Section 3. Le financement privé des infrastructures

La Charte des investissements de la CEMAC à son article 7 dispose que « les Etats membres font confiance à l’efficacité du secteur privé pour impulser le développement et la croissance. Ils entendent l’associer à la définition des stratégies et à la solution des problèmes de développement446 ». C’est aussi sur cette base que le Plan directeur consensuel des Transports de l’Afrique centrale prévoit une politique de consolidation du secteur des transports par la libéralisation des services, la pérennisation des systèmes de financement et de gestion des infrastructures, et le développement des partenariats public/privé447. Cette participation des opérateurs privés se justifie par des avantages partagés entre l’administration et les privés.

Trois raisons sont avancées pour expliquer le recours aux partenariats public/privé. La première raison est de répondre aux besoins d’équipements publics. Recourir aux financements privés permet de soulager une demande en infrastructures en forte croissance. Ce phénomène va s’accentuer, en raison même de l’intégration régionale. Les ressources publiques s’amenuisent, et le recours à l’impôt étant largement sollicité, les financements publics ne peuvent plus seuls assumer une telle demande sans se retourner vers les partenaires privés.

La deuxième raison du recours au financement privé des équipements publics est de substituer à la gestion administrative inefficace une logique d’entreprise. Financé et administré par une entreprise privée, le service public délégué jouit d’une meilleure rentabilité, rendue plus optimale par ce type de gestion. C’est ainsi que par souci de rendement, et par la recherche de techniques innovantes répondant à un marché de plus en plus concurrencé, et de moins en moins monopoliste, les pouvoirs publics préfèrent se tourner vers un opérateur privé dont les politiques sont traditionnellement celles de la rentabilité et de la productivité448.

Ce type de financement permet de bénéficier de la planification des opérateurs privés dont les priorités divergent parfois de celles de l’administration. Ainsi, tout projet ne sera lancé qu’une fois l’argent nécessaire à sa réalisation levé, afin d’assurer son financement jusqu’à son achèvement. Ce partenariat offre en outre aux parties cocontractants, ainsi qu’aux usagers, le bénéfice d’une gestion privée du service. La réalisation des grands travaux par des personnes privées permet en effet de mettre le dynamisme de l’entreprise au service d’objectifs d’intérêt général. L’administration publique du projet est alors reléguée par la gestion privée des ses intérêts. Par ailleurs, la concurrence dans le secteur est une bonne incitation pour améliorer la qualité du service, ses performances auprès des utilisateurs et la rentabilité des investissements. Enfin, devant répondre à une inadéquation de l’offre des services publics, constamment remise en cause, tant par les exigences des usagers que par les nouveautés technologiques, les pouvoirs publics n’hésitent plus à faire appel au secteur privé afin de contenter au mieux, à moindre coût, et dans un délai raisonnable, ces nouvelles demandes croissantes.

La troisième raison est que le financement privé permet d’éviter d’augmenter l’endettement public. C’est ainsi que, face aux caisses publiques qui se vident, ou de l’insuffisance des ressources publiques, les pouvoirs publics peuvent réaliser les projets sur fonds privés.

Le financement privé des ouvrages publics offre, de surcroît, une chance de rétablissement de l’équilibre budgétaire. Le recours au financement privé des infrastructures, notamment par la concession, assure un remboursement adapté au rythme des revenus générés par le projet sans peser sur le budget annuel. C’est ainsi que l’administration peut réserver ses ressources budgétaires au financement des projets qui ne pourraient être confiés au secteur privé.

L’étude présente la technique de concession des services publics (§1) qui est un des mécanismes juridiques permettant de conduire ce partenariat entre l’Etat et les opérateurs privés. Elle s’interroge ensuite sur la contraintes qui peuvent freiner cette participation des privés (§2).

Notes
446.

Article 7 de la Charte des investissements (annexe 5).

447.

Commission économique pour l’Afrique, Les infrastructures de transport et l’intégration régionale en Afrique centrale, Paris, éditions Maisonneuve & Larose, année 2005, page 60.

448.

S. Bernard, La recherche de la rentabilité des activités publiques et le droit administratif, LGDJ, Paris, année 2001, 378 pages.