A. Le statut comme caractéristique de différenciation majeure

1. Les statuts, répartition et position sociale associée dans les quatre aires urbaines

Dans les quatre cas, les statuts se sont imposés comme primordiaux pour comprendre les activités réalisées. Les modalités qui y sont associées ne sont pas exactement les mêmes selon les enquêtes. A Niamey, Puebla et Montréal, les scolaires et les étudiants sont regroupés (dans l’enquête) au sein d’une même modalité. Ces deux groupes de citadins ont alors été distingués au moment de la seconde segmentation. Les actifs salariés et non-salariés sont considérés séparément dans la capitale nigérienne, ce qui fait écho à l’opposition entre le travail formel et informel, associé à des situations professionnelles et sociales différentes [Baumann, 2003]. Pour G. Massiah et J.-F. Tribillon [1987], les sociétés africaines de la fin des années 90 semblaient se partager « en deux grands regroupements selon le critère de la stabilité de l’emploi, de l’accès à des revenus stables, mêmes faibles, issus du secteur monétaire moderne » (op. cit.:96). Cette remarque n’a pas perdu, à notre avis, de sa pertinence depuis. Dans les deux villes du Nord, les actifs à temps plein et à temps partiel sont distingués. Les derniers peuvent avoir choisi ou ont été contraints à des horaires moins exigeants pour s’occuper des enfants (ce sont souvent des femmes dans ce cas [Garner & alii, 2005]), mais aussi pour diverses raisons personnelles (problèmes de santé, projet extra-professionnel, etc.). Les chômeurs, les sans-activité et les retraités forment les trois dernières modalités généralement présentes dans les enquêtes. L’enquête montréalaise regroupe les deux premières au sein de la modalité autres. A Puebla et surtout Niamey, les chômeurs et les retraités sont peu nombreux dans la mesure où ces situations sous-entendent, pour les responsables en charge de ces enquêtes-ménages, des allocations et des institutions pour les verser, qui n’existent pas toujours et ne touchent tout au moins qu’une faible part des personnes qui pourraient être concernées. Les chômeurs sont donc sous-estimés par rapport aux populations concernées par la définition du B.I.T.47.

Dans le cas montréalais, nous avons recodé les individus de la catégorie autres ayant fait au moins un déplacement de motif travail dans les actifs à temps partiel (ce qui rend compte de l’instabilité probable de leur situation, à la base du codage parmi les statuts autres), ainsi que ceux qui ont fait au moins un déplacement de motif études dans le groupe des étudiants. Les caractéristiques d’âge, de genre, mais également les revenus des ménages d’appartenance ne diffèrent que faiblement entre les populations recodées et celles des groupes dans lesquels nous les avons inséré.

Les statuts permettent de définir un ensemble de contraintes auxquelles ils sont rattachés [Hanson & Hanson, 1981]. L’école, l’université et le travail sont imposés sur une base généralement quotidienne respectivement aux scolaires, aux étudiants et aux actifs. La recherche d’emploi nécessite également de la part des chômeurs certains rendez-vous professionnels et les personnes au foyer (souvent des femmes) ont la responsabilité le cas échéant des enfants. Les retraités sont quant à eux parfois contraints par leur état de santé déclinant, bien que le vieillissement de la population dans les métropoles occidentales passe par une amélioration de la santé des personnes âgées. Ces contraintes sont à mettre en balance avec des ressources, que l’on peut parallèlement associer à chaque statut. Généralement, les étudiants, les chômeurs, les sans-activité et les retraités disposent d’une plus grande flexibilité dans leur temps que les scolaires et les actifs, mais ces derniers peuvent profiter de leurs ressources économiques directes.

Une certaine logique de l’ordre des rôles sociaux est respectée par les résultats obtenus statistiquement. Les coefficients de contingence obtenus atteignent 40 % à 60 % pour les activités contraintes (travail et études) et dépassent 10 % pour les autres activités. Le graphe 6 présente les répartitions des citadins selon leur statut dans les quatre aires urbaines de Niamey, Puebla, Lyon et Montréal. Une lecture Nord/Sud de ces répartitions est possible, tant elles se ressemblent à Niamey et Puebla d’un côté et à Lyon et Montréal de l’autre. Cela provient principalement de la forme des pyramides des âges dans les villes considérées.

Graphe 6 : Répartition des citadins selon leurs statuts dans les quatre aires urbaines
Graphe 6 : Répartition des citadins selon leurs statuts dans les quatre aires urbaines

Notes