3. Lyon

10 % des Lyonnais ont été identifiés comme immobiles la veille du jour d’enquête, et 20,5 % sont restés à proximité de leur domicile (à moins de 1,25 km de celui-ci).

Tel que le graphe 62 le suggère, l’immobilité est peu dépendante des localisations résidentielles. Les proportions de citadins dans cette situation ne varient alors que de 8 % à 12 %, la valeur la plus élevée concernant les banlieues. Par contre, la relation au local est plus dépendante de la localisation du logement. Si 32 % des résidents du centre sont restés à proximité de chez eux, seuls 12 % et 14 % de ceux qui vivent dans l’Ouest lyonnais et en périphérie sont dans ce cas. L’éloignement au centre semble donc jouer sur la relation des individus au local mais il existe entre le centre et la périphérie une bande très large (du péricentre à la première couronne périphérique) au sein de laquelle le pourcentage de citadins restant à proximité de leur logement est quasiment constant. Des variations à des échelles fines à l’intérieur de cette bande existent certainement, mais ne sont pas visibles ici.

Graphe 62 : Immobilité et relation au local selon la localisation résidentielle à Lyon
Graphe 62 : Immobilité et relation au local selon la localisation résidentielle à Lyon

Le rapport au local résulte d’une pratique modale spécifique. Le graphe 63 met en lumière la baisse de l’usage de la marche à pied au fil de l’éloignement du domicile au centre, compensée par l’usage croissant de la voiture particulière. Les mobilités pédestres restent cependant les plus importantes en proportion, y compris dans les zones périphériques. Les transports collectifs et la voiture particulière passager sont peu usités par ces citadins géographiquement peu mobiles.

A l’intérieur même des espaces résidentiels, les rapports au local et à l’immobilité peuvent être très différents. Le statut porte alors une part importante de l’explication de cette variabilité interindividuelle, le graphe 64 permet d’en rendre compte.

Les actifs et les étudiants sont les citadins les moins à même de rester dans leur logement ou sa proximité. Parallèlement, presque un scolaire sur quatre concentre l’ensemble de ses activités autour du domicile alors que 3 % d’entre eux seulement sont restés immobiles. Cela souligne l’importance du quartier d’habitation pour ces jeunes citadins. L’immobilité et la vie locale concernent surtout les sans-activité, les retraités, et dans une moindre mesure les chômeurs, mais les fréquences d’individus concernés ne dépassent jamais 30 %.

Graphe 63 : Usages des modes par les citadins lyonnais aux modes de vie locaux selon leur localisation résidentielle
Graphe 63 : Usages des modes par les citadins lyonnais aux modes de vie locaux selon leur localisation résidentielle
Graphe 64 : Immobilité et vie locale selon les statuts à Lyon
Graphe 64 : Immobilité et vie locale selon les statuts à Lyon

Les revenus des ménages par unité de consommation complètent l’analyse. Les individus appartenant aux ménages les plus aisés (classement par quintile) se distinguent par une plus faible propension à l’immobilité (14 %) ou au mode de vie local (21 %), et inversement pour les plus défavorisés (respectivement 7 % et 14 %). Cette tendance souligne l’idée que rester dans le logement ou le quartier est souvent contraint. Cela se décline géographiquement avec une distinction entre espaces résidentiels plutôt aisés et plutôt défavorisés. Au fil de l’avancement dans le cycle de vie, l’immobilité va croissante, tandis que la vie exclusivement locale suit une courbe convexe (comme dans le cas poblanais), avec un repli plus important sur la proximité du logement par les plus jeunes et les plus âgés.

Nous avons ensuite étudié les effets conjugués du statut et de la localisation résidentielle. Le centre n’a pas été considéré à cause de la faiblesse des effectifs de ses résidents. A l’intérieur de chaque espace résidentiel tels qu’ils ont été définis, les fréquences de citadins restant au domicile ou à proximité varient nettement selon les statuts (tableaux 12 et 13). Cette variation est forte en particulier dans les banlieues, avec des proportions élevées de chômeurs ou de sans-activité immobiles. C’est cependant parmi les résidents de l’Ouest lyonnais que l’on retrouve les différences les plus marquées pour ce qui est du repli sur le domicile. La propension à la vie locale est variable dans les banlieues, ainsi que dans le péricentre et la première couronne populaire. Cela signifie que la dynamique locale, relativement prégnante dans ces quartiers, concerne surtout quelques statuts (sans-activité, retraités, scolaires et chômeurs). Elle est moins forte dans les autres espaces résidentiels, mais plus variée du point de vue des populations qui l’animent.

Tableau 12 : Propension à l’immobilité selon la localisation résidentielle et le statut à Lyon
Tableau 12 : Propension à l’immobilité selon la localisation résidentielle et le statut à Lyon

Les différences entre zones sont plus nettes pour certains statuts. Nous avons pu les évaluer en calculant les pourcentages de variance expliquée. L’immobilité des retraités, des chômeurs, des étudiants et des scolaires dépend par exemple beaucoup de leur lieu de résidence, tandis que le repli sur le local va varier fortement pour les étudiants, les retraités, les scolaires et les sans-activité. Les variations sont faibles pour l’immobilité et la pratique exclusive du local parmi les actifs à temps plein. La sensibilité dont nous faisons état ici se retrouve dans les effets des niveaux de revenus sur le rapport au local. Les étudiants et les sans-activité sont bien plus nombreux à rester à proximité de leur logement lorsque leurs revenus sont faibles (2 premiers quintiles) tandis qu’en pareille situation, les chômeurs, les retraités et toujours les sans-activité vont rester plus fréquemment chez eux.

Tableau 13 : Propension à la vie locale selon la localisation résidentielle et le statut à Lyon
Tableau 13 : Propension à la vie locale selon la localisation résidentielle et le statut à Lyon

Cette étude de l’immobilité et de la relation au local nous a permis de repérer à Lyon des différences importantes entre citadins. Les effets sociaux et géographique (associés à la localisation du logement) se conjuguent. Les répercussions se font spécifiquement ressentir alors sur certains territoires tels que les banlieues. La lecture en termes de contraintes des replis sur le logement et sur le quartier doit être nuancée par le fait que les populations défavorisées préfèrent parfois rester proche de leur logement alors qu’ils pourraient en sortir à diverses occasions, c’est un des apports importants des travaux effectués par A. Begag [1984] sur les banlieues lyonnaises et sur Vaulx-en-Velin en particulier.

De fortes variations ont également été mises en exergue entre zones de résidence, surtout pour quelques statuts tels que les scolaires, les étudiants, les chômeurs, les sans-activité et les retraités, qui sont les citadins dont les capacités de mobilité sont les plus réduites.