4. Montréal

Les personnes immobiles représentent 17,6 % des citadins montréalais, et ceux qui sont restés à proximité de leur logement 9 %. La technique de recueil des données ainsi que les acteurs en charge de la réalisation de l’enquête privilégient largement les déplacements en modes mécanisés, ce qui suggère une sous-représentation des déplacements à pied, et peut tendre par la même à une sur-évaluation des chiffres de citadins immobiles.

Les proportions les plus faibles de résidents restés immobiles et ayant concentré leurs activités à proximité de leur logement concernent les zones périphériques. Ceux qui ne sont pas sortis de leur domicile sont plus nombreux en proportion dans le centre, ou dans les espaces résidentiels péricentraux les moins aisés (péricentre-est, noyaux populaires péricentraux et dans une moindre mesure première couronne francophone). Il en est de même pour les citadins qui sont restés à proximité de leur logement. Ces tendances, qui peuvent être observées sur le graphe 65, cachent cependant des variations importantes à l’intérieur même des espaces résidentiels.

Pour les citadins restés à proximité de leur logement, les pratiques modales diffèrent largement selon les espaces résidentiels (graphe 66). Dans le centre, les noyaux populaires péricentraux, le péricentre-est et la première couronne francophone, la marche à pied domine largement tandis que la voiture particulière conducteur est majoritaire (alors même que les distances sont faibles) dans la seconde couronne montréalaise, l’Ouest anglophone et surtout la périphérie lointaine. Tel que nous le verrons dans la suite de cette section, les pratiques modales des citadins restant à proximité de leur logement varient principalement selon leur lieu de résidence, et moins nettement selon leur statut et la structure de leur ménage d’appartenance.

Graphe 65 : Immobilité et relation au local selon la localisation résidentielle à Montréal
Graphe 65 : Immobilité et relation au local selon la localisation résidentielle à Montréal
Graphe 66 : Usage des modes pour les citadins aux modes de vie locaux selon leur localisation résidentielle à Montréal
Graphe 66 : Usage des modes pour les citadins aux modes de vie locaux selon leur localisation résidentielle à Montréal

Nous avons évalué les différences concernant la propension des citadins à rester dans le logement ou à proximité selon leur zone de résidence. Même à l’intérieur de ces zones, les différences entre citadins sont importantes. Le statut, première variable de différenciation individuelle au regard des activités réalisées, confirme son effet discriminant (graphe 67) sur ces pratiques spatiales spécifiques. L’immobilité est forte en particulier chez les retraités et les statuts autres. Ces mêmes citadins ont une propension également supérieure à rester à proximité de leur logement.

Comme dans les cas des autres aires urbaines considérées, le statut n’est pas le seul facteur ayant un effet sur l’immobilité et la vie locale. Les femmes sont plus concernées que les hommes par ces comportements spatiaux spécifiques (22 % d’entre elles sont restées immobiles le jour enquêté contre 14 % d’hommes), mais les effets de l’âge et des niveaux de revenus sont plus nets encore. Les citadins qui ne sont pas sortis de leur logement varient ainsi en proportion de 8 % pour les moins de 20 ans à 46 % pour les plus de 70 ans. Ils sont parallèlement 28 % lorsqu’ils appartiennent aux 20 % des ménages les plus pauvres et 9 % pour les 20 % des ménages les plus riches. Nous n’avons indiqué ici que les chiffres qui concernent l’immobilité, les mêmes tendances s’observent pour les modes de vie locaux, mais les écarts sont moins importants. Nous avons conservé la variable des statuts pour la suite de notre étude, pour sa pertinence statistique et pour l’interprétation riche qui y est associée. Son lien avec les autres caractéristiques individuelsles (genre, âge, niveau de revenu) permet effectivement de comprendre les situations et les rôles sociaux associés.

Graphe 67 : Immobilité et vie locale selon les statuts à Montréal
Graphe 67 : Immobilité et vie locale selon les statuts à Montréal

En fixant localisation résidentielle et statut de l’individu, les tendances observées s’accentuent encore. Les contrastes entre les citadins à statut fixé mais résidant dans des zones différentes peuvent être assez marqués. C’est le cas en particulier pour les scolaires/étudiants. Les pourcentages d’individus immobiles le jour enquêté et de citadins ayant limité leurs activités à proximité de leur domicile sont présentés dans les tableaux 14 et 15. Les résidents des noyaux populaires péricentraux sont, en moyenne, les plus concernés par l’immobilité, et les différences interindividuelles sont maximales dans ces zones. Celles-ci sont importantes cependant dans plusieurs espaces résidentiels et ne semblent limitées que dans le centre, le péricentre ouest et l’Ouest anglophone, ces deux dernières zones étant les plus aisées de l’aire urbaine montréalaise.

Tableau 14 : Propension à l’immobilité selon la localisation résidentielle et le statut à Montréal
Tableau 14 : Propension à l’immobilité selon la localisation résidentielle et le statut à Montréal

La vie locale s’étiole en proportion avec l’éloignement au centre et la richesse relative des espaces résidentiels. On remarque également qu’elle concerne peu de citadins dans l’Ouest montréalais, et ce quel que soit leur statut. Les scolaires/étudiants, les statuts autres et les retraités semblent être les plus concernés et les plus sensibles à la localisation résidentielle (les pourcentages de variance expliquée sont plus élevés pour ces statuts, bien qu’ils soient globalement très faibles).

Tableau 15 : Propension à la vie locale selon la localisation résidentielle et le statut à Montréal
Tableau 15 : Propension à la vie locale selon la localisation résidentielle et le statut à Montréal

En fixant le statut, les effets des autres facteurs considérés sont mitigés. Ils sont plutôt faibles pour ce qui est des revenus, si ce n’est pour les retraités dont les revenus du ménage d’appartenance sont négativement corrélés avec la propension à l’immobilité. En ce qui concerne le genre, les tendances les plus marquantes concernent les citadins à la retraite, avec 44 % des femmes retraités qui ne sont pas sorties de chez elles la veille du jour d’enquête, contre 34 % des hommes. La relation à la proximité est mal expliquée par ces variables, quel que soit le statut.