1. Localisation résidentielle et activités réalisées

Le premier axe autour duquel cette partie s’est articulée portait sur la réalisation éventuelle de diverses activités par les citadins et la variabilité interindividuelle associée. Une première différence, qui oppose villes du Nord et villes du Sud, mérite ici d’être évoquée. Les localisations résidentielles, étudiées dans la seconde partie de cette thèse, diffèrent selon le niveau de revenus (surtout dans les deux villes du Sud) et la structure du ménage d’appartenance (plus encore dans les deux villes du Nord). Les typologies individuelles ont quant à elles mis en avant les effets des revenus sur les activités réalisées à Niamey et Puebla. Dans le même temps, l’accent était plutôt mis à Lyon et Montréal sur les structures des ménages. Une première lecture binaire des modes de vie urbains, ne tenant pas compte des localisations des activités, peut alors être proposée. Elle oppose dans les deux villes du Sud les plus aisés et les plus défavorisés, et dans les deux villes du Nord les familles et les ménages sans enfants. Y sont associées des localisations résidentielles et des activités spécifiques.

Que doit-on comprendre de cette première lecture de la ségrégation, économique à Niamey et Puebla, démographique à Lyon et Montréal. Dans les deux villes du Sud, non seulement les plus aisés et les plus défavorisés ne vivent pas dans les mêmes espaces, mais surtout ils n’exercent pas les mêmes activités au quotidien. Comme le concluent L. Diaz Olvera & alii (2005:259) pour Dakar, il semble qu’à Niamey et Puebla, « les carences de l’urbanisation et du système de transport viennent renforcer les processus de ségrégation ». Pour ce qui est des deux villes du Nord, l’opposition relevée renforce le contraste entre le centre (où vivent plutôt les petits ménages) et la périphérie (préférée par les familles). Deux dynamiques sont à l’origine des localisations périphériques [Madoré, 2004]. La première, sans doute prépondérante aux premières heures de la périurbanisation, rime avec le choix d’un accès à la propriété dans des quartiers peu denses et verdoyants. La seconde a le visage de la contrainte, elle est plus directement liée au marché foncier (les grands appartements dans les zones centrales et péricentrales sont chers, aussi bien à l’achat qu’à la location). Les choix de localisation des ménages en périphérie s’inscrivent dans la dialectique entre ces deux dynamiques, c’est-à-dire entre la contrainte et la préférence. Cette vie périphérique suppose alors le recours à la voiture particulière pour accéder aux services et activités du quotidien [Orfeuil, 1995]. C’est à ce niveau que la différence apparaît entre les résidents des périphéries, selon la facilité qu’ils ont à se déplacer (disposition d’un véhicule et moyens suffisants pour l’utiliser régulièrement). En d’autres termes, avoir des enfants rime souvent avec un éloignement du logement du centre de l’aire urbaine, et une dépendance plus grande vis-à-vis des modes de transports individuels.

Au-delà des caractéristiques des ménages, les différences entre citadins selon les activités réalisées se sont construites autour de divers facteurs individuels. Le statut s’est imposé dans les quatre aires urbaines comme une variable de différenciation de premier ordre, tant statistiquement que par l’interprétation pertinente qui y est associée. Les rôles sociaux et les situations économiques varient assez nettement selon ce facteur. Le genre est également apparu dans les quatre cas, mais concerne surtout à Lyon et Montréal les personnes âgées, qui font partie de générations au sein desquelles les différences hommes/femmes étaient et sont restées importantes. A Niamey et Puebla, ces contrastes sont plus nets encore et concernent les citadins de tous les âges. Le poids des rôles sociaux associés au genre s’affirme donc ici par une forte variabilité dans les activités réalisées.