercheurs en charge de sa réalisation. Les quartiers enquêtés ont été choisis sur la base d’une typologie a priori de l’espace niaméen [Diaz Olvera & alii, 1999]. Pour passer des déplacements recensés dans l’enquête aux déplacements de l’ensemble de la population niaméenne, nous avons calculé des coefficients d’expansion. Les données utilisées pour ce faire ont été extraites et actualisées à partir du recensement de la population réalisé en 1988. Les coefficients d’expansion varient de 111,2 à 129,9.

Notes
38.

Le nombre d’habitants a été estimé grâce aux données du XIe recensement général de la population, réalisé en 1990 par l’INEGI.

39.

Seuils à partir desquels un territoire va pouvoir être considéré comme attractif. Il renvoie au nombre d’entrées par zone.