A. Immobilité et mobilité locale

1. A Niamey, un large repli sur le local

Parmi les Niaméens, 9,5 % ne se sont pas déplacés le jour enquêté et 45 % sont restés à proximité de leur logement (ils ne s’en sont pas éloignés de plus de 1,25 km). Cette seconde proportion est très élevée. Nous rappelons ici que la part modale de la marche à pied est de près de 70 % de l’ensemble des déplacements dans cette ville.

Quelques différences importantes peuvent être mises en évidence entre les zones de résidence. (graphe 57). L’immobilité et plus encore la relation exclusive à la proximité sont particulièrement développées dans le centre, et le sont le moins dans le péricentre aisé. Les quatre autres types d’espaces résidentiels ne diffèrent pas beaucoup les uns des autres : les résidents des périphéries non-loties récentes sont juste un peu plus nombreux à ne pas être sortis de chez eux le jour enquêté, mais ils sont moins nombreux à s’être contentés des activités présentes à proximité du logement.

Graphe 57 : Immobilité et relation au local selon la localisation résidentielle à Niamey
Graphe 57 : Immobilité et relation au local selon la localisation résidentielle à Niamey

Les modes utilisés par les citadins vivant localement ne varient que peu selon la localisation de leur logement. Entre 90 % et 97 % de ces citadins se déplacent à pied (pas nécessairement exclusivement). Ceux qui vivent dans le centre ont une pratique plus élevée des transports collectifs et ceux qui vivent dans le péricentre aisé utilisent un peu plus la voiture particulière.

Graphe 58 : Immobilité et vie locale selon le statut à Niamey
Graphe 58 : Immobilité et vie locale selon le statut à Niamey

Plusieurs autres variables que la localisation résidentielle influent sur la propension à l’immobilité ou à la mobilité exclusivement locale. C’est le cas en particulier des statuts (graphe 58). Faute d’effectifs suffisants, les retraités n’ont pas été considérés. La proportion de citadins qui ne se sont pas déplacés le jour enquêté est relativement faible chez les scolaires/étudiants et les actifs salariés, puis augmente pour les actifs non-salariés et surtout les sans-activité (20 %). Les tendances sont sensiblement différentes pour ce qui est de la vie locale dans la mesure où les scolaires/étudiants sont plutôt nombreux dans ce cas. La vie de quartier concerne de manière croissante les actifs salariés, puis les actifs non-salariés et les sans-activité.

D’autres variables que le statut ont un effet sur la propension à l’immobilité et à la vie locale : le genre, l’âge, les niveaux de scolarité et de revenus. Les femmes sont plus concernées que les hommes par l’immobilité (15 % contre 5 %) et la vie à proximité (52 % contre 38 %). En avançant dans le cycle de vie, l’immobilité croît nettement (de 5 % pour les moins de 20 ans à 27 % pour les plus de 60 ans) tandis que la propension à la vie locale suit une courbe convexe (elle concerne surtout les plus jeunes et les plus âgés). Cela peut être observé sur le graphe 58, avec la spécificité des scolaires/étudiants (peu sont immobiles mais beaucoup restent à proximité du logement). Plus les niveaux de scolarité ou de revenus sont élevés, moins les Niaméens ne restent dans ou à proximité de leur logement. Le statut reste finalement la variable dont les effets sur les pratiques spatialement limitées sont les plus nets. Nous rappelons que cette variable n’est pas sans lien avec le genre, l’âge et les niveaux de scolarité et de revenus.

Si l’on croise les statuts et la localisation résidentielle, nous remarquons sur le tableau 8 que quel que soit le lieu d’habitation, les actifs salariés sont rarement immobiles. L’accès à ce statut permet aux citadins concernés d’être peu dépendants du lieu d’habitation dans la mesure où ils sont plus motorisés et ont les moyens de prendre les transports collectifs. A l’inverse, la proportion de sans-activité immobiles varie fortement. L’immobilité des citadins des périphéries non-loties récentes est sensibles au statut de la personne considérée, 32 % des sans-activité de ce quartier sont immobiles.

Tableau 8 : Propension à l’immobilité selon la localisation résidentielle et le statut à Niamey
Tableau 8 : Propension à l’immobilité selon la localisation résidentielle et le statut à Niamey

La vie locale correspond à un rapport spécifique à la ville, elle concerne en proportion importante les résidents du centre quel que soit leur statut. A l’exception des actifs salariés, atypiques de ce point de vue, la proximité du logement est fortement investie par les Niaméens, comme le tableau 9 en rend compte.

Tableau 9 : Propension à la vie locale selon la localisation résidentielle et le statut à Niamey
Tableau 9 : Propension à la vie locale selon la localisation résidentielle et le statut à Niamey

Nous retiendrons dans le cas niaméen que l’accès au statut d’actif salarié a des conséquences très fortes sur l’immobilité et la vie locale, alors nettement moins élevée en proportion pour eux. C’est bien la spécificité de ces citadins qui explique la plus faible propension à l’immobilité et à la vie locale par les résidents du péricentre aisé (ils composent en plus forte proportion la population de cette zone).

La proximité du logement est de manière logique largement investie par les résidents du centre, et dépend ensuite assez nettement du lieu de résidence. Ce résultat est conforme aux analyses réalisées par D. Plat [2002], qui confirme un effet spécifique du lieu d’habitation sur les pratiques spatiales en général et le repli sur le quartier en particulier.